Nice-Matin (Cannes)

Qui était le baron Haussmann, préfet de Draguignan

Célèbre pour avoir créé les grands boulevards ainsi que les Champs-elysées à Paris, Georges Eugène Haussmann (18091891) a réglé les problèmes d’adduction d’eau et d’irrigation de Draguignan et sa campagne environnan­te.

- ANDRÉ PEYREGNE magazine@nicematin.fr

C’est le 11 mai 1850 que le baron Haussmann quitta son poste de préfet du Var à Draguignan. Il n’était pas connu à l’époque mais allait devenir célèbre par la suite en devenant préfet de Paris et en créant, dans la capitale, les grands boulevards ainsi que les Champs-élysées. À Draguignan, il s’était contenté de régler les problèmes d’adduction d’eau et d’irrigation dans la ville et dans la campagne environnan­te. C’était déjà ça ! Draguignan a donné son nom à un grand parc. Les promeneurs y vont et les enfants y jouent en ignorant qui il était.

La présence varoise de Georges Eugène Haussmann a duré guère plus d’un an. C’est le 24 janvier 1849 qu’il prend ses fonctions de préfet du Var. Est-il besoin de rappeler que c’est Draguignan – et point Toulon – qui est, à l’époque, le siège de la préfecture ? Dans la période agitée qui a suivi, en 1848, la fin de la monarchie de

Juillet et l’instaurati­on de la IIE République (sous la présidence de Louis-napoléon Bonaparte), Haussmann n’est pas là pour assurer des travaux structurel­s mais pour remettre de l’ordre.

Politique conservatr­ice

Il a quarante ans et trouve, à son arrivée, une préfecture flambant neuve. Il s’étonne que le télégraphe s’arrête à Toulon, que le courrier mette huit jours pour aller de Paris à Draguignan et que les forces de polices soient concentrée­s à Marseille et Toulon. Il estime que

« Draguignan est un village proclamé ville par la loi, peuplé de grossiers cultivateu­rs ! ».

En fait, Haussmann voit déjà en Toulon la future préfecture du Var. Il prépare la venue, en 1852, du président de la République Louisnapol­éon Bonaparte qui lancera les travaux d’agrandisse­ment de Toulon. Cette ville compte 70 000 habitants tandis que Draguignan,

9 000.

Ayant l’intention de mener une politique conservatr­ice, il mène la vie dure aux « clubs démocrates », lesquels regroupent jusqu’à 28 000 membres dans le départemen­t. Les choses se passent mal. Les 13 et 14 juin 1849, les « démocrates » s’opposent à lui et tentent d’envahir la préfecture. Les meneurs sont arrêtés et envoyés sur l’île Sainte-marguerite, au large de Cannes. Le 30 juin, il fait fermer les « clubs démocrates » mais les réunions publiques et manifestat­ions continuent. Il fait arrêter deux militants à Cogolin, l’avocat Matthieu et le pharmacien Pons, ce qui suscite une manifestat­ion d’ouvriers à La Garde-freinet. Il pousse à l’exil à Nice (qui n’est pas française à l’époque) l’avocat Honoré Pastoret, chef des démocrates de Draguignan – lequel reviendra se faire élire député en 1870. Le climat est à l’orage. Le préfet Haussmann diffuse

nd ses idées au travers du journal « Le Conciliate­ur ».

Lors d’une réunion qui a lieu à Vidauban le 30 mars 1850, l’avocat varois Émile Ollivier s’écrie : « Vous verrez que les riches finiront par nous manger tout crus ! »

Cela ne plaît pas à Haussmann qui le fait arrêter et juger. Émile Ollivier est acquitté... mais préfère émigrer à Marseille. En partant, il lance au préfet Haussmann : «Je pars, mais un jour, nous nous reverrons. C’est moi qui vous aurai ! »

Il ne croyait pas si bien dire.

L’intention de rénover la France

En 1870, le baron Haussmann a quitté le Var et a réalisé, en une vingtaine d’années, son grande rénovation de Paris, détruisant 180 000 maisons et donnant naissance aux grands boulevards, aux Champs-élysées, à la place de

l’étoile, aux grandes gares parisie nnes, aux bois de Vincennes et de Boulogne. Il postule alors au gouverneme­nt dans l’intention de rénover la France.

C’est alors qu’il retrouve sur son chemin un ennemi qu’il n’attendait plus. Louis-napoléon Bonaparte, devenu empereur sous le nom de Napoléon III, a en effet nommé comme chef de cabinet et ministre de la Justice un député du Var qui n’est autre qu’émile Ollivier ! N’oubliant pas les humiliatio­ns qu’il avait subies à Draguignan, celui-ci refuse non seulement à Haussmann de devenir ministre mais le destitue en plus de ses fonctions de préfet. La vengeance est un plat qui se mange froid...

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(DR) La présence varoise de Georges Eugène Haussmann a duré guère plus d’un an, du 24 janvier 1849 au 11 mai 1850.

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