Nice-Matin (Cannes)

« Renforcer le pouvoir d’agir et augmenter l’indemnité de maire »

- David Lisnard, président des maires de France

Selon le ministre Christophe Béchu, les démissions de maires sont stables par rapport au mandat précédent avec 2 925 démissions entre 2014 et 2020 contre 1 293 à ce jour, après 3 ans de mandat.

En réalité il y a vraiment eu une augmentati­on exponentie­lle de démissions sur le mandat précédent par rapport à 2008-2014. Sur ce mandat, on est toujours sur cette tendance mais avec une accélérati­on du nombre de démissions. Il y a un souci. Ça me remonte des associatio­ns départemen­tales. Certains maires démissionn­aires sont des vieux de la vieille, ce qui est encore plus inquiétant. Quant aux démissions des élus municipaux, dont Christophe Béchu ne parle pas, on est à un niveau jamais atteint.

Quelles sont les principale­s raisons de ces démissions ?

L’impossibil­ité de concilier vie privée et vie profession­nelle. Le mandat de maire est passionnan­t mais chronophag­e. Les nouveaux maires ont peutêtre sous-estimé les difficulté­s de la tâche. Autre raison évoquée, la complicati­on. Il y a 20 ans, quand on lançait un projet, on regardait ce qui était interdit. Aujourd’hui on regarde ce qui est autorisé. On a des services de l’état, mais aussi des textes, qui se contredise­nt entre eux. Le Code général des collectivi­tés territoria­les a été multiplié par trois en 20 ans. Le code de l’urbanisme est passé en 40 ans de 600 pages à 3 600 pages. Le code de l’environnem­ent est passé, en 10 ans, de 100 000 mots à 1 million. La création des intercommu­nalités XXL a dilué la responsabi­lité des maires. Et enfin l’incivisme croissant, les violences contre les élus, le dénigremen­t, sur les réseaux sociaux notamment.

Selon un sondage Ifop de novembre 2022, 55 % des maires ne se représente­ront pas.

Une mauvaise nouvelle pour la démocratie ?

La démocratie, c’est le choix. Si on a un problème quantitati­f [avec trop peu de candidats, Ndlr], on va aussi avoir un problème qualitatif. Le danger serait qu’il n’y ait plus de vocation. On voit que dans certaines communes, on a du mal à boucler les listes, y compris dans les grandes villes. Ça n’existait pas il y a 30 ans.

Comment enrayer le phénomène ?

Il faut renforcer le pouvoir d’agir et qu’on revienne à un régime de responsabi­lité, de liberté, avec des contrôles a posteriori et en finir avec les appels à projets qui obligent à la surpaperas­se administra­tive. Il faut aussi revoir l’indemnité de maire. Personne n’ose en parler, moi je le dis. Vous avez 17 000 maires de communes de moins de 1 500 habitants qui touchent 1 100 euros brut par mois pour travailler sept jours sur sept, engager leur responsabi­lité pénale, manager, se former en permanence en droit, en management, en finance. Je souhaite que chaque maire ait une rémunérati­on de cadre. C’est la possibilit­é de faire des communes nouvelles. Ensuite, il y a quelques communes qui doivent se réorganise­r. Depuis une dizaine d’années, une loi, à l’initiative de L’AMF, permet de créer des communes nouvelles, des communes qui se regroupent. On est ainsi passé de 36 000 communes à 34 955.

Christophe Béchu a évoqué une rencontre entre L’AMF et Élisabeth Borne sur le sujet des démissions d’élus. Qu’en est-il ressorti ?

On se rencontre régulièrem­ent avec Élisabeth Borne qui est une personne de dialogue, respectueu­se et plus concrète que ses deux prédécesse­urs. Il y a des intentions qui sont annoncées et j’espère que ça va venir. Mais pour l’instant il n’en sort rien.

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France