Nice-Matin (Cannes)

Ecomusée sous-marin : des statues miraculeus­es

La dernière plongée a montré que la flore s’installe de plus en plus massivemen­t sur les six sujets de Jason decaires Taylor. Jeudi, projection de « UNDER [SI:] » film de cette belle aventure.

- CHRYSTÈLE BURLOT cburlot@nicematin.fr

Il y a 5 ans, la ville de Cannes a demandé au sculpteur environnem­entaliste, photograph­e sous-marin Jason decaires Taylor, de plonger à Sainte-marguerite, dans une zone sinistrée par de multiples dynamitage­s et la pose d’un câble électrique. À croire que l’espace (et le challenge : repeupler cette zone désertifié­e) l’a convaincu… L’idée a été posée de créer un écomusée – le premier du genre en Méditerran­ée – avec des oeuvres qui serviraien­t d’habitat et de refuge à la biodiversi­té marine locale.

Quand on a googlisé Jason decaires Taylor (faites-le, c’est beau !) , on est tombé sur de magnifique­s images et vidéos. Du jamais vu. De l’art sousmarin…

Le film (36 minutes) qui sera projeté jeudi 9 février à 18 h 30 au grand auditorium du Palais des Festivals, en avant-première, raconte l’aventure du sculpteur à Cannes, l’aventure des Cannois à la rencontre du sculpteur, l’aventure des fonds marins de Sainte-marguerite.

2018 : 45 Cannois au moulage

Cette aventure, elle commence en juin 2018, lorsque 45 Cannois se prêtent à l’expérience du moulage à Sainte-marguerite et se laissent « enfermer » dans un plâtre écologique depuis le petit atelier d’art du fort. « C’est fabuleux de participer à ce projet de création d’un écomusée sousmarin », avait commenté Laurent ce jour-là.

Trois ans plus tard, en janvier 2021, six oeuvres réalisées à partir de ces moulages sont immergées entre les deux îles en présence des modèles retenus. Six visages cannois de deux mètres de haut fabriqués dans du matériau marin écologique à PH neutre, offrant un refuge à la vie subaquatiq­ue.

Ce jour-là, on s’en souvient, c’est aussi une promesse qui a été faite. Celle de l’artiste, Jason decaires Taylor et du maire de Cannes, David Lisnard : cette présence, dans une zone sous-marine sinistrée d’un point de vue écologique, agira comme un pansement.

Les sculptures évolueront avec le temps, se recouvrant d’algues, de coquillage­s et de coraux, devenant ainsi partie intégrante de l’écosystème marin local, car leur texture rugueuse et leurs recoins permettent à la faune et à la flore marines de s’y réfugier et d’y prospérer. Le maire de Cannes avait promis un suivi régulier.

2022 : la présence d’une vie

Nous avions interrogé le CIS, conseil scientifiq­ue des îles de Lérins, mandaté pour suivre l’évolution du musée un an plus tard. Françoise Loquès, sa directrice, signalait : « Les premiers signes d’une colonisati­on des sculptures par des espèces classiques. Un petit ver tubicole, par exemple, une sorte de tube calcaire très solide qui s’accroche aux statues. Un feutrage d’algues qui se crée également et sert de nourriture à des petits poissons qui commencent à approcher. Des apogons, notamment : de tout-petits poissons très intéressan­ts à observer ».

Encore 12 mois plus tard, où en est-on ?

Un an plus tard, quel est le constat ? La dernière plongée date d’octobre. Il se pourrait aussi que Jason decaires Taylor aille voir de ses propres yeux comment ses oeuvres évoluent la semaine prochaine. « En tout cas, nous avons constaté une colonisati­on plus forte que lors de la précédente plongée », annonce Régine Resbeutmon­tanella, conseillèr­e grands projets auprès du maire de Cannes. « Nous avons noté une présence d’algues brunes encore plus importante que l’année dernière, des petits vers transparen­ts tubicoles également et, une nouveauté, avec la présence d’une algue rouge… »

Algue rouge particuliè­rement appréciée des gastéropod­es et mollusques : « Cela préfigure sans doute leur arrivée », confirme Régine Resbeutmon­tanella. Cette dernière prévient aussi que : « Les scientifiq­ues estiment que la stabilisat­ion définitive de l’écosystème prendra dix ans. »

On ne le voit pas trop sur le cliché, mais les hauts des « crânes » des statues sont un peu moins colonisés. La faute aux baigneurs qui y posent les pieds. « Nous avons mis en place une surveillan­ce l’été », rappelle Régine Resbeut, « mais il est vrai que cette partie-là des statues subit davantage. L’artiste, estime que c’est le prix à payer pour tant de succès… »

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 ?? (Photos S. Botella, P. Lapoirie et M. Ttancons) ?? En haut, les étapes de la création du musée. Ci-dessus, un cliché du mois d’octobre dernier.
(Photos S. Botella, P. Lapoirie et M. Ttancons) En haut, les étapes de la création du musée. Ci-dessus, un cliché du mois d’octobre dernier.

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