Une journée par an...
AParis, Lyon, Montpellier, Quimper... Des centaines de personnes, des femmes principalement, ont manifesté dans plusieurs villes de France, samedi et dimanche. Un week-end de manifestations féministes, avant la Journée internationale des droits des femmes aujourd’hui. Dans la capitale, le rassemblement s’est tenu place de la République à l’appel de « On Arrête Toutes », un collectif d’associations féministes. Environ 300 personnes se sont rassemblées pour défendre « à l’international » les droits des femmes et les appeler à faire « grève de tout » aujourd’hui.
Le droit à l’avortement
A Montpellier, comme dans de nombreuses autres villes, les pancartes et banderoles dénonçaient notamment les attaques contre le droit à l’avortement dans de nombreux pays, y compris en Europe.
Inégalités salariales
Les inégalités, en particulier salariales, entre femmes et hommes, encore accentuées par la pandémie, étaient également au centre des revendications. Selon l’organisme européen des statistiques Eurostat, les femmes étaient payées en moyenne 14,1 % de moins que les hommes dans l’UE en 2018.
Violences faites aux femmes
Les manifestantes appelaient aussi à lutter contre les violences faites aux femmes et les féminicides, alors qu’en 2020, 90 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint.
A Lyon aussi, ces slogans dénonçant le sexisme et le patriarcat étaient accompagnés en chansons et au rythme des roulements de tambour, sous une marée de drapeaux et de pancartes. Parmi les revendications figurait également la procréation médicalement assistée (PMA) pour toutes.
Les manifestations avaient commencé samedi dans plusieurs villes de l’Hexagone. A Lille, la marche avait réuni entre 800 et 900 manifestants, selon l’estimation de la préfecture. A Nice, (Photo AFP) la mobilisation avait été autorisée malgré le confinement de la ville durant le week-end. A Marseille, des représentantes d’associations féministes ont pris la parole pour interpeller les passants. Elles ont été rejointes par un cortège de femmes kurdes rassemblées derrière une banderole clamant « Les femmes changent le monde ». A Bastia, une marche pour les droits des femmes a rassemblé 150 personnes, selon la préfecture. La Corse a été marquée par le décès de Julie Douib, 34 ans, tuée le 3 mars 2019 à L’Île-Rousse par son-ex compagnon. Cet électrochoc dans l’opinion avait donné le départ d’une mobilisation inédite et poussé le gouvernement à organiser son « Grenelle contre les violences conjugales ». A Toulouse, plusieurs centaines de personnes ont participé à un « village féministe ». Animant un atelier de « détournement de publicité sexiste », de jeunes militantes ont ajouté au feutre, sur une réclame de parfum montrant une femme : « Si tu pouvais fantasmer de me respecter...»
Deux cents femmes assassinées par leurs conjoints ou leurs exconjoints par an. Près de victimes de viols par jour. Cette journée des droits des femmes est profondément marquée par ces chiffres, qui passent et repassent en boucle dans les journaux et sur les chaînes de télévision. Comme s’il n’y avait rien à faire, dans un pays pourtant civilisé, pour endiguer cette misérable réalité. Une journée par an pour les femmes, le mars, c’est bien, mais franchement, c’est loin d’être assez. Sur ce terrain, celui de la violence faite aux femmes, il n’y a guère de progrès dont on pourrait se féliciter. S’y ajoute, dans la vie de tous les jours, une autre sorte de violence sexuelle, celle du harcèlement. Le sujet a été longtemps tabou. Il ne l’est plus. Pas seulement parce que le mouvement #MeToo, venu il y a quelques années d’Amérique, a mis la lumière sur le comportement des producteurs d’Hollywood ou le mauvais comportement de puissants patrons. Mais parce que, dans la réalité quotidienne, l’univers du travail, la hiérarchie des entreprises sont largement dominés par les hommes, et que longtemps, le harcèlement, gentillet ou brutal, a fait en quelque sorte partie de la vie de bureau, de la vie des entreprises sans que les femmes osent même en parler. C’est ainsi que le vrai problème aujourd’hui n’est plus tellement dans le décompte des hautes fonctions occupées par des femmes. Il est parlant, pourtant : pas une femme parmi les patrons du CAC en France, directrices générales seulement, femmes parmi les membres de leurs comités exécutifs. Cette part des femmes – alors même qu’on le sait, elles obtiennent des résultats meilleurs que les hommes en classes préparatoires d’entrée aux grandes écoles –, est toujours dérisoire. Et leurs salaires sont à cette image : en Europe, la différence hommes/femmes est encore, malgré les efforts des certains gouvernements, de %. Pour autant, les femmes auraient sûrement tort, pour défendre leurs droits, de tomber comme certaines le font, dans la radicalité. Les Femen, par exemple, sont, de ce point de vue, presque contreproductrices. Car elles font peur, parfois, aux femmes elles-mêmes. Au contraire, la lutte des femmes aujourd’hui doit d’abord être collective. Elle les concerne toutes : autant les victimes de violence que les salariées des entreprises, autant les femmes aisées que pauvres, autant les femmes au foyer que les femmes au travail. C’est ensemble qu’elles doivent inlassablement rappeler aux hommes qu’elles sont socialement leurs égales. Et aux hommes politiques, qu’elles constituent près de % du corps électoral.
« C’est ensemble qu’elles doivent inlassablement rappeler aux hommes qu’elles sont socialement leurs égales. »