Inflation : jusqu’où ?
La prévision économique est loin d’être une science exacte, mais il est des lois économiques qu’on ne peut durablement fouler aux pieds. La patrouille finit toujours par vous rattraper. Il en va ainsi pour la politique actuelle du gouvernement. Le Fonds monétaire international (FMI) lui a adressé hier dans ses recommandations annuelles un réel avertissement. Certes, la France, avec son « quoi qu’il en coûte » pour faire face à l’épidémie puis à la crise énergétique, a évité un brutal coup de frein qui aurait provoqué un dangereux tête-à-queue de son économie. Mais l’heure des comptes a sonné. Le FMI est formel : la France doit diminuer ses dépenses budgétaires pour éviter que ses déficits, déjà considérables, prennent des dimensions trop dangereuses. Au passage, il critique le budget 2023 pas assez vertueux en matière de dépenses, et s’inquiète de l’évolution de l’endettement public à moyen terme qui placerait le pays en porte-à-faux visà-vis de ses partenaires européens. Tout ne va donc pas si bien Madame la marquise, contrairement à ce que nous chantent souvent nos ministres de Bercy.
Cette situation inconfortable rend évidemment encore plus délicate la conduite du pays, d’autant que le FMI prévoit une croissance hexagonale de 0,7 % en 2023, quand l’exécutif a construit son budget sur le chiffre de 1 %. Les marges de manoeuvre du gouvernement sont donc de plus en plus étroites et l’inflation lui complique la tâche. Pour y faire face et amortir le choc dans le budget des ménages, Emmanuel Macron a mis en place un bouclier tarifaire sur l’énergie qui contribue à une hausse des prix en France (+6,2% d’octobre 2021 à octobre 2022) moins importante que dans le reste de la zone euro (+10,6%). La note à payer pour l’état est néanmoins considérable et va creuser le déficit de l’état (5,4 % en 2023, prévision du FMI). Si grand d’ailleurs que le gouvernement a décidé de réduire le soutien public sur l’énergie. Le pouvoir avance donc sur un fil entre déficits et endettement excessifs, inflation, préservation du pouvoir d’achat, etc. Tout va désormais dépendre
« Les inconnues géopolitiques sont trop nombreuses pour dire que le pic inflationniste sera bientôt derrière nous »
de l’évolution des prix de l’énergie, de l’alimentation, et des matières premières. Pour la première fois depuis 18 mois, des signaux heureusement laissent espérer un reflux de l’inflation. Il est amorcé aux États-unis où elle est passée de 8,2 % fin septembre à
7,7 % fin octobre. Le prix du baril du pétrole et du gaz sont de nouveau à la baisse, les prix agricoles se tassent à l’international et les tarifs du fret maritime reculent. Bref, à l’horizon 2024, l’inflation pourrait redevenir supportable et gérable. Mais, on le sait, une hirondelle ne fait pas le printemps. Les inconnues géopolitiques sont si nombreuses qu’il est encore trop tôt pour affirmer que le pic inflationniste sera bientôt derrière nous.