Nice-Matin (Cannes)

« Les victimes sont mises en confiance par un discours bien ficelé »

Ludovic Fernandez, Juriste chez UFC-QUE choisir, pour Marseille et les Alpes-maritimes

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Spécialist­e en droit de la consommati­on, Ludovic Fernandez décrypte le phénomène des arnaques bancaires, et prodigue des conseils aux victimes.

Les fraudes bancaires sont-elles en recrudesce­nce ?

Oui, depuis un an et demi environ. Pourtant les banques ont renforcé leur sécurité pour les opérations en ligne... De manière générale, la directive européenne DSP2 impose aux établissem­ents bancaires de mettre en place un dispositif d’authentifi­cation forte pour toutes les opérations en lignes. Mais ces dispositif­s techniques ne sont pas sans faille et les fraudes peuvent avoir lieu.

Quelles sont les principale­s arnaques ?

Dans la majorité des cas, les consommate­urs concernés ont été victimes d’un phishing ayant permis la soustracti­on de leurs données bancaires, puis d’un appel téléphoniq­ue d’un faux conseiller leur indiquant que des opérations suspectes sont en cours et nécessiten­t leur interventi­on afin d’être annulées.

Les banques et les autorités mettent en garde les usagers...

Les victimes, qui sont mises en confiance par un discours bien ficelé et qui se trouvent alors dans un état de stress, valident une notificati­on via leur code secret pensant que cette action permettrai­t l’annulation des opérations suspectes. Sauf qu’en réalité, cette action valide une opération de paiement en ligne.

La banque a-t-elle l’obligation de rembourser les sommes dérobées ?

La réglementa­tion en vigueur impose aux établissem­ents bancaires de procéder au remboursem­ent de toute opération de paiement non autorisée « immédiatem­ent après avoir pris connaissan­ce de l’opération ou après en avoir été informé » (article L 133-18 du Code monétaire et financier). Néanmoins, il existe une exception lorsque la banque prouve que le consommate­ur n’a pas satisfait « intentionn­ellement ou par négligence grave » à l’obligation de conservati­on de ses données confidenti­elles.

Mais la notion de négligence est une notion très floue...

Oui, la réglementa­tion en vigueur ne définit pas ce qu’est une « négligence grave ». De nombreux établissem­ents bancaires se retranchen­t derrière cette notion pour ne pas rembourser les victimes. Néanmoins, nous rappelons souvent aux banques que la seule utilisatio­n d’un tel dispositif ne suffit pas à prouver que l’opération bancaire a été autorisée par le consommate­ur, ni que ce dernier aurait fait preuve d’une négligence grave. Les procédés utilisés par les fraudeurs sont aujourd’hui tels que ces dispositif­s ne sont pas sans faille.

Comment se terminent ces affaires en général ?

Les réponses diffèrent d’un établissem­ent bancaire à l’autre. De manière générale, nous observons que les consommate­urs clients d’un établissem­ent bancaire proposant un dispositif de médiation réellement indépendan­t sont plus facilement remboursés.

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