Nice-Matin (Menton)

Tissent leur toile sur le Net

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(Photos Le Parisien/Emilie Delwarde et DR)

Il accepte de s’expliquer, mais pas d’être exposé. Nous l’appelleron­s donc Thomas, un prénom d’emprunt. Ce garde du corps, âgé d’une trentaine d’années, s’est fait passer pour Arturo Pastor auprès d’Edwige. L’acteur a fini par tomber le masque. Dans l’intérêt de la jeune femme, et au risque d’être menacé depuis, selon lui. Potentiel complice d’une escroqueri­e, il se pose en victime. Et livre sa vérité.

Sa mission

Thomas assure avoir connu Virginie B. « par le biais d’un ami ». Cette entreprene­use aurait « un client du nom d’Arturo Pastor. Edwige se serait immiscée dans sa vie. Elle m’est décrite comme très intéressée. » Une mission de renseignem­ent. Au black. Thomas accepte. Quand il entre en scène, voilà des mois qu’Edwige se languit de voir, enfin, son prince charmant monégasque. Première mission : « Faire un FaceTime avec elle, le jour de l’anniversai­re du fameux Arturo Pastor. » Par la suite, Edwige part à sa rencontre à Dubaï. En vain. Sans cette initiative, « ils ne m’auraient jamais déclenché », estime Thomas.

Leurs rencontres

Paris, Cannes, Saint-Tropez. Thomas et Edwige se voient à trois reprises. «Le contexte change alors , témoigne l’acteur. Je n’ai plus une personne au téléphone, mais une femme en face de moi, qui semble très amoureuse. Je me dis qu’il ne faudra jamais la blesser. » Selon Thomas, «iln’yajamais eu de relation intime ». Une version contestée par Edwige. Lui assure avoir slalomé entre deux lignes de conduite : la sienne et celle de son mystérieux client. « J’ai tout fait pour lui montrer que je n’étais pas Arturo Pastor. Elle disait qu’il y avait un jeu d’acteur. À partir de là, j’avais gagné ! »

Sa version

Thomas se pose en protecteur. « Je lui ai dit ce qui se passait dans son dos. Elle a eu beaucoup de chance de tomber sur moi. Que seraitil advenu si je n’avais pas été là ? » On lui rappelle qu’Edwige a bien été dupée, à défaut d’être ruinée. Il le reconnaît : « Quoi qu’il en soit, elle est victime ».

De qui, alors ? Si Thomas n’est qu’un instrument, qui se cache derrière ces «investisse­ments colossaux », qu’il estime en « dizaines de milliers d’euros » ? L’intéressé pense « que Virginie

n’est pas seule. Qu’il y a quelqu’un derrière, qui se faisait passer pour Arturo Pastor. »

Son rôle

Complice, Thomas ? «Je me considère comme complice, mais le bon complice, bienveilla­nt », tempère-t-il. Il admet avoir perçu « plusieurs milliers d’euros », nuance les montants rapportés par Edwige, jure avoir « renvoyé tous les vêtements » mis à sa dispositio­n.

Des regrets ? Des craintes de poursuites judiciaire­s ? « Absolument pas, tranche Thomas. J’ai été juste et égal. Je regrette simplement que certaines femmes tombent dans ce genre de panneau. »

À ses dires, Edwige serait désormais hors de danger. Contrairem­ent à lui. « L’histoire n’est pas finie. »

« Il suffit de prendre la photo en la passant dans Google image, qui va la trouver sur tous les sites où elle est publiée », explique Pierre Penalba. Pour ce faire, il faut lancer une recherche Google, une petite icône en forme d’appareil photo apparaît. Vous pouvez alors copier l’url ou glisser-déposer la photo depuis le bureau de votre (Photo d’illustrati­on Franz Chavaroche et document Instagram)

ordinateur, et le tour est joué. Dans un second temps, vérifiez les sites sur lesquels elle s’affiche. Il est possible de vérifier l’antériorit­é de la photo et donc d’arriver sur le site original où elle a été trouvée puis détournée par l’escroc.

« Malgré tout, explique Pierre Penalba, certaines personnes refusent d’y croire. Une fois, en remontant la source d’une photograph­ie, nous avons pu trouver qu’elle avait été volée sur un site pornograph­ique. La personne escroquée a demandé des explicatio­ns à la personne qui lui avait fourni, et cette dernière a assuré qu’il s’agissait bien d’elle. Impossible de convaincre la victime. »

Si la personne refuse de vous prendre au téléphone, vous devez tout de suite douter, poursuit l’ex-commandant de la PJ. Les techniques sont extrêmemen­t rodées. Les escrocs vont dorloter leur victime pendant des mois. Cette dernière est tellement assaillie d’attentions que du coup, elle n’a plus le temps de penser.

Ce sont souvent des groupes criminels, basés en Afrique ou au Maghreb, qui sont derrière l’arnaque sentimenta­le. « Nous avons eu des cas avec trois personnes qui étaient sur un profil, poursuit Pierre Penalba. Elles se relayaient auprès de la victime et celle-ci voyait ses moindres attentes exaucées. » « Même constat pour les contacts caméra », poursuit Pierre Penalba. D’autres indices doivent alerter : dès que la personne n’est pas dans votre région, qu’on ne peut pas le/la voir. « On retrouve beaucoup le profil de l’homme d’affaires, qui est souvent en déplacemen­t, par exemple dans l’import-export. » Pour parer à l’escroqueri­e, on peut alors demander une connexion par caméra, poser des questions afin que la personne y réponde directemen­t. L’ancien commandant reconnaît que des moyens

 ?? ?? Edwige a accepté de témoigner sous son vrai prénom, mais en préservant son anonymat. En bas, l’un des documents d’identité utilisés par le faux Arturo Pastor, finalement incarné par un acteur.
Edwige a accepté de témoigner sous son vrai prénom, mais en préservant son anonymat. En bas, l’un des documents d’identité utilisés par le faux Arturo Pastor, finalement incarné par un acteur.

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