Des raisons d’espérer
Le monde qui vient est plus favorable à la France”
FRANÇOIS LENGLET
Les catastrophes semblent s’accumuler : l’épidémie, la guerre d’ukraine, le réveil des empires menaçants et autoritaires, l’inflation, les pénuries, avec, en plus, la crise climatique. Or, nombre de ces phénomènes sont en réalité les conséquences d’une même cause, une crise de transition nous faisant quitter le monde libéral pour un autre, très différent. L’ancien monde libéral est né en 1989, avec la chute du Mur, qui avait ouvert une période de mondialisation. Le risque géopolitique avait disparu, avec la victoire de l’amérique sur son ennemi de l’époque, L’URSS. C’était une période où le capital, sans entrave, avait pris l’ascendant sur le travail. C’est fini. La guerre d’ukraine est le double inversé de la chute du Mur, c’est l’autre borne, finale, du cycle libéral. La puissance américaine est désormais contestée de tous côtés, l’économie mondiale se fragmente, la géopolitique reprend l’ascendant sur l’économie. Au-delà de la période de transition qui est désagréable, on voit poindre des choses plus heureuses. Comme l’inversion de deux rapports de force. D’abord celui qui oppose le producteur et le consommateur. Ce dernier était le grand gagnant de l’ère libérale, la référence à partir de laquelle s’est ordonnée l’économie mondiale – et les politiques européennes comme celle de la concurrence ou de l’énergie. Les priorités changent. C’est désormais la question de la sécurité des approvisionnements qui prévaut. Cela devrait être favorable à l’emploi et aux salaires chez nous. L’autre couple qui bascule, c’est le capital-travail. Le travail reprend la main, sous l’effet lent mais très puissant du vieillissement démographique, qui raréfie la ressource humaine dans la plupart des régions connectées à l’économie-monde. C’est le mouvement inverse à celui qui s’était produit il y a quarante ans. On peut se demander qui dominera ce nouveau monde. La Chine est à la veille d’un choc démographique majeur, un vieillissement accéléré qui va mettre à mal ses rêves de puissance.
Sans compter ses difficultés relatives à l’épidémie, à l’économie, à la situation politique. L’occident conserve, outre ses capacités militaires et technologiques, une forte puissance d’attraction. Ajoutons que si l’europe est la principale victime de la crise de l’énergie, elle a jusqu’ici fait montre d’une unité remarquable face à la Russie. Unité qu’on avait observée aussi pendant la pandémie. L’europe avait perdu sa raison d’être lorsque les régimes communistes sont tombés, car auparavant, elle était en quelque sorte soutenue par le rideau de fer qui la séparait de l’antimonde totalitaire. Face à la Russie d’aujourd’hui, sa légitimité renaît naturellement.
C’est l’expérience du danger qui fortifie la conscience de soi. Cela tempère les considérations sur le déclin de l’europe, bien réel aux plans économique et démographique. On peut aussi penser que le monde qui vient est plus favorable à la France, parce qu’il sera politique plus qu’économique.
La France possède encore une diplomatie et des forces armées parmi les plus avancées du monde. Ce sont des atouts dans un univers fragmenté, où il faut composer des alliances. À l’inverse, l’allemagne a plus de difficulté aujourd’hui, parce qu’elle était la grande gagnante du cycle paisible qui se termine. Les deux piliers de son modèle économique, une énergie russe peu chère et un marché chinois sans limite, sont ébranlés. En France, c’est l’efficacité problématique de l’état qui pourrait constituer la vraie menace. Face aux risques géopolitiques et stratégiques, saura-t-il encore bâtir une politique industrielle qui garantisse l’avenir de la nation ?
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