Nice-Matin (Cannes)

Un faux policier accusé de viols en série

Un homme de 36 ans comparaît aux assises pour cinq viols à Cannes et alentour. Il est accusé de s’être présenté comme policier et d’avoir menacé des prostituée­s pour obtenir des faveurs gratuites.

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr 1. Les prénoms ont été modifiés.

Dans la boîte à gants de sa BMW, un gyrophare, une paire de menottes et, parfois, une arme de poing. Mourad Jeridi, 36 ans, se présente comme un policier à Anastasia (1), une prostituée de 18 ans, qu’il a contactée sur un site d’escort-girls le 11 mai 2019. L’individu menace de la poursuivre pour un prétendu délit, agite une amende de 50 000 , invoque « une récente loi » qui pénalisera­it la prostituti­on. Il peut, en revanche se montrer indulgent si elle accepte une relation sexuelle gratuite. Étudiante fragile, qui vend son corps de manière occasionne­lle, Anastasia panique et accepte « l’arrangemen­t » sur la banquette arrière. L’inconnu, après un rapport sans protection, exige que l’escort-girl efface leurs échanges sur son téléphone puis s’enfuit au volant de son 4x4.

La jeune femme appelle aussitôt le commissari­at pour dénoncer un viol. La brigade criminelle exhume alors deux anciennes plaintes classées, dans lesquelles deux victimes décrivent un mode opératoire identique. Au total, ce sont cinq plaintes qui seront regroupées par la juge d’instructio­n.

« Je suis un escroc »

Au premier jour du procès devant la cour d’assises des Alpes-maritimes, une seule victime prend place à côté de Me Sophie Jonquet sur le banc de la partie civile. L’angoisse de Marine est palpable. Sa plainte en 2015 n’avait pas eu de suite. En face d’elle, dans le box vitré des accusés, Mourad Jeridi répond avec assurance à la première question de Catherine Bonnici, la présidente : « Je conteste formelleme­nt les viols. J’ai bien eu des relations sexuelles consenties. Je ne les ai pas payées, je suis un escroc, je n’avais pas d’argent à ce moment-là. »

Quant à Marine, l’accusé parle « d’une relation extraconju­gale ». « On est fâché, depuis, avec son mari », précise-t-il. L’enquêtrice de

personnali­té entendue hier matin décrit un homme issu d’une famille tunisienne aimante, installée nd au Cannet depuis les années 80. L’accusé admet avoir été un enfant « pourri gâté » par sa mère. Son parcours scolaire est chaotique tandis que son casier judiciaire s’est rempli au gré de délits variés : vol, refus d’obtempérer, extorsion, aide à l’entrée d’étranger en situation irrégulièr­e… Douze mentions au total.

Prise au piège

Entre deux condamnati­ons, il dit avoir enchaîné différents métiers : gérant d’un cybercafé familial, poseur de parquet… tout en souhaitant devenir livreur quelques jours avant son arrestatio­n à Gênes, alors qu’il s’apprêtait à embarquer pour Tunis. La présidente note pour résumer « une certaine instabilit­é profession­nelle et sentimenta­le, une surprotect­ion maternelle ». L’expertise psychiatre évoque «un opportunis­te plutôt qu’un pervers ». Il faut attendre la fin de journée et la déposition de Lise pour comprendre l’angoisse vécue dans le huis clos de la BMW par une jeune femme, alors élève infirmière, véritablem­ent prise au piège. « Il m’a menacée d’une amende, d’une garde à vue. Il m’a dit que tout le monde allait savoir, que j’aurais un casier judiciaire. »

Lise, en pleurs, panique, d’autant qu’il photograph­ie l’immatricul­ation de sa voiture. « Il m’a dit : “Ce sera gratuit, sinon tu connais les conséquenc­es.” » Deux ans plus tard, un appel à témoins diffusé dans Nice-matin l’a convaincue de déposer plainte : « J’étais jusquelà dans le déni. Je me disais que c’était un chantage, alors que c’était un viol. J’ai compris que je n’étais pas la seule. »

Mourad Jeridi, défendu par Me Marie Seguin et Me Yassine Maharsi, garde sa ligne de défense, impassible devant le bouleversa­nt témoignage de Lise : « Je regrette de ne pas l’avoir payée, mais je ne me suis jamais fait passer pour un policier. »

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(Ph. Ch. P.) Une seule plaignante, soutenue par Me Sophie Jonquet, a pris place sur le banc des parties civiles, mais l’accusation a retenu cinq victimes.

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