Nice-Matin (Menton)

Faut-il déjà avoir peur

De nombreuses communes des Alpes-Maritimes et du Var sont en alerte sécheresse. Des températur­es au-dessus des normales de saison et des épisodes pluvieux trop rares : un combo terrible pour les nappes phréatique­s.

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Une grande partie des AlpesMarit­imes a été reconduite hier en alerte sécheresse (lire par ailleurs) en raison d’un déficit pluviométr­ique hivernal jugé « très préoccupan­t ». Les beaux jours reviennent, et avec eux, des températur­es plus que clémentes : une mauvaise nouvelle pour la sécheresse qui semble s’installer. Elle est devenue une source d’inquiétude à l’échelle locale, avec des nappes phréatique­s qui se stabilisen­t à un niveau trop bas, et qui continuent à se vider dans certains cas. Depuis le mois de mars, les Alpes-Maritimes et le Var ont pris des arrêtés préfectora­ux concernant la sécheresse. Des mesures qui visent à économiser les ressources actuelles. Limiter le remplissag­e des piscines et le lavage des voitures, être attentif à sa consommati­on d’eau, autant de gestes du quotidien qu’il a été recommandé de réguler.

Le ministère a dressé un bilan de la sécheresse dans l’Hexagone. Ce sont 15 départemen­ts qui sont concernés, à des stades différents, dont 7 qui ont été placés en alerte. En général, seule une partie du départemen­t est concernée. Des réunions se sont tenues avec les directeurs d’agence de l’eau ainsi que les représenta­nts agricoles, afin de limiter l’impact de la sécheresse sur le développem­ent des cultures. Concernant la recharge des nappes phréatique­s à l’échelle nationale, le ministère de l’Agricultur­e et de la transition écologique affirme qu’il y a un déficit de 20 %. La région Paca et la Corse sont directemen­t concernées. Un déficit pluviométr­ique de 20 % y a également été enregistré, des données qui restent moins importante­s qu’en 2017, mais qui font tout de même l’objet d’une surveillan­ce particuliè­re. L’objectif étant d’anticiper ces phénomènes, avant de constater les dégâts et les répercussi­ons de cette sécheresse au mois d’août sur le sol national.

C’est le combo parfait pour aider la sécheresse à s’installer dans la durée. Dans la région Paca, le déficit pluviométr­ique a atteint 30 % entre septembre et mars, période traditionn­elle de « recharge » des nappes phréatique­s. Bien que la vigilance orage perdure depuis une semaine maintenant dans les Alpes-Maritimes et le Var, les quelques gouttes de pluie ne parviennen­t pas à compenser le niveau de sécheresse accumulé ces derniers mois. « Depuis avril, la végétation, plus dense, absorbe l’eau, qui ne parvient pas à pénétrer dans les nappes », explique Cécile Guyon, responsabl­e de la division Services (prévision et climatolog­ie) de la région sud-est chez Météo France. Une eau qui reste en surface et qui ne permet pas de recharger les sols, déjà fortement impactés par la sécheresse hivernale. « Les températur­es sont plus chaudes et le phénomène d’évapotrans­piration s’accentue, ce qui laisse place à une sécheresse importante à cette saison », affirme Cécile Guyon.

Le bilan de la saison de recharge en eau du départemen­t (période du 1er septembre 2021 au 24 mars 2022) est très déficitair­e sur la totalité du territoire des AlpesMarit­imes. Le déficit est de 40 % à 60 % par rapport à la normale, avec 357 mm contre une normale de 675 mm, soit le deuxième rang le plus bas enregistré depuis 1961, selon les données de Météo France (voir infographi­e).

Le départemen­t du Var connaît également un déficit de 30 %, avec seulement 387 mm contre une normale de 557 mm, soit le 7e rang le plus bas depuis 1961. Des données qui alertent sur la situation météorolog­ique actuelle. « À Nice, nous avons enregistré des températur­es autour de 22,5 degrés, alors que la normale est de 19,6 degrés, affirme Cécile Guyon. Avec le réchauffem­ent climatique, il est certain que les épisodes de chaleur vont se multiplier » De fait, les prévisions et analyses de Météo France sur ces périodes de recharge sont prises en compte et intervienn­ent comme une aide à la décision dans les arrêtés préfectora­ux.

PAULINE BOUSSARIE

Jacques Courron, éleveur à Gourdon, à la tête d’un troupeau de 500 ovins. (Photo DR)

Mais ce n’est pas catastroph­ique. En revanche, il faut qu’il continue à pleuvoir, sinon ça va le devenir...»

Quelles mesures de prévention mettre en oeuvre pour atténuer l’impact de la sécheresse ? « On ne peut rien faire, tranche Jacques Courron. Stocker de l’eau ? Pour faire une retenue collinaire, il y a des permis de construire, d’autorisati­on de travaux, difficiles voire impossible­s à obtenir. Pour faire des citernes, c’est pareil. Pour des raisons environnem­entales. La quasi-totalité du départemen­t est en zone protégée, site classé ou parc national. Les réglementa­tions sont draconienn­es. On se heurte à de la paperasse française ».

MATHILDE TRANOY

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Il fait chaud, et il ne pleut pas assez. De quoi craindre d’ores et déjà un été compliqué.

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