Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
De l’antiquité au XVIe siècle en passant par le Moyen-Âge
Dans le vacarme des engins de chantier. Au pied d’un monument de fer rouge vif qui coule du béton sans discontinuer. Une petite voie de terre montante est au centre de toutes les attentions. Sur place, Romuald Mercurin (lire interview cicontre) supervise le travail de l’armée de scientifiques – anthropologues et géomorphologues – qui disposent, méticuleusement dans la montagne de gravats, de tout petit repère. Les pelles mécaniques ont, depuis plusieurs semaines, décaissé plus de 6 mètres de remblais. Témoins de plusieurs siècles d’occupations et d’histoires successives. Avant que petites truelles et pinceaux passent à l’action. « C’est très important ce que nous voyons là. Il s’agit d’une voie de circulation principale qui devait être large de cinq ou six mètres », explique en bichonnant les petites pierres jaunes mises à jour, Brice Chevaux. Responsable des opérations de stratigraphie du site, le jeune homme a trouvé son Graal : « On a encore une couche de substrat à analyser et on connaîtra l’origine exacte de cette voie. A ce jour, les éléments en notre possession semblent indiquer qu’elle devait relier, à l’époque romaine, un axe principal – qui devait se trouver dans les environs de l’actuelle place Garibaldi – vers l’agglomération niçoise située au pied ou autour de la colline du Château ». Aude Civetta, responsable anthropologue du site, assistée de Bérangère Jossier précise : « Cette voie longeait une importante nécropole (différente d’un cimetière puisque se situant en dehors de la ville) que l’on date du IVe siècle après Jésus-Christ. Ce sont sans doute les premiers chrétiens. Il n’y a pas d’objets dans les coffrages faits à partir de tuiles plates. Il faudra encore de longs mois d’études en laboratoire, pour définir précisément l’époque de ces découvertes
».
Une habitation moyenâgeuse
Une voie et une nécropole romaines. Peut-être Grecques à en croire les preuves de crémation et les mobiliers découverts. Ces découvertes majeures ne doivent pas masquer les autres. « Nous avons également retrouvé les fondations d’une habitation qui semble dater du Moyen-Âge. Des traces de cendres, faciles à analyser, pourraient même indiquer si celle-ci a été détruite lors d’un siège turc à cette époque ». Enfin, autre révélation de ce grand puzzle historique, « des ossements de chevaux qui semble indiquer un centre d’équarrissage datant du XVIe siècle. On se trouverait vraiment dans un secteur populaire du Nice de ce tempslà. On va pouvoir déterminer ce qu’ils mangeaient. Dans quelles conditions ils vivaient ». Sous l’ancienne caserne Filley, on n’a pas fini de rembobiner le grand magnéto de l’Histoire.