L’architecte sonore d’audiard C’EST LUI
Pierre-marie Dru est le superviseur sonore d’« Emilia Perez », film où la bande-son occupe une grande place, mais aussi du « Comte de Montecristo » (hors compétition).
Le temps a fait son oeuvre. Entre le lancement de sa société, Pigalle Production, en 2004, et l’accélération de sa carrière grâce à « J’ai perdu mon corps », un film d’animation sélectionné aux Oscars et lauréat du César de la meilleure musique de film, il s’est écoulé seize ans. Depuis, l’agenda de Pierre-marie Dru est très garni. En 2021, il était dans l’équipe d’« Annette », le long-métrage de Leos Carax choisit pour l’ouverture du Festival de Cannes. La même année, il était également au générique des « Olympiades » de Jacques Audiard.
C’est avec ce même réalisateur qu’il a débarqué en compétition officielle cette année, avec le bluffant « Emilia Perez », un Ovni en langue espagnole, entre le film noir chez des narcotrafiquants mexicains, le mélodrame et la comédie musicale où pop, rap et airs folkloriques forment une texture sonore unique.
Un rôle très large
L’intitulé du poste de Pierre-marie Dru ? Superviseur musical. Une sorte d’architecte (c’est d’ailleurs dans ce domaine qu’il a fait ses études) de la bande-son d’un film, devant assurer le casting des compositeurs, en étroite collaboration avec les cinéastes, la direction artistique, la production exécutive de musiques originales, mais aussi l’achat des droits de chansons déjà existantes et d’autres aspects juridiques. « Avec Jacques Audiard, on parle d’un maestro, de quelqu’un qui a énormément d’intuitions, qui les teste et demande des avis à son équipe, explique le boss de Pigalle Production. Mon travail, c’est de le conforter dans ses intuitions. »
L’amour et la violence
Le choix des compositeurs s’est rapidement fait. Audiard avait sollicité Clément Ducol (avec lequel Pierremarie Dru avait déjà travaillé sur « Annette ») et sa compagne, la chanteuse et actrice Camille. Des démarches initiées il y a quatre ans, en plein Covid, alors que le tournage des « Olympiades » était en pause. « Clément, Camille, Jacques et Thomas Bidegain, son co-scénariste, se sont enfermés six semaines, comme s’ils préparaient un album. On s’est posé 3 000 questions, je leur demandais de quel matériel ils disposaient, etc. Quand il fallait trancher, c’était toujours l’émotion qui primait. Il fallait suivre un fil autour de la violence de la mort, pour basculer ensuite vers une image de fleur magique, qui allait s’ouvrir, quand le film se met à parler d’amour. »
Des défis à la pelle
Un temps, l’équipe a couché ses idées dans un podcast interne. Un outil de travail précieux, « avec une narratrice qui lisait l’histoire et des chansons au milieu, qui ne sont pas toutes restées au final. Cela nous a pris trois mois », explique Pierre-marie Dru. Embaucher des chanteurs mexicains, réunir un orchestre symphonique, créer un morceau à partir des mots crachotés dans une enceinte posée sur une voiture par un marchand ambulant de Mexico, gérer les play-back préenregistrés par Zoe Saldaña, Selena Gomez et Karla Sofía Gascón, actrice transgenre qui a travaillé d’arrache-pied
nd avec un coach vocal... Les chantiers auront été divers et variés.
Astérix, Cyrano, Pagnol...
Alors que « Le Comte de Montecristo », sur lequel il a oeuvré avec Jérôme Rebotier, « un compositeur de grand talent, très romantique » , est également présenté à Cannes, hors compétition, Pierre-marie Dru est embarqué dans trois gros projets d’animation : « Astérix et le combat des chefs », d’alain Chabat et Fabrice Joubert, le « Cyrano » de Guillaume Gallienne, ainsi que « Marcel et Monsieur Pagnol », de Sylvain Chomet. Sans oublier deux longs-métrages biographiques autour de De Gaulle réalisés par Antonin Baudry.