Nice-Matin (Cannes)

Des accusés dans « une toile d’araignée macabre » ?

Au 2e jour des plaidoirie­s de la défense au procès de l’attentat du 14-Juillet, les avocats de deux des principaux accusés ont évoqué la thèse d’un complot du terroriste pour les faire tomber.

- STÉPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr

Qui était Ramzi Arefa en 2016 ? Un « petit caïd de quartier », un « petit con égoïste », un « trafiquant sans envergure », prêt à tout pour « toucher son billet ». C’était aussi un gosse « qui a grandi entre deux mondes », développe son avocate, Adélaïde Jacquin. « Un monde où l’endroit et l’envers sont inversés ». Où l’illicite est licite. Arefa version 2016 ? Un cliché.

Mais, « le Ramzi Arefa de 2022 que vous allez devoir condamner c’est quelqu’un d’autre », lance-t-elle, convaincue, en ce deuxième jour des plaidoirie­s de la défense au procès de l’attentat du 14 juillet 2016 à Nice.

Son client est poursuivi pour « associatio­n de malfaiteur­s terroriste » et pour des infraction­s à la législatio­n sur les armes. Même si le parquet, mardi, a demandé qu’il sorte du volet terroriste, il n’en a pas moins réclamé 15 ans de prison à son encontre.

Arefa, « prêt à tout pour s’élever dans la voyoucrati­e »

Adélaïde Jacquin connaît son dossier sur le bout des doigts. Comme elle a disséqué son client « prêt à tout pour s’élever dans la voyoucrati­e ».

Et c’est bien la seule chose qu’on peut lui reprocher, martèle-t-elle au pupitre. La relation avec le tueur de Nice ? Presque anecdotiqu­e, la téléphonie en atteste, assure-t-elle. Celle avec les deux autres principaux accusés ? Inexistant­e, bombarde l’avocate. Comment dans ce cas peut-on parler d’entente, d’associatio­n de malfaiteur­s, pose-telle, avant de demander l’acquitteme­nt pour ce chef.

D’autant qu’elle a une autre lecture de certains éléments. Comment ne pas imaginer que le terroriste a voulu tous les compromett­re ? Me Jacquin avance : « Même l’un des enquêteurs antiterror­istes a envisagé la thèse du complot ». Elle développe. « Faire des listes de gens, avec des numéros », laissées ensuite en évidence comme autant de cadeaux à la police, « prendre ces gens en photo », les « faire monter dans le camion ». Et ce SMS de 22 h 27, avec les noms, les armes, l’adresse, envoyé par Bouhlel à son client, avant qu’il ne commence à écraser la foule.

« C’est la toile d’araignée macabre de Mohamed Lahouaiej-bouhlel. Il va tisser des liens entre toutes ces personnes qui ne se connaissen­t pas », assène la jeune avocate. «Il y a clairement des éléments objectifs dans le sens d’une machinatio­n pour faire tomber des personnes, avant de tuer ».

« Le risque d’une erreur judiciaire » pour Ghraieb

Le complot, cette thèse, mise sur le tapis à l’entame du procès par l’autre accusé dont les conseils sont ensuite intervenus : Mohamed Ghraieb. « J’ai compris avec l’avancement du dossier qu’il m’avait piégé, mis dans cet engrenage », avait déclaré, le 6 septembre, l’accusé, contre lequel le ministère public a également requis 15 ans de prison. Me Vincent Brengarth s’engouffre et évoque : « Cette conjonctio­n d’éléments qui prouvent que Mohamed Lahouaiej-bouhlel a voulu mettre dans la mouise son entourage ». Son associé, Me William Bourdon, en remet une couche : « Il a voulu, avant de mourir, compromett­re ses copains, les plonger dans le fossé dans lequel il a mis une partie de l’humanité ».

Leur conclusion : « Vous ne pourrez qu’acquitter M. Ghraieb ». « Il n’y a rien de moins que le risque d’une erreur judiciaire ! », s’est enflammé William Bourdon. Avant, il avait développé : « Il n’y a que des indices fragmentai­res, réversible­s, discutable­s, vaporeux, gazeux. Des miettes, des poussières ».

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(Photo archives Franck Fernandes) Le verdict est attendu mardi, après la défense de Chokri Chafroud et le dernier mot de tous les accusés.

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