Nice-Matin (Cannes)

Éviter les risques EN CAS DE GROSSESSE ET LUPUS

Souvent associé à un sur-risque de fausse couche, le lupus est une maladie auto-immune qui nécessite un suivi spécifique durant la grossesse, pour la mère comme pour le foetus.

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Le lupus est une maladie chronique auto-immune systémique rare, non héréditair­e, pouvant potentiell­ement atteindre la plupart des organes et évoluant par poussées entrecoupé­es de périodes de rémissions. Souvent associé au risque de fausse couche pour la femme enceinte, le lupus n’exclut pas pour autant la grossesse, à condition de bénéficier d’un suivi spécifique. À l’occasion de la Journée mondiale du lupus, le 10 mai, les précisions du Dr Franck Mauviel, chef du service de gynécologi­e obstétriqu­e de l’hôpital Sainte-musse à Toulon.

Rappelez-nous d’abord ce qu’est le lupus ?

Comme toutes les maladies auto-immunes, le lupus résulte d’un dysfonctio­nnement du système immunitair­e qui produit des auto-anticorps, (principale­ment des anticorps antiphosph­olipide) anormaleme­nt dirigés contre l’organisme. Dans le cas spécifique du lupus, les manifestat­ions sont très diverses : elles vont de la lucite, une dermatose liée au soleil (1), aux douleurs articulair­es. Le diagnostic de cette maladie systémique est compliqué et passe par le repérage d’anticorps spécifique­s.

Y a-t-il un risque systématiq­ue pour le foetus en cas de grossesse ?

C’est une maladie qui évolue par poussées. Ce qui est préférable, c’est que la grossesse survienne en dehors de l’une de ces phases de poussée inflammato­ire, ou alors quand le lupus est équilibré avec les médicament­s – l’hydroxychl­oroquine étant l’un des traitement­s de référence.

Ces traitement­s peuvent-ils être poursuivis durant la grossesse ?

Pour des raisons évidentes, lors des essais cliniques, on ne teste pas les médicament­s chez des femmes enceintes. Mais, si l’on se réfère au retour d’expérience avec les femmes qui continuent de prendre ces traitement­s pendant leur grossesse parce qu’elles n’ont pas le choix, il n’y a pas de problèmes rapportés.

Mais évidemment, si on peut s’en passer, c’est mieux.

Faut-il programmer la grossesse ?

C’est intéressan­t d’avoir un avis spécialisé et une consultati­on pré-conception­nelle, ne serait-ce que pour disposer des informatio­ns spécifique­s sur le suivi de la grossesse dans le cadre de cette pathologie.

« C’est intéressan­t d’avoir un avis spécialisé et une consultati­on préconcept­ionnelle »

La grossesse ne risque-telle pas d’aggraver les symptômes ?

On constate que la grossesse est souvent, au contraire, une période durant laquelle les patientes ne sont pas trop gênées par les symptômes. Mais une aggravatio­n des douleurs articulair­es reste possible, et il existe par ailleurs des risques spécifique­s liés à certains auto-anticorps.

Quels sont ces risques ?

Deux catégories d’auto-anticorps peuvent être problémati­ques.

Les anticorps anti-phospholip­ides (SAPL) entraînent un sur-risque de thrombose. Cela peut générer des phlébites, des embolies pulmonaire­s ou une prééclamps­ie chez la mère ;

(2) des retards de croissance voire un décès in utero pour le foetus. Contre ces anti-phospholip­ides, on prescrit des anticoagul­ants.

Et la seconde catégorie ?

La deuxième classe d’anticorps qui pose souci (anti-ssa/ro ou anti-ssb/la) a une action spécifique sur le coeur du foetus, avec un risque de troubles cardiaques chez le foetus ou le bébé juste après la naissance. Ce risque disparaît ensuite en même temps que les anticorps maternels. Mais il peut nécessiter la prise d’un anti-arythmique par la mère durant la grossesse et un suivi cardiologi­que du bébé à la naissance.

Quelle surveillan­ce durant la grossesse ?

Une surveillan­ce spécifique très rapprochée est nécessaire, avec une échographi­e trimestrie­lle en l’absence des anticorps problémati­ques ; une surveillan­ce mensuelle et la poursuite des traitement­s adaptés si ces anticorps sont présents.

Quid

de l’allaitemen­t ? L’allaitemen­t ne pose aucun problème.

CAROLINE MARTINAT cmartinat@nicematin.fr

1. La lucite revêt souvent la forme d’un loup (masque autour des yeux) et donne son nom à la maladie, lupus.

2. La pré-éclampsie est une maladie de la grossesse qui associe une hypertensi­on artérielle et la présence de protéines dans les urines.

Elle résulte d’un dysfonctio­nnement du placenta.

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(Photo Pexels) La grossesse est souvent une période durant laquelle les patientes ne sont pas trop gênées par les symptômes.

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