« Mon job ? Un mix de Pokémon Go et de pêche à la ligne ! »
Devant le McDo de la Promenade des Anglais l’application Uber Eats ne fonctionne pas. Karim râle. Encore du temps perdu : « Tu sais pourquoi, ça ne me marche pas ? Pour éviter qu’on s’agglutine tous devant chez eux, ils ont installé un brouilleur. Ce n’est pas un comble, ça ? ! »
Pas le temps de porter de jugement. Pour que le job de livreur à domicile soit viable, il faut apprendre la patience.
Attendre d’interminables minutes avant de réceptionner une commande, vite la livrer, revenir illico dans le centre-ville et attendre de nouveaux que l’algorithme de la plateforme vous propose une nouvelle course. À l’infini.
Du haut de ses 29 ans, Karim garde le sens de l’humour : « Ma vie de livreur, c’est un mix de l’attente du pêcheur le nez rivé sur sa ligne et de Pokémon Go. »
euros parfois...
Cool, la vie de livreur ? Oui, plutôt. « Du moins si tu n’envisages pas de faire ça jusqu’à la fin de tes jours. » Mehdi, 32 ans, qui a dû se résigner à s’inscrire sur Uber Eats lorsque sa petite entreprise d’événementiel a été frappée de plein fouet par la pandémie, avoue y prendre du plaisir.
Lui, pourtant, fait partie des stakhanovistes.
En cinq mois, il a enchaîné près de 5 000 courses, entre Nice, Cagnes, Villefranche et Antibes. À lui seul, il est une bible des restos, épiceries, kebab de la Côte : « Pour que l’appli te propose une course, il faut que tu sois à proximité du lieu de commande. Donc t’as intérêt à te faire un plan d’attaque, surtout le week-end quand la demande explose. »
Le vendredi, le samedi et le dimanche, même à coups de 4 euros de commission par livraison, le bilan de ces heures passées à quadriller la Côte peut frôler les 500 euros.
Mais à quelques exceptions prés comme Mehdi qui parvient parfois à encaisser 1 200 euros par semaine de travail acharné, la moyenne des revenus d’un livreur est plus proche de 300 euros.
Salaire de la sueur : « C’est cool parce que tu n’as de patron dans ton dos, que tu te balades tout le temps, mais ça tue. »
Le vélo ? Juste pour la galerie...
S’il est bien spécifié dans les conditions de recrutement que les courses doivent se faire à vélo - marketing en mode green -, la réalité est toute autre.
« On bosse tous en scoot dans la journée. Le soir, mais il ne faut pas l’ébruiter, surtout l’hiver, on livre en voiture », concède Karim qui, au passage, aimerait bien « dire deux mots » à celui qui, sous couvert de marketing écolo, a imposé le vélo à tous les livreurs
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