Couleurs de l’incendie
FROIDE VENGEANCE
Projeté en avant-première le mois dernier, en ouverture du festival Cinéroman à Nice, Couleurs de l’incendie est une adaptation du roman du même nom de Pierre Lemaitre (également en charge du scénario), faisant suite à Au revoir là-haut.
Jeux de pouvoir, corruption, affirmation d’un personnage féminin fort, drame intime, montée du totalitarisme en Europe pour toile de fond... En dévorant le livre, Clovis Cornillac a tout de suite flairé son potentiel cinématographique.
« Quand on m’a proposé ce film, je n’ai pas hésité. Je suis Pierre Lemaitre depuis ses premiers romans. Il n’y a pas de lassitude, son écriture se perfectionne et devient de plus en plus ample », nous expliquait Clovis Cornillac.
Gang de requins
Venu à Nice avec Benoît Poelvoorde, Léa Drucker et Alice Isaaz, le natif de Lyon a assuré la mise en scène, tout en tenant le rôle d’un chauffeur se transformant peu à peu en poisson pilote pour Madeleine Pericourt, l’héritière déclassée et revancharde jouée par Léa Drucker. Lui et Lemaitre semblent avoir trouvé un bon équilibre de travail. « Pierre n’est pas un frustré de la mise en scène, il est sain. Il a insisté sur le fait que c’était mon film et m’a demandé de quoi j’avais besoin. »
Impeccable dans Close, long-métrage du Belge Lukas Dhont récompensé par le Grand prix au Festival de Cannes, Léa Drucker brille à nouveau, dans la peau d’une héritière mise sur la paille par trois hommes de son entourage : Gustave Joubert, un fondé de pouvoir retors (Benoît Poelvoorde), Charles Pericourt, un politicien cupide (Olivier Gourmet) et Robert Ferrand, un journaliste arriviste (Alban Lenoir).
Madeleine, pas si tendre
Plumée, mais pas coulée, cette chère Madeleine, que tous prenaient pour une bonne poire.
« Le chemin parcouru par Madeleine est tout à fait étourdissant pour une comédienne. Dans la première partie du film, elle subit beaucoup, on ressent une grande fragilité chez elle. Ensuite, on voit son instinct de survie, son émancipation. Cela est renforcé par le regard de Clovis sur elle », estimait la comédienne.
Alice Isaaz, elle, incarne Léonce Picard, la dame de (mauvaise) compagnie de Madeleine Pericourt. L’actrice de 31 ans disait adorer « les films d’époque, autant que le cinéma qui a une dimension romanesque ». À ses yeux, Léonce est « une femme libre, moderne. Elle sait comment naviguer dans un monde de requins, elle qui vient d’une classe sociale plus basse. Pour moi, elle n’est pas immorale, elle est guidée par sa survie. »
Toujours aussi facétieux et fasciné par un porte-clés contenant des minéraux « énergisants », selon lui, Benoît Poelvoorde nous parlait de Gustave Joubert, ce sombre chargé de pouvoir.
« Moi c’est facile, je joue le salaud, et j’aime ça. On sent qu’il est vraiment amoureux de Madeleine, qui l’éconduit sèchement. Une bête blessée, c’est toujours ce qu’il y a de pire. Il vit ce moment comme une humiliation et il a aussi envie de vengeance. »
« Le chemin parcouru par Madeleine est tout à fait étourdissant pour une comédienne »