Au procès Sarkozy, la « curiosité mal placée » d’un ex-magistrat
Son rôle dans l’affaire des « écoutes » est souvent éclipsé par le bouillonnement de Nicolas Sarkozy : l’ancien haut magistrat Gilbert Azibert a tenté vendredi de contrer l’accusation selon laquelle un « coup de pouce » de l’ex-président lui avait été promis en rétribution d’informations confidentielles.
Tout oppose les deux hommes que la cour d’appel de Paris rejuge pour corruption et trafic d’influence. Le verbe haut de M. Sarkozy, 67 ans, tranche avec le débit haché de l’ex-avocat général à la Cour de cassation de 75 ans.
« Je l’aiderai »
Le troisième prévenu, l’avocat Thierry Herzog, reste, lui, mutique, refusant de s’exprimer sur tout ce qui a trait à des écoutes téléphoniques qu’il considère illégales. M. Azibert reste toutefois une pièce maîtresse du « pacte de corruption » qui aurait, selon l’accusation, lié les trois prévenus au début de l’année 2014. C’est ce magistrat chevronné qui aurait obtenu des informations confidentielles sur des délibérations à la Cour de cassation, au sujet d’un pourvoi alors formé par M. Sarkozy dans l’affaire Bettencourt.
Il aurait notamment connu la teneur d’un avis confidentiel, obtenu la date des délibérations et tenté d’influencer des conseillers qui y participent. Des accusations qu’il conteste formellement. En retour, d’après les conversations captées par les enquêteurs, Nicolas Sarkozy se serait engagé auprès de Me Herzog à donner un « coup de pouce » au magistrat pour soutenir sa candidature à un poste au Conseil d’état à Monaco. « Je l’aiderai », promet ainsi l’ex-président le 5 février 2014.
Face à la cour, M. Azibert l’affirme solennellement : il n’a « jamais donné de renseignements couverts par le secret » à son ami Thierry Herzog. Il ne nie pas s’être intéressé à ce dossier – pour des raisons « juridiques », jure-t-il – mais assure en avoir discuté avec Me Herzog en des termes très généraux pour l’éclairer sur des points de procédure, et sans jamais franchir la « ligne jaune ».
« Il a bossé, hein »
Face au scepticisme de la cour, le prévenu finit par concéder « une curiosité mal placée » pour un dossier pénal sans lien avec ses fonctions. Dans les écoutes, Me Herzog loue pourtant à plusieurs reprises les interventions supposées de M. Azibert. « Il a bossé, hein, tu sais que là c’est du boulot », assure-t-il à M. Sarkozy. Selon M. Azibert, Me Herzog aurait toutefois affabulé pour rassurer son client sur l’issue de son pourvoi devant la Cour de cassation.