La colonisation en Algérie SUR LES PLANCHES À TOULON

Adaptée du livre de Mathieu Belezi, la pièce « Un faux pas dans la vie d’emma Picard » raconte le parcours d’une paysanne en Algérie durant la colonisation. Coup de poing.

Tout est parti d’une rencontre. Celle de la troupe Okeanos et de l’auteur Mathieu Belezi, récemment récompensé du prix littéraire Le Monde et du Prix du livre Inter pour son dernier roman « Attaquer la Terre et le Soleil ». « Avec Mathieu, nous nous sommes connus dans un contexte privé. Nous nous sommes liés d’amitié, puis il nous a proposé d’adapter ce texte », précise Emmanuel Hérault. Metteur en scène, il a donc mis sur les planches « Un faux pas dans la vie d’emma Picard », joué ce vendredi à l’espace Comédia à Toulon.

« C’est un récit à la première personne. Emma Picard, le personnage principal, est une paysanne, veuve et mère de quatre enfants qui, dans les années 1860, pour échapper à la misère en France, accepte de partir en Algérie cultiver la terre que lui octroie le gouvernement français. Le thème de fond reste la colonisation de peuplement, mais cela évoque également les victimes collatérales de cette période, qu’elles soient algériennes ou françaises. C’est aussi l’histoire d’une désillusion pour cette femme à qui on avait vendu un eldorado », poursuit-il.

« Presque lyrique »

Mais attention, tout n’est pas noir. « Les rapports humains sont très importants dans le texte. Que ce soit avec les enfants d’emma ou les gens qu’elle peut rencontrer sur place. C’est d’une très grande pureté », confie Marie Moriette, qui interprète Emma. « La grande richesse du texte reste son humanité et sa richesse poétique. C’est presque lyrique », abonde le metteur en scène.

La troupe d’okeanos a pris le parti de coller au texte original de Mathieu Belezi. S’ils ont procédé à des coupes pour faire, des 288 pages du livre, une pièce de théâtre, rien n’a été changé. La mise en scène s’impose comme minimaliste, avec juste des changements de lumière pour marquer la temporalité. De sorte que tout repose finalement sur l’interprétation de Marie Moriette. Seule en scène.

Seule en scène avec un texte fort

« Je ne suis pas une paysanne, je suis une citadine. Il a donc fallu trouver des correspondances, mais aussi apporter un travail sur le corps et les émotions. On a travaillé sur cet aspect-là pour être crédible. Comme chez Racine, par exemple, le texte est tellement beau qu’on peut se laisser avoir par sa musique et aller là-dedans, alors que le but est d’être avant tout dans l’émotion du personnage », précise-t-elle. Alors, cette femme déracinée, chahutée par les épreuves de la vie, s’effondre, s’assoit et raconte les quatre dernières années de sa vie à son fils alité. « Elle répète plusieurs fois, dans le texte : “Il faut que je raconte dans quel enfer on nous a jetés, abandonnés à notre sort de crève-la-faim sur des terres qui ne veulent et ne voudront jamais de nous” », argumente Emmanuel Hérault.

Cette pièce a été créée et jouée pour la première fois au Festival d’avignon l’été dernier. La date toulonnaise est une des premières de la tournée, avant un retour dans la cité des papes en juillet prochain. > « Un faux pas dans la vie d’emma Picard ». Adaptation pour la scène : Emmanuel Hérault et Marie Moriette. Mise en scène et scénographie : Emmanuel Hérault. Interprétation : Marie Moriette. À l’espace Comédia à Toulon, vendredi 9 février à 20 h 45. Tarifs : 20,70 euros, adhérent 15,70 euros, enfant (jusqu’à 16 ans) 9,60 euros. Rens. et rés. 04.94.42.71.01 ou espacecomedia.com