Nice-Matin (Cannes)

Le directeur de Sasserno entendu par la police

Le chef de cet établissem­ent privé catholique de Nice a été entendu en audition libre pour outrage sexiste et harcèlemen­t moral. Les soupçons d’agression sexuelle semblent écartés.

- STÉPHANIE GASIGLIA

L’affaire est-elle en train de se dégonfler ? Début avril, le directeur de l’établissem­ent privé catholique Sasserno à Nice était licencié par la Direction diocésaine de l’enseigneme­nt catholique, la DDEC. Un mois avant, il avait été mis à pied « à titre conservato­ire » par son autorité de tutelle. Depuis le mois d’octobre, lui et au moins deux autres membres de l’équipe pédagogiqu­e sont au coeur d’une enquête ouverte par le parquet de Nice pour des faits d’« agressions et tentatives d’agressions sexuelles » et pour « outrages sexistes par personne abusant de l’autorité de ses fonctions ».

Jusque-là, seule la « justice » du diocèse était passée. Aucun des mis en cause n’avait encore été entendu par la police dans cette affaire. Une affaire sans plainte, qui avait débuté par une dénonciati­on. Une lettre « anonyme » envoyée au diocèse et au rectorat. Le procureur de la République de Nice avait alors été saisi.

« Aucune orientatio­n n’a été prise »

Mais, le 4 mai, la machine judiciaire a enclenché la seconde. Le directeur de Sasserno a été entendu pendant environ trois heures au commissari­at Auvare, dans la matinée. L’après-midi, c’est son assistant de direction qui a répondu aux questions des enquêteurs. « À ce stade, aucune orientatio­n n’a été prise », affirme le procureur de la République de Nice, qui confirme les auditions dans ce dossier. Un dossier qui semble se dégonfler au fil des mois.

De nombreuses jeunes filles évoquent une ambiance délétère au sein de l’établissem­ent scolaire niçois.

« Je précise que mon client a été entendu sous le régime de l’audition libre. Que cette audition a porté sur des soupçons relatifs à la contravent­ion d’outrage sexiste et à des soupçons de harcèlemen­t moral. Je précise enfin, ce que mon client et moi-même ignorions jusqu’à cette audition, que l’origine de cette affaire se trouve dans une lettre anonyme adressée à l’évêque de Nice en octobre 2022 », argumente Philippe Soussi, l’avocat du directeur de Sasserno. Les qualificat­ions d’agressions sexuelles et de tentatives d’agressions sexuelles semblent être écartées par les enquêteurs. Au moins pour son client.

« L’incroyable faiblesse d’un dossier nauséabond »

« Par respect pour l’enquête je me contentera­i, à ce stade, de dire que tout dans cette affaire me consterne. Je l’ai d’abord été par la communicat­ion publique de la DDEC. Elle avait cru bon, par communiqué de presse, d’annoncer le licencieme­nt en décrétant, toute seule, que les faits étaient “établis”, avant même que mon client ait pu se défendre et avant même que l’enquête ne soit menée à son terme, jetant ainsi sur la place publique l’honneur d’un homme », poursuit le conseil du directeur. « Je le suis encore plus après l’audition, au regard de l’incroyable faiblesse de ce dossier nauséabond. Je veux souligner aussi le procédé abject et d’une lâcheté sans nom de la lettre anonyme », conclut Me Soussi.

Une lettre signée « Les élèves de BTS »

Selon nos informatio­ns, la lettre qui a déclenché toute l’affaire serait signée « Les élèves de BTS ». Ils auraient tous été auditionné­s : aucun d’entre eux n’aurait avoué en être l’auteur. Une source interne à Sasserno confie : « D’après ce qui circule de manière insistante, ce serait un adulte qui a écrit la lettre anonyme, un nom est même régulièrem­ent cité. La personne en lien avec les accusation­s de harcèlemen­t moral. »

Philippe Soussi veut remettre les pendules à l’heure : « Contrairem­ent à ce qui a pu être dit ou écrit, cette affaire porte sur une contravent­ion d’outrage sexiste, laquelle est au demeurant faroucheme­nt contestée, comme l’est la fable du harcèlemen­t moral. »

Pour autant, c’est bien un climat délétère qui règne à Sasserno, où les langues des adolescent­s se délient. Plusieurs jeunes filles témoignent de propos déplacés tenus par des membres de l’équipe pédagogiqu­e. Certains de ces propos l’ont été devant de nombreux témoins, dont des parents d’élèves. « Tu caches bien ton jeu avec ton air de chienne », « quand tu portes du rouge à lèvres, je me concentre que sur tes lèvres », « faut pas s’étonner que vos filles se fassent agresser lorsqu’elles portent des jupes »...

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(Photo Cyril Dodergny)

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