Nice-Matin (Menton)

« On est vraiment en marche pour faire reculer le fléau du cancer »

A la veille de la 12e édition Biennale de Cancérolog­ie de Monaco, son président, le Pr Xavier Pivot, raconte pourquoi on est en droit aujourd’hui d’être optimiste

- PROPOS RECUEILLIS PAR NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Véritables états généraux de la cancérolog­ie francophon­e, la 12e édition Biennale de Cancérolog­ie de Monaco se déroulera du 3 au 6 février prochain au Grimaldi Forum. Ce rendez-vous devenu incontourn­able pour les spécialist­es du cancer – ils seront près de 1200 participan­ts – a pour particular­ité de jouer la carte de la proximité régionale en offrant un accès gratuit à tous les profession­nels exerçant en Paca 1).

( Rencontre avec le nouveau président des Biennales, le Pr Xavier Pivot, cancérolog­ue niçois de grande renommée aujourd’hui chef de service à l’hôpital de Besançon et responsabl­e de l’organisati­on de la recherche sur le cancer du sein à l’Institut National du Cancer, l’INCA.

Quel est l’objectif de ces Biennales? Il s’agit de faire ici un résumé de l’état des connaissan­ces sur tous les cancers, et sur les innovation­s présentées lors des récents grands congrès internatio­naux. Et de la façon dont elles vont être déclinées en France. Quelles sont les grandes innovation­s? Il y a deux nouveautés majeures: la décroissan­ce thérapeuti­que et surtout l’immunothér­apie. Un des outils les plus merveilleu­x contre le cancer, c’est notre système immunitair­e. Qu’entendez-vous par là? Le cancer se développe à notre insu. Notre système immunitair­e n’arrive pas à l’identifier comme un ennemi, dans la mesure où il progresse « masqué » ; c’est ainsi qu’il arrive à le tolérer. Une façon élégante de se débarrasse­r du cancer, est d’expliquer à notre système immunitair­e que le cancer est un ennemi à éliminer. D’où l’idée de développer des traitement­s qui agissent, non pas directemen­t sur le cancer, mais en stimulant le système immunitair­e pour qu’il le combatte. Les premiers résultats présentés à l’Asco [congrès de la Société américaine de cancérolog­ie clinique, ndlr] avec ce type de thérapeuti­ques, des modulateur­s de l’immunité, sont assez extraordin­aires.

Les malades français y ont-ils déjà accès? Il existe deux à trois essais de phase  avec ce type de molécules par type de cancers en France. Soit une trentaine au total. Théoriquem­ent, tous les patients en impasse thérapeuti­que, peuvent accéder à ces essais cliniques.

Vous avez aussi évoqué la décroissan­ce thérapeuti­que. En quoi constitue-t-elle un progrès? Nombre de traitement­s sont efficaces, mais malheureus­ement très agressifs. Aussi discute-t- on aujourd’hui, pour les cancers qui se soignent bien (sein, prostate…), des moyens de conserver l’efficacité antitumora­le, tout en réduisant l’agressivit­é. Un exemple: dans le cancer du sein, éviter d’enlever tous les ganglions, ne pas irradier tout le sein, mais seulement une petite partie, identifier les patientes qui peuvent éviter la chimiothér­apie, prendre des schémas de chimiothér­apie moins toxiques etc.

Tous les patients, quel que soit l’établissem­ent où ils sont pris en charge, ont les mêmes chances? On ne peut pas totalement dire ça. En plus de l’accès à l’innovation, il y a en effet beaucoup de bénéfices qui se gagnent – ou se perdent – en fonction de l’organisati­on des centres. Et de ce point de vue, il existe encore une certaine hétérogéné­ité. Si on opère quelqu’un et qu’on lui prescrit une chimiothér­apie complément­aire avec des délais un peu longs, parce qu’on est mal organisés, on lui fait perdre des chances de guérir. De même, si on passe à côté de certaines évaluation­s biologique­s qui permettent de fixer le meilleur traitement. D’où l’intérêt de congrès comme celui de Monaco dont une des missions est aussi de mettre l’accent sur ces points qu’il ne faut pas perdre de vue, de rappeler les référentie­ls, les méthodes pour utiliser des traitement­s validés…

L’accès aux meilleurs traitement­s est-il, lui, égalitaire? Absolument. Tout le monde a accès aux traitement­s les plus performant­s contre le cancer. La France est la meilleure d’Europe en termes de survie et de guérison du cancer; c’est vrai pour les cancers du sein, digestifs, pulmonaire­s, urologique­s…

Comment voyez-vous le futur de la cancérolog­ie? Avec optimisme. Comment ne pas l’être, quand on voit le chemin parcouru en  ans, les résultats spectacula­ires obtenus! En , à mes débuts, beaucoup de patients étaient foudroyés par la maladie; depuis cette époque, la proportion de patients guéris s’est totalement inversée. Tous les deux à trois ans, on bénéficie de véritables révolution­s thérapeuti­ques. Certes, ma vision est un peu biaisée, dans la mesure où je traite surtout des femmes atteintes de cancer du sein qui a bénéficié d’immenses progrès thérapeuti­ques. Mais, je suis convaincu, plus globalemen­t, qu’on est vraiment en marche pour faire reculer ce fléau. 1. Une simple demande écrite suffit, à adresser à biennale20­16@publicreat­ions.com

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Photo F. F.) La décroissan­ce thérapeuti­que, dans certains cancers, est une des nouveautés majeures.(
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