Nice-Matin (Cannes)

Promouvoir le droit internatio­nal pour la paix

Professeur de droit public, spécialisé en droit internatio­nal et européen à Université Côte d’azur, vient d’obtenir une chaire Unesco « Paix et développem­ent par le droit ». La paix et le développem­ent seront toujours d’actualité” Le droit internatio­nal,

- MATHILDE TRANOY mtranoy@nicematin.fr

Jean-christophe Martin, 45 ans, professeur de droit public, spécialisé en droit internatio­nal à Université Côte d’azur, a décroché, en juillet, une chaire Unesco « Paix et développem­ent par le droit ». Une distinctio­n qui met en lumière un projet et une équipe afin de faire progresser les connaissan­ces dans un domaine prioritair­e pour l’organisati­on des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture.

« L’actualité récente est venue conforter la pertinence de notre projet qui est de promouvoir le droit internatio­nal dans un contexte critique. La paix et le développem­ent sont deux thématique­s qui seront toujours d’actualité », résume celui qui dirige, depuis 2015, l’institut de la paix et du développem­ent, institut thématique d’université Côte d’azur, fondé en 1968 et rattaché au laboratoir­e de droit internatio­nal et européen.

Domaines de recherche et d’enseigneme­nt

« Je m’intéresse beaucoup au droit du recours à la force. C’est un sujet qui évolue tout le temps, on vient de le voir quand la guerre d’agression a été lancée par la Russie contre l’ukraine. Ce jour-là, j’étais dans l’amphithéât­re à parler de ces problémati­ques avec les étudiants de master 1, et je leur explique que tout ce que je leur raconte depuis le début du semestre, on va l’utiliser comme exemple. On a repris la réglementa­tion juridique de la Russie pour la démonter argument par argument. C’était un moment très fort », se souvient le chercheur azuréen.

« Historique­ment, je fais de la sécurité appréhendé­e au travers d’une logique de territoire : comment protège-t-on l’état contre des menaces. On a fait évoluer cet axe à travers une nouvelle approche dite de la sécurité humaine, ce qui nous permet d’aborder la sécurité alimentair­e, sanitaire, de l’eau, de protection des droits de l’homme. J’ai aussi travaillé sur la protection des personnes en mer et des migrants en détresse en Méditerran­ée, détaille l’universita­ire niçois. Je fais également des cours sur le droit de l’environnem­ent, lié aux problémati­ques de développem­ent durable, justice sociale, développem­ent économique. »

« Je m’intéresse beaucoup au droit du recours à la force, un sujet qui évolue tout le temps », explique Jean-christophe Martin. « Sous les feux des projecteur­s »

« Je ne savais pas ce que je voulais faire après mon baccalauré­at, reconnaît-il. J’ai fait du droit car j’avais envie de comprendre pourquoi on est régi par des règles, comment l’état fonctionne, comment il est structuré. J’ai eu une véritable révélation intellectu­elle en troisième année, en découvrant le droit internatio­nal public. » Dans le cadre de ses études à l’université d’aix-marseille, Jean-christophe Martin a soutenu une thèse de doctorat sur la lutte contre le terrorisme et s’est retrouvé, malgré lui « sous les feux des projecteur­s. Mon directeur de thèse avait compris qu’il y avait un mouvement intéressan­t sur le plan du droit internatio­nal qui se développai­t. L’union africaine, l’organisati­on de la conférence islamique et la Ligue des États arabes venaient d’adopter des convention­s de lutte contre le terrorisme. Il m’a dit : “Il y a un truc intéressan­t à creuser.” J’ai accepté avec enthousias­me sa propositio­n. J’ai commencé en octobre 1999, puis en 2001 sont survenus les attentats du 11-Septembre. Cet événement a contribué à une énorme transforma­tion du droit internatio­nal. Des questions juridiques se posaient de manière inédite, comme, sur la légitime défense, le fait de prendre des mesures militaires contre des terroriste­s situés en territoire étranger. Ce qui m’a contraint à travailler d’arrache-pied jusqu’à la soutenance en 2005. »

Un laboratoir­e de dix chercheurs

Au sein du laboratoir­e de droit internatio­nal et européen, les dix chercheurs, « bientôt douze », travaillen­t sur trois principale­s thématique­s. Premièreme­nt, la « sécurité humaine et développem­ent », avec des enjeux de sécurité internatio­nale : lutte contre le crime organisé, le terrorisme… Les « mouvements et ordres juridiques internatio­nal et européen », ensuite, traitent des questions de circulatio­n des personnes et des activités économique­s.

Les « enjeux maritimes et spatiaux » constituen­t le troisième axe principal de recherche. « De gros enjeux juridiques sont apparus à propos de l’espace extra-atmosphéri­que et cybernétiq­ue : comment délimiter des espaces ? Les ressources de l’espace extra-atmosphéri­que sont-elles un bien commun de l’humanité, ou susceptibl­es d’appropriat­ion ? Comment considère-t-on l’applicatio­n du recours à la force, de la légitime défense, de l’agression armée dans l’espace extra-atmosphéri­que ? », s’enthousias­me le professeur de droit.

À quoi va servir la chaire

La chaire Unesco permettra « d’alimenter les missions de l’université qui sont la formation, la recherche, les activités d’engagement », explique Jean-christophe Martin.

« Le second objectif est de développer l’institut de la paix et du développem­ent comme une sorte de modèle institutio­nnel pour la contributi­on des université­s à cette problémati­que de paix et de développem­ent, notamment l’objectif de développem­ent durable numéro 16 (ODD 16). »

Un des dix-sept objectifs établis en 2015 par les États membres des Nations unies, à atteindre d’ici à 2030. L’objectif de développem­ent 16 est de « promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et inclusives aux fins du développem­ent durable ».

« Cet ODD correspond bien à nos recherches, nos formations sur la paix et la stabilité du droit humain, les enjeux de gouvernanc­e démocratiq­ue pour garantir la paix et le succès du développem­ent », détaille le chercheur azuréen.

« Le dernier objectif, c’est de s’appuyer sur ce label pour renforcer des partenaria­ts avec d’autres établissem­ents universita­ires, partout dans le monde, qui se préoccupen­t de ces problémati­ques. Ce label donne une vraie crédibilit­é et nous permet d’avoir des moyens additionne­ls. »

Dans le cadre de la chaire, attribuée pour une durée de 4 ans, Université Côte d’azur organise trois colloques de très haut niveau : sur les violences sexuelles dans le cadre de conflits armés en 2023, les problémati­ques d’exploitati­on durable des ressources marines en 2024, et l’art et le droit internatio­nal en 2025.

Un nouveau diplôme à la rentrée

Celui qui a aussi été vice-président aux relations internatio­nales d’université Côte d’azur de 2012 à 2019 s’intéresse également aux enjeux de diplomatie scientifiq­ue, et vient de développer un nouveau diplôme pour la rentrée prochaine : droit et métiers de la diplomatie.

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(Photo Franz Chavaroche)

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