Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Escroc à la Lamborghini et corrupteur d’un commissaire
Stéphane Alzraa a écopé d’un an de prison pour une tentative d’escroquerie à l’assurance avec son bolide à 300 000 €. Mais les procès qui l’attendent sont d’une tout autre envergure
Vous nous expliquez que vous avez rédigé un faux constat amiable pour ne pas perdre votre bonus. Cela fait tout de même gagne-petit quand on connaît votre parcours », s’étonne Marc Joando, le président du tribunal correctionnel de Grasse. Stéphane Alzraa, un FrancoIsraëlien de 35 ans, répond d’une banale tentative d’escroquerie qui cadre mal avec le personnage. A une époque, il menait grand train sur la Côte d’Azur, louait 15 000 € par mois une villa à La Roquette-surSiagne. En visioconférence mercredi depuis la prison de Lyon où il purge 30 mois de détention pour une banqueroute frauduleuse, l’homme se veut repentant. Il admet avoir rempli un faux constat amiable après avoir détruit sa Lamborghini sur l’A8. Il était assuré tout risque. Alors pourquoi cette escroquerie minable ? La PJ lyonnaise flaire une manière de blanchir de l’argent sale. Le prévenu s’en défend. Le président Joando poursuit l’interrogatoire : - Quelle est votre profession et le montant de vos revenus ? - J’étais responsable commercial dans une boîte d’informatique pour 2400 € net. - Votre train de vie paraît bien supérieur à vos revenus. - À l’époque je gérais plusieurs sociétés. Dont une société luxembourgeoise de commerce et de location de voitures de luxe. Certaines étaient gracieusement prêtées au commissaire Michel Neyret, flamboyant patron de la PJ niçoise puis lyonnaise.
Un enquêteur mandaté
Parmi la flotte de véhicule de prestige figurait la Lamborghini Murcielago (300 000 €) qui a fini en épave. À 240 km/h, vers 3 heures du matin une nuit de novembre 2010, Stéphane Alzraa a fini dans la glissière de sécurité. Estimation des réparations : 220 000 €. D’où l’idée de demander à une connaissance, propriétaire d’une Mégane, d’inventer un scénario. Avec sa Renault, Kevin Bemonte aurait doublé sur la droite et accroché la voiture de sport. Il a touché 2 500 € en remerciement de sa complicité. L’assureur, suspicieux, a mandaté un enquêteur privé qui a levé le lièvre. Le sinistre n’a pas été indemnisé. « Je reconnais les faits. J’ai fait n’importe quoi », explique le détenu. « Je veux m’excuser et régler la partie civile. » L’assureur réclame 5 000 € en guise de dommages et intérêts. Le procureur de la République Parvine Derivery requiert un an de prison contre Alzraa, six mois contre son complice. Me Luc Tran Duy, l’avocat d’Alzraa s’étonne d’une telle sévérité : « Ces réquisitions se fondent sur les affaires à venir, davantage que sur les faits qui sont jugés aujourd’hui. »Misen examen dans l’affaire Neyret, du nom d’un commissaire trop proche, selon la justice, de certains voyous, Alzraa devra également répondre d’une juteuse escroquerie à la taxe carbone. Cela consistait à acheter des quotas de CO2 hors taxe dans un pays de l’Union européenne, puis de les revendre en France à un prix incluant la TVA, sans jamais reverser celle-ci à l’État. Deux milliards d’euros ont ainsi été détournés en France en 2008 et 2009. Le tribunal a finalement suivi les réquisitions et condamné à un an ferme les deux prévenus. Alors qu’il était libérable en avril, Alzraa risque de comparaître détenu au procès Neyret. Un mandat d’arrêt a été délivré à l’encontre de Kevin Belmonte.