« Démolir rapidement, pour lancer la construction du pont »
Johan Porcher, directeur adjoint de la direction départementale des territoires et de la mer
Johan Porcher, n° de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) fait partie des fonctionnaires de l’État en première ligne sur la question du fonds Barnier, et en particulier sur le sujet de la résidence l’Écureuil.
Pourquoi avoir condamné l’Écureuil ?
Nous sommes face à un phénomène inédit de changement de morphologie du fleuve, en particulier au Boréon. Il fallait analyser les conséquences des aménagements potentiels, en amont et en aval, les conséquences de crues torrentielles… L’objectif est aussi d’éviter les verrous hydrauliques : les rétrécissements où les matériaux peuvent s’accumuler. Le pont de Venanson, qui a protégé l’Écureuil, est extrêmement fragilisé. Il serait parti, si la crue torrentielle avait duré deux ou trois heures de plus et l’Écureuil aurait été fortement touché. Maintenant, il faut détruire ce pont, et le reconstruire, avec un portage beaucoup plus important : on passe de à une soixantaine de mètres. L’immeuble sera désormais exposé. En plus du coût exorbitant de sa protection, il exposait les rives gauche et droite en amont à des matériaux qui pouvaient s’accumuler.
La décision est donc définitive ?
À Saint-Martin-Vésubie, il y a biens potentiellement éligibles au fonds Barnier. Nous rencontrons les sinistrés. Nous avons fait une séquence spécifique pour cette copropriété. On a identifié tous les scénarios. Il ne s’agissait pas de dire que c’était protégeable et de changer d’avis six mois plus tard. Notre décision, partagée entre tous les acteurs, est ferme et définitive. C’est l’intérêt général qui prime. L’objectif est de le démolir assez rapidement, pour lancer la construction du pont, en , .
Pour cette « délocalisation », vous faut-il l’accord de tout le monde ?
Oui. Cette première étape du fonds Barnier est une acquisition à l’amiable, pas une expropriation. C’est une transaction immobilière. Il faut aller vite, pour passer à la deuxième étape : la démolition. On explique aux gens que c’est une chance de se projeter. On prend d’autres exemples, comme le hameau de La Brague, à Biot : les inondations ont eu lieu en , l’accord de démolition a été pris en . On sent que les gens l’ont bien pris en compte.
Quels sont les délais et le processus de remboursement ?
Une fois le dossier constitué, on peut être chez le notaire en trois mois, puis il y a un petit laps de temps. France Domaines va faire des expertises des bâtiments, des estimations (valeur vénale du bien, avant le sinistre). L’indemnité du fonds Barnier vient en complément des assurances. S’ajoute à ça une indemnité de réemploi de % (pour les frais d’agence, par exemple). C’est quand même un dispositif unique en Europe. Par exemple, seuls % des sinistrés en Allemagne toucheront des indemnités des assurances.
Il se dit qu’il est plus rentable de miser sur l’expropriation… L’expropriation peut ouvrir à d’autres indemnités, mais c’est une procédure beaucoup plus longue. Et les estimations de la valeur des biens n’évolueront pas. Et en attendant, ça ne permet pas de se projeter ailleurs.
Les gens s’interrogent sur les suites concrètes, comme le déménagement…
Pour le déménagement, il est convenu avec la Métropole qu’un accès soit reconstruit. On organisera une journée avec la mairie et les pompiers pour sécuriser le déménagement. Quant à la prise en charge, on a fait remonter la question aux assurances. On essaie de trouver des solutions.
Des copropriétaires se plaignent de devoir payer la taxe foncière d’un bien condamné…
La direction des Finances a transmis un courrier aux communes le septembre. Les sinistrés de biens détruits ou faisant l’objet d’un arrêté d’évacuation sont exonérés de taxe d’habitation et de taxe foncière. S’ils ont payé, ils doivent se rapprocher des impôts pour demander dégrèvement, avec une pièce justificative (rapport d’expert d’assurance ou arrêté d’évacuation).
Recueilli par A. L.