Nice-Matin (Menton)

« Que la tombe de Joséphine Baker reste à Monaco »

Dans l’éventualit­é d’une entrée au Panthéon de cette dame d’exception, la Licra Monaco et l’un de ses douze enfants adoptifs plaident pour que la sépulture reste ici, où les attaches sont fortes.

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Un hommage en comité (très) restreint. Dans toute l’intimité que peut offrir le cimetière de Monaco. Trois hommes silencieux, les mains croisées, déposent délicateme­nt une gerbe de fleurs sur la sépulture de Joséphine Baker. Quarante-six années après sa disparitio­n, cette dame d’exception est loin d’avoir déserté les mémoires. « On lui rend hommage pour le combat de sa vie », salue Eric Fissore, président de l’antenne monégasque de la Ligue internatio­nale contre le racisme et l’antisémiti­sme (Licra), dont elle reste membre d’honneur. Meneuse de revue aux États-Unis puis en France, Résistante au service du général De Gaulle, figure historique de la lutte contre le racisme et la ségrégatio­n, mère aimante d’une « tribu arc-en-ciel »..., Joséphine Baker a embrassé plusieurs vies en une.

Un destin d’exception qui a poussé la Licra en septembre dernier – et, jadis, Regis Debray – à demander au président Emmanuel Macron son entrée au Panthéon à Paris, où seulement cinq femmes reposent pour l’heure (1).

ELuis Bouillon-Baker, l’un de ses douze enfants adoptifs installé à Menton, y est bien entendu favorable. « Ce serait le remercieme­nt officiel de la France envers les actions de ma mère. Non pas en tant que chanteuse mais en tant que Résistante,

réagit-il. Agent secret de la ligne de démarcatio­n à la Mer et en Afrique du Nord, elle recueillai­t des informatio­ns et transmetta­it des données capitales. Sa personnali­té lui permettait d’aller un peu partout, y compris à Monaco auprès d’officiers italiens et allemands. » Un pan militaire de son existence, moins connu que le volet musichall, largement évoqué dans un récent Secrets d’histoire.

« Elle a presque donné sa vie pour son pays pendant cette horrible guerre. Elle a eu des blessures cachées dont peu de gens sont au courant », poursuit celui qui, par ailleurs, dépeint une figure maternelle ayant laissé « une éducation stricte et juste, une tolérance et l’amour de son prochain. Elle nous a appris à ne jamais juger les personnes dans le monde qui nous entoure, et cela malgré les problèmes qu’elle rencontrai­t. »

Si Joséphine Baker entrait au Panthéon, qu’adviendrai­t-il de sa dépouille à Monaco ? Seule la famille de la défunte possède le pouvoir de décision. « Il y a eu quelques petits litiges entre nous. Mais, au final, la famille est d’accord pour que la dépouille reste à Monaco », résume Luis Bouillon-Baker. La Licra Monaco plaide aussi pour ce scénario. L’entrée au Panthéon se résumerait alors à une plaque à son nom scellée dans la crypte du temple. un logement. »

Une main tendue que n’oubliera jamais la tribu arc-en-ciel, désormais dispersée dans le monde entier. « Et puis, les gens qui l’ont connu ou qui sont attachés à son histoire doivent pouvoir se recueillir à Monaco. »

THIBAUT PARAT tparat@nicematin.fr (1) Sophie Bertelot, Marie Curie, Germaine Tillion, Geneviève De Gaulle-Anthonioz, Simone Veil.

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Eric Fissore et Rachid Boudni, respective­ment président et membre de la Licra Monaco, aux côtés de Luis Bouillon-Baker sur la photo), fils adoptif de Joséphine Baker. (à droite
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Icône du music-hall, Joséphine Baker est décédée à l’âge de  ans. Elle repose au cimetière de Monaco.

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