Exactions en Ukraine : l’ONU resserre son étau sur Moscou
Le Conseil des droits de l’Homme a approuvé à une large majorité la création d’une enquête sur les atrocités reprochées aux troupes d’occupation russes depuis le début du conflit.
Genève, le Conseil des droits de l'Homme a adopté une résolution visant la Russie lors d'une session extraordinaire par 33 votes pour, 2 contre (Chine et Erythrée) et 12 absentions (dont l'Inde, le Sénégal et le Cameroun).
Elle demande à la commission internationale de mener une enquête sur les graves violations des droits humains commises par les forces russes dans les régions de Kiev, Tcherniguiv, Kharkiv et Soumy en Ukraine, à la fin février et en mars 2022, en vue de demander des comptes aux responsables.
À l’issue d'une première réunion le 4 mars, Kiev était parvenue à faire adopter une résolution décidant de créer d'urgence une commission d'enquête internationale indépendante sur la situation en Ukraine depuis l'invasion du 24 février dernier.
De nombreuses atrocités
Depuis, la diffusion dans les médias internationaux de photos prises à Boutcha et montrant des corps dans la rue, certains les mains liées dans le dos ou partiellement brûlés, ainsi que des fosses communes, ont provoqué une vague de condamnation internationale. D'autres atrocités ont été révélées ailleurs dans le pays, poussant l'Ukraine à réclamer « un pas de plus » du Conseil.
La résolution adoptée hier demande également à Moscou de faire en sorte que les organisations internationales, dont celles de l’ONU, puissent « accéder immédiatement et sans entrave aux personnes qui ont été transférées de régions ukrainiennes touchées par le conflit et sont détenues » en Russie
ou dans des territoires contrôlés par ses forces.
Le texte appelle par ailleurs la Haute Commissaire aux droits de l'Homme Michelle Bachelet à faire le point – lors de la 50e session du Conseil (du 13 juin au 8 juillet) – sur la situation à Marioupol, désormais presque entièrement sous contrôle des forces russes.
Avant le vote, l'Ukraine et ses alliés ont dénoncé « la liste interminable » des exactions commises par la Russie, qui a boycotté les débats. « Torture et disparitions forcées, violences sexuelles et de genre, la liste des crimes russes est interminable », a déclaré la Première viceministre des Affaires étrangères de l'Ukraine, Emine Dzhaparova, dans une allocution vidéo. « L’agression russe s’accompagne, chaque jour, de découvertes toujours plus macabres et insoutenables », a affirmé pour sa part l'ambassadeur français Jérôme Bonnafont. Cette résolution « a pour but d’amener tous les responsables de ces atrocités à rendre des comptes », a-t-il expliqué avant le vote, assurant que « la communauté internationale ne peut pas rester silencieuse ».
« Diabolisation de la Russie »
Michelle Bachelet a déclaré que son bureau continuait de vérifier les allégations d’exactions, « dont beaucoup peuvent relever de crimes de guerre » et a dénoncé les « horreurs inimaginables » subies par les habitants de Marioupol.
« L’ampleur des exécutions illégales, y compris les indices d'exécutions sommaires dans les zones situées au nord de Kiev, est choquante », a-t-elle également dit, en précisant disposer pour l'instant d'informations sur 300 cas. Il s'agissait de la première réunion consacrée à la détérioration de la situation des droits de l'Homme en Ukraine depuis que l'Assemblée générale de l'ONU a suspendu Moscou début avril de la plus haute instance de l'organisation internationale en matière de droits humains.
La Russie peut participer aux travaux du Conseil en tant qu'observateur mais a choisi la politique de la chaise vide. Pour ne pas laisser complètement le terrain à ses adversaires, l'ambassadeur russe auprès de l'ONU à Genève, Guennadi Gatilov, a publié un communiqué dénonçant « la diabolisation de la Russie par “l’Occident collectif”, parlant d’une enquête à charge et dénonçant les dérives du Conseil devenu un forum « pour faire des coups politiques ».