Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Voyage à la barre des pointus niçois
Les embarcations qui appartiennent au patrimoine sont choyées par l’association des bateliers plaisanciers du port de Nice - La Mouette. Ce n’est plus la pêche mais la chorale qui fédère
Féfé Gasparini, une figure du port est à la manoeuvre. Sur la cale, ça grince, ça tire, ça pousse et tout le monde s’active pour hisser, puis pour remettre à l’eau deux pointus. Jean-Paul Rainaut, le vice-président de l’ABPPN La Mouette, forte carrure, n’est pas le dernier à donner la main. C’est l’esprit de l’association : entraide intégrale. Michel Berti est à côté de son pointu avec gréement. Il n’a pas résisté à l’appel. « Un copain le possédait, lorsqu’il a été mis en vente, je l’ai acheté. Pas pour aller pêcher, mais pour des régates, comme les Voiles latines à Saint-Tropez ».
Gardien d’une tradition
Lui se sent « gardien d’une tradition » et indéfectiblement passionné par la mer, les bateaux qu’il poursuit avec l’édition de livres. Aujourd’hui il avoue sortir un peu moins en mer : « C’est normal, au début on a le feu. Mais rares sont ceux qui veulent prendre la relève. Et puis si des problèmes, par exemple mécaniques surviennent l’addition grimpe vite ». Mais ce matin, on se bouscule sur le quai d’Entrecasteaux. Les spécialistes jaugent l’étendue des réparations, observent les galbes, dépiotent les plus renommés qui se dandinent doucement un peu plus loin. « Les constructions étaient très artisanales, chacun avait sa patte, comme une signature », commente Féfé Gasparini, l’un des charpentiers de marine à la retraite les plus actifs du port. Il brosse, là sur le quai une petite carte des chantiers de l’époque en Méditerranée.
Une chorale hameçonnée
On va de Tunis à Cagnes-sur-Mer
en suivant le bois qui dictait alors sa loi, en glissant sur les galbes, en épousant la beauté des formes, des profils qu’il montre. L’évocation devient presque charnelle en caressant les mots membrure, jambette. Le résultat en dérive, produisant une armada dynamique
ou pas : « Il y a les bateaux qui tapent sur la vague et
ceux qui l’ouvrent ! » Les pointus décorent remarquablement le port mais n’attirent plus la grande foule des plaisanciers et des pêcheurs. Ils sortent peu. Du coup La Mouette a déroulé d’autres filets, a pêché des voix. Depuis deux ans, c’est la chorale composée d’une quarantaine de personnes qui redonne de l’élan au club. Et toutes les voix salvifiques sont admises. Même les plus pointues ?