COP15 sur la biodiversité : « L’important est qu’il y ait des actes qui engagent »
En novembre 2022, Cécile Sabourault est partie en Égypte, à la COP27 sur le climat, avec une dizaine d’autres chercheurs et scientifiques de l’université Côte d’azur. Alors que la COP15 vient de s’ouvrir à Montréal, la directrice D’ECOSEAS, laboratoire d’écologie marine en pointe dans la protection de la biodiversité sur le littoral méditerranéen, revient sur l’enjeu d’une biodiversité riche et les bénéfices d’une protection des écosystèmes. Mais aussi sur les conditions nécessaires à cette préservation.
Après avoir vu de près les négociations sur le climat, quels sont vos espoirs pour la COP15 ?
Ces COP sont des rendez-vous très importants, malgré tous les ressentis qu’on peut avoir. Pour les scientifiques, c’est une plateforme pour faire passer les connaissances et les conseils.
Les textes qui sortent de ces COP sont approuvés par tous les signataires, tous les gouvernements, donc forcément, il y a des tractations à la virgule près. Parfois, ce sont des sauts de puce, mais on a raison de continuer. L’espoir est qu’on puisse se mettre d’accord sur l’objectif de 30 % d’espaces à protéger, à terre et en mer. Après, si c’est 25 %, ce sera 25, l’important est qu’il y ait des actes qui engagent.
Comment voyez-vous l’évolution de la biodiversité en Méditerranée ?
Il y a une diminution de la biodiversité mais en Méditerranée, de nouvelles espèces arrivent, ce qui n’est pas forcément négatif. Par contre, il ne faudrait pas que certaines espèces invasives prennent le dessus sur d’autres. Cela déséquilibrerait le fonctionnement des écosystèmes.
Par exemple, quand il y a eu le confinement, les organismes marins sont venus plus près des côtes, il y a eu un meilleur taux de reproduction, car aucune action humaine ne les a impactés.
Il faut donc limiter l’activité humaine ?
L’activité humaine génère un impact sur les écosystèmes, qui est de toute façon important. L’idée n’est pas d’empêcher l’activité économique, mais de chercher à avoir le moins d’impact possible. N’oublions pas que les écosystèmes eux-mêmes procurent des services écosystémiques. Depuis quelques années, les gens comprennent qu’une protection va améliorer le gain économique des populations qui vivent sur les territoires.
De quelle façon ?
Dans des zones marines protégées [peu ou pas de pêche, Ndlr], on voit l’impact sur l’écosystème en trois à cinq ans. La reproduction est plus efficace, cela a un impact sur les peuplements de poissons. En préservant de petites zones, en Méditerranée, on améliore les services écosystémiques rendus aux populations. On a besoin de refuges, de plusieurs petites zones qui soient connectées, plutôt qu’une grande zone.
Quels moyens d’action sont à portée de main ?
En milieu marin, il y a trois choses importantes à retenir. D’abord, mettre en place des zones préservées, les fameux 30 % d’aires protégées. Ensuite, surveiller, pour être certain que la protection est effective. Enfin, suivre les indicateurs de la biodiversité, pour vérifier l’impact de la préservation et mieux comprendre comment la combiner avec des activités économiques.
À terre, la problématique semble différente, selon chaque configuration locale.
Au niveau terrestre, cela va être pareil : plus on a d’organismes différents, plus on a une mixité, et du coup chacun apporte sa contribution. Quand on construit une digue, une route, quand on bétonne un parking, on supprime de la biodiversité, c’est un impact majeur, c’est détruit à jamais. Parfois, on voit des plans de conservation aberrants, dans lesquels on préserve un ou deux arbres, seuls, car il y a un animal particulier dedans, mais au final, l’animal a besoin du reste à côté pour vivre. Tout est une question de diversité.
‘‘ Une COP est une porte ouverte vers les gouvernements”