Nice-Matin (Menton)

Téo Andant, enjambées

À 21 ans, le sprinteur mentonnais vient de remporter son cinquième titre national. Il représente­ra peut-être la cité du citron aux Jeux Olympiques de Tokyo en 2021...

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Pendant longtemps, Téo Andant a semblé lutter contre son destin. Preuve que le talent vous rattrape toujours, il vient de remporter son cinquième titre national - celui de champion de France Espoirs du 400 m en salle, le 20 février dernier à Miramas. Les signes étaient pourtant bien là. Plus jeune, déjà, lorsqu’il jouait au football sous les couleurs de Roquebrune-Cap-Martin, c’était lui « le mec le plus rapide de l’équipe », se plaît-il à raconter. C’est à Menton qu’il enchaîne ses premiers succès en athlétisme. Depuis l’esplanade des Sablettes où il nous a donné rendez-vous, il nous désigne au loin le parc du Pian, « où se déroulait le cross du collège Vento » ,le quartier de Garavan d’où démarre la course du Campanin... «À chaque fois que je participai­s, je faisais un podium ou je gagnais, se souvientil en souriant. Je savais que j’avais des facilités. »

« J’allais à l’entraîneme­nt en traînant des pieds »

Ses parents aussi l’avaient décelé. Ce sont eux, d’ailleurs, qui l’inscrivent à chaque course locale. « Ses amis l’appelaient la Flèche », raconte Claudine, sa mère, jointe par téléphone. Pour autant, le petit Téo ne se laisse pas séduire. Il s’essaie au judo, à la gymnastiqu­e, au tennis... Ce n’est qu’en 2012, alors âgé de 13 ans, qu’il envisage de rejoindre le club d’athlétisme de Monaco, « plutôt reconnu dans la région » .« Au début, ça ne m’a pas plu, confie-t-il. Je faisais beaucoup de demi-fond, de l’endurance et ça ne me convenait pas du tout. J’allais à l’entraîneme­nt en traînant des pieds ! »

Là encore, ses parents l’encouragen­t. Auraient-ils pu imaginer que, quelques années plus tard, leur fils finirait par triompher dans cette discipline ? Lui se serait plutôt rêvé en footballeu­r mais un problème au genou l’avait contraint à abandonner cette idée. « Je pense que je n’aurais pas percé dans le foot », admet-il à présent en riant.

La fabrique des champions

A-t-il finalement cédé à l’athlétisme par facilité, parce qu’il était bon ? « C’est un sport ingrat, réfute-t-il. Il faut énormément s’entraîner. » Il est bien placé pour le savoir, ayant cumulé sport intensif et études durant toute sa scolarité au lycée Pierre et Marie Curie.

« Arrivé en classe de Terminale, ça a commencé à devenir compliqué, se remémore-t-il. Après les cours, je devais aller à Monaco pour m’entraîner puis revenir en train sur Menton. Je rentrais tard le soir, j’avais moins envie de faire mes devoirs. » Et sa mère de relever : « Pour ça, j’étais admirative parce qu’il a toujours été très sérieux. Il n’a jamais loupé un seul entraîneme­nt ! » Baccalauré­at en poche, Téo Andant décide de s’orienter vers une formation STAPS à la fac de Nice mais là aussi, entre son emploi du temps de sportif et les cours, ça ne colle pas. C’est alors que s’offre à lui une opportunit­é sur-mesure : « On m’a proposé de rentrer à l’INSEP, sur Paris », relate-t-il. Dans ce prestigieu­x établissem­ent niché au coeur du bois de Vincennes, le Mentonnais sait qu’il pourra allier son projet sportif à une formation profession­nelle. Il choisit le journalism­e, domaine qui l’attire depuis toujours. Au rythme de seize heures de cours par semaine, aménagées selon ses entraîneme­nts de haut niveau, l’athlète s’acclimate peu à peu à son nouvel environnem­ent. Sur le plan sportif, du moins. « La différence avec avant, c’est que j’ai commencé à m’entraîner tous les jours. Mais plus tu grandis, plus tu dois t’entraîner, résumet-il. Et là-bas, tout est fait pour que tu te sentes au mieux. »

La famille d’abord

Sur le plan personnel, en revanche, l’étudiant a plus de mal à concevoir sa nouvelle vie parisienne. «La première année, je suis redescendu très souvent à Menton parce que la vie ici, mes parents et mes amis, me manquaient beaucoup, confie-t-il. En arrivant à l’INSEP, je ne connaissai­s personne et franchemen­t, Paris est déprimant quand tu n’es pas habitué. » Il faut dire qu’avant cela, le sprinteur n’avait jamais envisagé de quitter son Sud natal. « Si tu m’avais dit un mois plus tôt que j’allais vivre sur Paris, je ne l’aurais pas cru, plaisante-t-il. Mais c’est l’INSEP, ça ne se refuse pas. » « Gros changement » de vie pour le jeune homme donc, qui se définit comme quelqu’un de « très famille » et ne s’était jusqu’alors jamais retrouvé loin de siens. « Je suis très proche de mes parents, je me confie à eux dès que je ne vais pas bien, surtout à ma mère », détaille-t-il.

Figures paternelle­s

Son père, lui, « le pousse au niveau de l’athlé ». « Le talon d’Achille de Téo, c’est son mental, nous livre Hervé Andant. Je lui répète toujours, comme Aimé Jacquet à Robert Pirès : muscle ton jeu ! » Lorsque c’est possible, il l’accompagne en compétitio­n. « C’est un peu comme un porte-bonheur, sourit l’athlète. À chaque fois que mon père vient, je fais des bons résultats. Plus jeune, il n’a pas pu faire de sport alors je pense qu’il vit par procuratio­n ce que je vis. Si à travers ce que je fais, je peux le rendre heureux, ça me fait plaisir. » L’autre figure paternelle dans la vie de Téo Andant, c’est son ancien coach de l’AS Monaco, Jacques Candusso : « Je lui dois énormément, appuie le jeune homme. Il m’a beaucoup apporté, que ce soit au niveau de la performanc­e ou des valeurs qu’il m’a inculquées, comme le respect, le dépassemen­t de soi, le fait d’être humble... Je pense que je n’aurais pas eu ça autre part. Il a détecté mon potentiel et s’est beaucoup investi ». Pari réussi, à en regarder la carrière du sportif. Malgré une saison 2020 marquée par la crise sanitaire, le coureur n’a eu de cesse d’enchaîner les succès sur le tartan.

Champion de France Espoirs du 400 m en 2020, puis du 400 m en salle en 2021, médaille de bronze Élites du 400 m en salle, pulvérisan­t au passage son record personnel de six dixièmes de seconde...

Objectif : Paris 

Prochaines échéances dans sa ligne de mire : les qualificat­ions pour les Mondiaux de relais en mai, les championna­ts méditerran­éens Espoirs en juin et les championna­ts d’Europe Espoirs en juillet. « Je vais aussi essayer de viser une qualificat­ion olympique, poursuit-il impassible. Ce n’est pas le plus gros objectif de ma saison. Enfin, j’ai eu de la chance que ce soit reporté. Si les Jeux avaient eu lieu l’an dernier, je pense que j’aurais eu plus de mal à me qualifier mais là, vu mes récents résultats, je suis plus confiant. Mais mon plus gros objectif, ça va être Paris 2024. » D’ici là, le Mentonnais profite de ses vacances sur la Riviera, au gré de quelques footings en bord de mer, avant de repartir s’entraîner dans la capitale.

Après tout, « le cadre est plus sympa » dans la ville du citron.

MARGAUX BOSCAGLI

À chaque participat­ion, je faisais un podium”

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