Macron lance les États généraux de la justice
Objectif de cette vaste consultation : proposer des réformes d’ici fin février. Une mission « irréaliste » pour les magistrats.
C’est en dénonçant longuement « les lenteurs et les lourdeurs » de la machine judiciaire qu’Emmanuel Macron a donné le coup d’envoi hier des États généraux de la justice.
Le chef de l’État a énuméré les difficultés de la machine judiciaire : délais trop longs, inflation des normes, judiciarisation des relations sociales, défaut d’information des justiciables. Il a aussi souhaité une plus grande responsabilité des magistrats. Mais sans suggérer de nouveaux moyens pour la justice, ce qu’attendent beaucoup de professionnels.
« Lenteurs et lourdeurs »
Autant de pistes que devront examiner dans les quatre mois ces États généraux, avant de formuler d’ici février 2022 des propositions de réforme « systémique » de la justice qui ne pourraient se
Le Président, hier à Poitiers, lors du lancement des États généraux de la justice. (PhotoPQR / La Nouvelle République) concrétiser que dans un prochain quinquennat. L’ampleur du chantier a fait conclure à nombre de magistrats présents que la mission confiée à la Commission indépendante présidée par JeanMarc Sauvé était irréaliste. Emmanuel Macron a insisté dans son intervention sur « les lenteurs et les lourdeurs du service public de la justice » , qui « ne satisfont aujourd’hui personne, ni les victimes qui ont le sentiment d’une impunité généralisée, ni les policiers et gendarmes qui ont le sentiment d’inutilité. Ni les magistrats et les avocats qui eux-mêmes vivent la même frustration, ni même les coupables pour qui dans trop de cas, la peine perd de son sens avec ces durées ». « Nous sommes dans un monde où on peut suivre le colis que l’on a commandé à la minute et où ce qui est le
et emplois en équivalent temps plein créés. Si la promesse sur les prisons n’a été tenue qu’à moitié, nouvelles places ont tout de même été ouvertes. Reste que la surpopulation pénale demeure : personnes incarcérées pour places aujourd’hui. Les efforts n’ont donc pas changé fondamentalement une situation très dégradée. Les deux plus hauts magistrats français, Chantal Arens, première présidente de la Cour de cassation, et François Molins, procureur général près la Cour de cassation, s’étaient d’ailleurs alarmés, il y a quelques mois, d’« un système à bout de souffle ».
De fait, la France reste malade de sa Justice et figure parmi les mauvais élèves de l’Union européenne dans ce domaine. Alors qu’augmentent sans cesse les contentieux, elle lui consacre , euros par habitant, près de deux fois moins que l’Allemagne, , euros de moins que l’Espagne, , euros de moins que l’Italie ! En matière criminelle, le délai moyen de traitement d’une procédure criminelle y est de plus de ans et demi, selon un rapport du Sénat. Si la question du temps judiciaire peut faire l’objet de bien des débats, il n’en demeure pas moins que, là encore, la France est à la traîne. La Commission européenne pour l’efficacité de la justice estime que le temps médian pour qu’une affaire civile ou commerciale soit close est de jours dans l’UE. En France, il est de jours ! Depuis beaucoup trop longtemps, notre justice fait l’objet de discours et de mesures qui ne la guérissent pas de ses maux. Plus que jamais elle est une priorité dans le pays qui brandit le drapeau des Droits de l’homme. coeur de notre vie, ce qui nous empêche de dormir, on ne sait pas où ça en est », a regretté le chef de l’État.
« Il y a beaucoup trop de chantiers »
« Les lenteurs sont un sujet mais notamment lié au manque criant de personnel, qui n’a pas été évoqué » ,aréagi Céline Parisot, présidente de l’USM (Union syndicale des magistrats).
« Il y a beaucoup trop de chantiers ouverts en même temps, c’est ce qu’on craignait. Comment remettre à plat toute l’organisation judiciaire de A à Z en quatre mois ? Il ouvre tellement de portes qu’on ne voit pas les pistes les plus importantes », a-t-elle déploré. Cette vaste consultation va réunir tout l’écosystème de la justice (juges, procureurs, greffiers, auxiliaires, avocats, mandataires huissiers, surveillants pénitentiaires...) et des citoyens volontaires.