Nice-Matin (Cannes)

Eco-mer : les passeurs de dons de la mer à la terre

À la manoeuvre hier sur le port Vauban à Antibes et au port Canto à Cannes avec les Yachts du coeur, c’est tout au long de l’année, de Marseille à Menton, que ces douze bénévoles se mobilisent.

- JULIE BAUDIN jbaudin@nicematin.fr

Depuis près de 15 ans, avec leurs collectes de denrées et d’objets quasi quotidienn­es sur de grands yachts, les bénévoles de l’associatio­n Eco-mer sont les relais d’une formidable chaîne de solidarité qu’ils ont créée entre la mer et la terre au service d’une écologie maritime durable. Et humaine.

Des femmes et des hommes acharnés et dévoués – qui ont organisé hier les Yachts du coeur sur le port Vauban à Antibes et au port Canto à Cannes – qui récupèrent tout au long de l’année des denrées et des objets en tout genre sur les yachts dans différents ports de Méditerran­ée, de Marseille à Menton, au profit d’associatio­ns caritative­s, notamment la Croix-rouge.

Solidarité marine

Cette idée, elle ne pouvait germer que dans la tête d’un homme de mer. C’est Jean-luc Annone, le président et créateur d’eco-mer. Fils de pêcheur cannois, puis marin embarqué sur des yachts et enfin broker de bateaux, puis retraité aujourd’hui, il baigne depuis toujours dans le milieu marin et s’est imprégné de cet esprit de solidarité ancrée chez les gens de mer.

« C’est la règle. Sur les flots, un marin sait qu’il ne peut se sauver seul mais seulement ensemble avec ses coéquipier­s. L’idée de l’associatio­n est partie de là. Montrer que la solidarité des gens de mer peut aussi concerner les gens de terre. »

Jean-luc et ses bénévoles ont donc pris leur bâton de pèlerin et ont fait appel à leur réseau dans les différents ports de plaisance de la Méditerran­ée pour proposer aux équipages de participer à leur chaîne solidaire.

Denrées et objets destinés à être jetés

« À chaque fin de saison, les yachts sont désarmés. C’est-à-dire que les équipages enlèvent tout ce qui peut s’y dégrader durant l’hiver. Du linge, des vêtements, des denrées non périssable­s, des outils, des matériaux de constructi­on, de la déco, des produits de première nécessité… En fait, tout ce que les équipages de ces unités opulentes veulent bien nous donner. Ce sont

des denrées et des objets qui sont destinés bien souvent à finir à la poubelle. Nous les récupérons pour qu’ils soient redistribu­és aux population­s qui en ont le plus besoin via des associatio­ns. Aujourd’hui, nous avons développé des points de collecte sur les principaux ports de plaisance de Marseille à Menton. Nous intervenon­s aussi sur Monaco et dans quelques ports italiens.

Au total, nous sommes en lien avec 150 superyacht­s et leurs équipages – je n’ai jamais vu un seul propriétai­re ! – et nous collectons deux à trois fois par an sur chacun d’eux. Et il est clair que le port Vauban et son quai des Milliardai­res, c’est un

terrain privilégié de notre action. » L’associatio­n est aussi sur le pont quand les propriétai­res de ces palaces flottants décident, et cela leur arrive souvent, de changer l’intérieur de leur bateau ou la tenue de leur équipage.

Démarche écologique

« Il n’y a pas que l’aspect humanitair­e, ajoute Jean-luc Annone. Les équipages sont de plus en plus conscients qu’il faut éviter de gaspiller. Et bien souvent, ils ne veulent pas jeter mais ils ne savent pas quoi faire de tout ce qu’ils récupèrent sur un yacht désarmé. La démarche est donc aussi écologique. De toute façon, pour nous, il n’y a pas de

protection de l’environnem­ent sans humanisme. Nous sommes en fait des passeurs de dons. »

À plusieurs reprises, des actions spéciales ont aussi été menées par Eco-mer : « Des yachts qui repartaien­t, à vide, vers d’autres horizons ont été chargés de produits pour les population­s touchées par des typhons et des tempêtes.

Cela nous est arrivé cinq fois aux Philippine­s et dans les Caraïbes. C’est beaucoup de boulot et une sacrée logistique car il faut être présent pour collecter les dons et pour les débarquer une fois à destinatio­n. »

Sur le pourtour méditerran­éen, le process d’eco-mer est aujourd’hui

bien ficelé. Et le succès grandissan­t. « En 2018, le fruit de toutes nos collectes a dépassé les 20 tonnes. Aujourd’hui, nous sommes certaineme­nt au double. »

À noter enfin que l’associatio­n fonctionne sans aucuns dons numéraires, ni subvention­s. « Depuis trois ans, nous sommes une associatio­n sans banque et nous assumons nous-mêmes toutes nos charges et nos frais pour faire fonctionne­r l’associatio­n et sa raison d’être. »

Une vraie histoire de passionnés au service de la solidarité et de l’environnem­ent.

 ?? (Photo Patrice Lapoirie) ?? Les membres d’eco-mer ne sont jamais les douze ensemble tant leur action est quotidienn­e et de taille. Hier quelques-uns d’entre eux étaient sur le port Vauban à Antibes aux côtés des membres de la Croix-rouge, tandis que le reste de l’équipage s’affairait dans d’autres ports méditerran­éens.
(Photo Patrice Lapoirie) Les membres d’eco-mer ne sont jamais les douze ensemble tant leur action est quotidienn­e et de taille. Hier quelques-uns d’entre eux étaient sur le port Vauban à Antibes aux côtés des membres de la Croix-rouge, tandis que le reste de l’équipage s’affairait dans d’autres ports méditerran­éens.

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