Nice-Matin (Cannes)

Agression en boîte à Menton le fêtard arrêté à la barre

À l’issue de sept heures de procès, un commercial niçois a été condamné à 4 ans de prison ferme lundi soir. Il a été reconnu coupable d’agression sexuelle en état d’ivresse.

- CHRISTOPHE PERRIN 1. le prénom a été modifié

Clara(1) et Derrick Mor sont face à face pendant que le président Alain Chemama instruit cette douloureus­e affaire d’agression sexuelle. « Un viol correction­nalisé », précise en aparté Me Stéphanie Marcq-demarchi, avocate de la jeune italienne. Une manière opportunis­te d’éviter l’attente d’un lourd procès d’assises. La propositio­n du procureur de transforme­r un crime en délit a été acceptée par la partie civile même si le suspect n’encourt plus vingt ans de réclusion mais sept ans de prison.

Suspicion de drogues

Les faits remontent à la nuit du 28 octobre 2018 dans une discothèqu­e de l’avenue Carnot à Menton. Un groupe d’amis fête Halloween. Beaucoup, sous l’effet de l’alcool, perdent le contrôle et la mémoire. Au point que plane sur le débat la suspicion de l’usage de drogues à l’insu des protagonis­tes. Vers 2 h du matin, Clara, 24 ans, et Derrick, 36 ans, dansent collés serrés, s’embrassent et se caressent. Une caméra de surveillan­ce filme le couple titubant dans l’escalier en direction des toilettes de l’établissem­ent.

Clara et Derrick y restent une demiheure avant de sortir. La jeune Italienne ne se souvient plus de rien. Sa cousine la découvre sans collant ni culotte, prostrée, devant la discothèqu­e. Elle la transporte en voiture jusqu’au domicile familial. Clara se réveille à 10 h 30, chez sa mère à Vintimille. Elle est nauséeuse et souffrira terribleme­nt pendant trois semaines. Des saignement­s et des fissures lui laissent penser qu’elle a subi un viol. Elle dépose plainte.

Deux plaintes contre le suspect

La même soirée, une autre femme, Maria, accuse aussi Derrick au domicile duquel elle a fini la soirée. Elle se plaint d’un « black-out » qu’elle ne s’explique pas. Elle a été filmée à son insu par Derrick lors de leurs ébats. Une pièce à conviction

qui finalement se révélera en faveur du suspect.

À l’issue de l’enquête, Derrick Mor, commercial, inconnu de la justice, bénéficie d’un non-lieu pour les faits que lui reproche Maria. En revanche, il est accusé d’agression sexuelle en état d’ivresse à l’encontre de Clara. Il encourt 7 ans de prison. Il a été détenu pendant plus d’un an avant d’être remis en liberté sous contrôle judiciaire. L’élégant prévenu, athlétique, tout de beige vêtu, se défend avec calme. « Admettez-vous des relations

sexuelles cette nuit-là ? », questionne le président Chemama. « Oui, totalement », répond Derrick Mor.

« Poupée de chiffon »

La procureure Delphine Dumas estime que l’état de conscience de Clara, comparée à « une poupée de chiffon », était tellement oblitéré, qu’elle ne pouvait donner son consenteme­nt. « La honte doit changer de camp », tempête la procureure. Quand j’entends Monsieur dire “Je ne lui en veux pas”, cela me choque »

La magistrate requiert 5 ans de prison et 5 ans de suivi sociojudic­iaire. Me Audrey Vazzana, en défense, démonte point par point les charges qui pèsent sur Derrick Mor. Son travail méthodique s’appuie d’abord sur la personnali­té de son client : « Pour les experts sérieux, Derrick n’est pas un prédateur sexuel dans le déni. C’est un travailleu­r qui n’a jamais fait parler de lui ni avant, ni après cette affaire. » La pénaliste reprend ensuite une phrase de Clara : «Ila peut-être pu penser que j’étais d’accord. » « Et forcément, Monsieur, qui lui aussi avait bu, n’a pas la perception d’un homme à jeun. »

Le tribunal a écouté avec attention les arguments de la défense mais a surtout retenu les images de vidéosurve­illance où l’on voit Clara, manifestem­ent vulnérable. Derrick Mor retourne en prison, condamné à 4 ans d’emprisonne­ment. Il a été arrêté à la barre du tribunal.

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(Photo d’illustrati­on F. M.) Clara accuse Derrick d’avoir profité de sa vulnérabil­ité pour la violer.

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