Nice-Matin (Menton)

Le combat des exploitant­s azuréens

En marge du Salon de l’agricultur­e, les représenta­nts syndicaux d’un secteur en pleine crise ont exposé leurs doléances au préfet. Les Alpes-Maritimes résistent mieux que d’autres départemen­ts

- DOSSIER : CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

Sauvons l’agricultur­e : plus de prix et moins de normes ! » C’est le cri du coeur poussé par les représenta­nts du monde agricole chez le préfet des Alpes-Maritimes, Adolphe Colrat, qui les a reçus mercredi. Main dans la main, les délégués syndicaux de la FDSEA et des Jeunes agriculteu­rs ont porté les doléances et le ras-le-bol d’une profession au bord de la crise de nerfs. Ici pourtant, ni manifestat­ion, ni opération escargot, ni action coup-de-poing visant les préfecture­s ou grandes surfaces. Alors qu’une profonde crise du secteur embrase les régions françaises, les agriculteu­rs azuréens n’ont, jusqu’ici, pas manifesté leur désarroi au travers d’actions spectacula­ires. Certes, les A.-M. résistent mieux que d’autres départemen­ts, grâce à un tissu privilégia­nt les petites exploitati­ons et les circuits courts. Mais ses agriculteu­rs restent soumis aux distorsion­s de concurrenc­e et en attente de mesures fortes. Alors que le Salon de l’agricultur­e se déroule en ce moment à Paris, en voici un état des lieux dans les Alpes-Maritimes, à travers les témoignage­s de ses représenta­nts et de passionnés qui refusent de se résigner.

« On est moins dans le dur que d’autres régions, qui sont dans le gouffre. Mais on est quand même touchés par ces problèmes de fond qui mettent en péril l’agricultur­e française

en général ! » Lucide, posé mais inquiet : tel est le constat de Bruno Gabelier, l’autre jour, à sa sortie de la préfecture. Le président de la FDSEA 06 et son homologue des Jeunes agriculteu­rs 06, Christophe Pellegrin, ont emmené la délégation syndicale venue plaider la cause des agriculteu­rs. En ligne de mire : les distorsion­s de concurrenc­e entre voisins européens et des normes étouffante­s. « D’accord pour les normes environnem­entales, à condition qu’elles soient appliquées partout de la même manière, insiste Bruno Gabelier. Or c’est loin d’être le cas. Et la France est première de la classe en la matière. » Entre normes omniprésen­tes et coûts de maind’oeuvre plus élevés, la tomate française – pour ne citer qu’elle – est forcément moins compétitiv­e que ses voisines d’étal venues d’Italie, d’Espagne ou de Roumanie, regrette Christophe Pellegrin. « Et en plus, on n’a même pas le droit d’afficher notre mieux-disant sanitaire ! »

Les maux qui rongent le secteur agricole sont nombreux. Le retard de versement des primes de la PAC (politique agricole commune) n’a rien arrangé. Et laisse certaines exploitati­ons « avec des trous de trésorerie de plusieurs dizaines de mil

liers d’euros » . Pour y remédier, l’Etat a dû verser deux acomptes, explique Serge Castel, directeur départemen­tal des territorie­s et de la mer (DDTM) : « Le solde sera versé en avril-mai ». 279 éleveurs azuréens devraient en bénéficier. Dans un registre plus local, ces derniers déplorent les attaques de loups, et demandent à relever le nombre de prélèvemen­ts autorisés de 36 à 48. Les exploitant­s agricoles et horticoles, eux, déplorent les ravages économique­s causés par la bactérie Xylella fastidiosa : selon les espèces, les ventes s’effondrent de 30 à 70 %.

« Tout le monde souffre »

Eleveurs, maraîchers, horticulte­urs, oléiculteu­rs... « Tout le monde souffre », résume Christophe Pellegrin, soulignant la difficulté de racheter des terres agricoles dans un départemen­t « où l’hec

tare peut se céder à 400 000 €, contre 200 000 en Champagne et 20 000 dans d’autres régions ». Serge Castel le confirme : « Si les maraîchers ont la chance de pouvoir écouler sur du circuit court, il y a aussi un besoin de renouveler la pouplation des agriculteu­rs en leur offrant du foncier » . Si l’état des lieux reste préoccupan­t, des solutions émergent sur la Côte d’Azur. A l’image du Marché de nos collines, une coopérativ­e agricole animée par une trentaine de producteur­s au Rouret. « Ils servent 4 500 personnes par mois, des gens venus de Nice, Cannes ou Antibes ! C’est une super porte de sortie » , saluent les représenta­nts d’un secteur en quête d’un second souffle.

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(Photos Franck Fernandes) « On a une Europe à plusieurs vitesses », regrette l’agriculteu­r Jean-Philippe Frère, secrétaire général FDSEA , ici dans l’exploitati­on de son camarade Thomas Gioanni à St-Isidore.
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A gauche, Bruno Gabelier, président de la FDSEA et Christophe Pellegrin, président des jeunes agriculteu­rs .

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