Trois professionnels poursuivis pour 497 tests PCR bidonnés
Submergés par l’afflux de tests, trois responsables de laboratoires à Peymeinade, Montauroux et Nice ont déclaré négatifs 497 prélèvements sans les analyser. Des peines avec sursis ont été requises.
Des patients négatifs à la Covid-19 en septembre et octobre 2020 dans le Var et les Alpes-maritimes ne l’étaient peut-être pas. Une enquête judiciaire accuse deux pharmaciens biologistes (un fils et son père) ainsi qu’un médecin biologiste, débordés par l’afflux de travail en pleine pandémie en septembre 2020, d’avoir sciemment renvoyé des prélèvements non analysés en les présentant comme vierges de tout virus.
Les investigations de l’office central de lutte contre les atteintes à la santé publique ont démontré que 497 tests, dûment payés par la Sécurité sociale, ont fait l’objet d’une « saisie manuelle ».
Or ces prélèvements auraient dû être analysés par des automates d’un laboratoire sous-traitant installé dans le quartier des Moulins à Nice.
Ces professionnels surdiplômés mais sous pression ont préféré les renvoyer en les déclarant négatifs. Ce qui leur vaut de comparaître devant le tribunal correctionnel de Nice pour faux et usage de faux, escroquerie et mise en danger de la vie d’autrui. « Au lieu de rendre des faux négatifs, ne fallait-il pas qualifier ces tests de non conformes ? », s’interroge le président Alain Chemama.
25 000 euros indûment facturés
Romain Zanchi, 47 ans, ex-président d’eurofins I-lab Montauroux (gestionnaire de huit laboratoires dans le Var et les A.-M.) a été radié définitivement par l’ordre national des pharmaciens, sanction disciplinaire dont il a fait appel. «On était en guerre, comme disait le président de la République. On était dépassé, on a manqué de discernement », tente-t-il de se justifier. « Pour moi, un prélèvement après cinq jours n’était plus interprétable donc sans valeur. »
Le pharmacien biologiste esquisse un timide mea culpa à la barre du tribunal : « J’ai pris cette décision pour soulager mon équipe qui était sous tension depuis plus d’un mois. Je n’aurais pas dû les facturer à la Sécurité sociale mais j’ai la conviction de ne pas avoir mis en danger mes patients. »
Ce n’est pas l’avis de ses pairs pharmaciens, particulièrement critiques vis-à-vis de leur collègue qui, selon eux, a foulé aux pieds le serment de Gatien. Le groupe Eurofins, qui a racheté le laboratoire de Romain Zanchi 5 millions d’euros tout en le maintenant président d’eurofins Labazur Ilab, a peu goûté cette mauvaise publicité. Il s’est lui aussi porté partie civile.
Le préjudice pour la Sécurité sociale, estimé à 25 000 , aurait été qualifié de « grotesque » par un prévenu. Les avocats des CPAM du Var et des Alpes-maritimes s’insurgent du terme et s’étonnent que la somme indûment perçue n’ait pas encore été remboursée par les trois prévenus.
La défense plaide la relaxe
Le procureur Christophe Tricoche requiert cinq mois de prison de prison avec sursis contre MM. Zanchi et Collet, 10 000 d’amende et une interdiction d’exercer de 3 ans.
À l’encontre de Romain Zanchi, un an de prison avec sursis, 25 000 d’amende et une interdiction professionnelle de 5 ans sont demandés. De quoi irriter visiblement, Me Bianchi, avocat de Gérard Zanchi. Il plaide la relaxe de son client estimant que « l’article du code pénal visant le faux en écritures n’est pas le bon. »
Il pourfend également « la mise en danger » alors que personne, dans cette procédure, n’a pas été exposé à un risque de mort immédiat. Me Guérinot, aux intérêts du Dr Guillaume Collet, insiste pour sa part sur le climat d’agressivité de certains patients, les menaces de mort, alors que les retards s’accumulaient.
Me Lucas-baloup, qui a remplacé le controversé Di Vizio à la défense de Romain Zanchi, rappelle que les saisies manuelles « ont été opérées » sur une période très limitée, « Du 16 au 18 septembre et du 21 au 24 septembre. »
L’avocate estime également que les perquisitions dans les laboratoires, en l’absence d’un magistrat, sont illégales. Le jugement a été mis en délibéré au 20 février.