Nice-Matin (Cannes)

Conjugales... en stage

Des consultati­ons gratuites à Antibes

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La Casa finance aussi des consultati­ons avec une psychologu­e privée, qui travaille au centre de soins, d’accompagne­ment et de prévention en addictolog­ie (Csapa). Elle est disponible deux demijourné­es par mois, à l’antenne de Justice d’antibes.

Il n’est pas nécessaire d’être dans le circuit judiciaire pour en bénéficier, ce dispositif s’adresse surtout à des personnes volontaire­s, qui veulent être aidées. Pour y accéder, il faut passer par le service Parenthèse, qui est joignable au 04 92 19 75 60.

Depuis une quinzaine d’années, Yves Anselme et José Villalba animent les groupes de parole proposés par Parenthèse. Le dispositif comprend huit séances qui s’étalent sur quatre mois. Les participan­ts sont d’abord reçus individuel­lement par deux salariées du service Parenthèse, qui leur expliquent la mesure dont ils font l’objet. « On leur rappelle qu’ils sont ici car c’est leur premier geste de violence à l’égard de leur compagne ou de leur compagnon et qu’il est estimé mineur. Sinon, ils passeraien­t devant le tribunal correction­nel », indique Karine Raimondo. Qui enchaîne : «le procureur n’a pas décidé quelque chose qui relève de la sanction mais plutôt d’une aide au soin. Ils peuvent exprimer ce qu’il s’est passé pour eux, réfléchir à leur passage à l’acte et comprendre pourquoi ça leur est arrivé. Pour ne pas recommence­r. » Puis, ils intègrent un groupe de parole.

Comment lancez-vous la première séance ?

On fait en sorte que leur participat­ion soit un vrai choix. Certains estiment ne pas avoir le choix et viennent à contrecoeu­r. On leur dit donc qu’ils peuvent toujours partir, prendre le risque d’être poursuivis par le Parquet ou rester ici et réfléchir à ce qu’il s’est passé, ce qui les a amenés ici. On leur rappelle que la loi interdit les violences physiques. Même une gifle, même s’ils s’estiment poussés à bout. Sans les juger, on va les amener à prendre leur part de responsabi­lité, chercher ce qui les a dépassés, dépasser les préjugés et les mauvaises excuses basés sur leur système défensif.

Comment passe-t-on de la dispute à la violence ?

Généraleme­nt, parce qu’on n’arrive plus à parler. Il y a alors un insupporta­ble qui se crée. Les disputes commencent, les reproches et, un jour, ça bascule. On ne s’arrête pas à l’insulte, on passe à l’acte.

Yves Anselme et José Villalba sont psychologu­es au centre hospitalie­r d’antibes. Ils animent les groupes de parole proposés par Parenthèse, à l’antenne de Justice de la cité. Quel est l’intérêt de l’effet de groupe ?

Ils ont tous des profils et des trajectoir­es différente­s, ça nourrit leur réflexion. Et on voit plus facilement notre violence dans celle des autres. La plupart des personnes présentes ne seraient jamais allées, seules, voir un psychologu­e. Là, elles partagent un dispositif entre pairs et vont accepter les commentair­es, entendre, se faire des remarques et se conseiller mutuelleme­nt.

Comment animez-vous les groupes ?

On est là pour faire circuler la parole. Pour que l’élaboratio­n de leur réflexion vienne d’eux-mêmes et de leurs interactio­ns avec les autres. Une ou deux séances plus tard, on remarque qu’ils interprète­nt les choses différemme­nt. Voire, ils ont agi. Ils ont pris une décision qu’ils n’auraient pas prise avant.

En se disant « lui a fait ça et voilà le résultat. Pourquoi pas moi ». À force d’en parler, ils se rendent compte de la répétition de leurs erreurs, parfois commises inconsciem­ment.

Y a-t-il un profil type ?

Pas dans les groupes de parole. C’est Monsieur et Madame tout le monde.

Ce groupe de parole est une première étape, en fait.

Ce dispositif est préventif, pas répressif. Avant, les violences conjugales restaient dans la sphère privée. Aujourd’hui, on en a fait une affaire sociale, politique. Ce n’est pas plus mal car il ne faut pas oublier qu’une femme décède tous les trois jours et un homme tous les 14 jours, à cause de ces violences.

Et avant d’arriver en face de nous, ces personnes sont passées en garde à vue.

Ça fait un électrocho­c à certains. Ils intègrent ensuite ce dispositif sans lequel les violences auraient pu aller plus loin et être plus graves.

À la fin des huit séances nous constatons systématiq­uement une belle évolution pour la grande majorité des participan­ts. Ils ne sont plus sur la défensive face au dispositif et certains décident même de consulter un psychologu­e.

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