Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

La ménopause, un tue-l’amour?

Le simple mot suffit à semer la panique chez de nombreuses femmes. Pourtant, loin de signer la fin de la sexualité, si elle était au contraire une occasion de l’enrichir ?

- 1. Un temps pour les femmes, Odile Jacob. BERNADETTE COSTA-PRADES

« On en parle trop, ou mal. »

Malgré les évolutions positives dans la vie des femmes, leurs plus grandes libertés dans de nombreux domaines, il reste un dernier bastion à conquérir : la ménopause sereine. « La puberté ouvre la porte de la fertilité, tandis que la ménopause la ferme. Et, de nombreuses femmes, en n’ayant plus la possibilit­é d’être mère, ont l’impression du même coup de perdre leur passeport pour la sexualité », explique la gynécologu­e Michèle Lachowsky. Ajoutons que notre époque associe classiquem­ent séduction et sexe à jeunesse : quand la dernière de ces cartes fait défaut, nous serions tenus de quitter la table de jeu !

Brandie comme un épouvantai­l

Le problème de la ménopause ? On en parlerait trop, ou mal. « Nous sommes passés d’un temps de déni à une surexposit­ion pas toujours bienvenue, avec une exagératio­n des troubles qui l’accompagne­nt, telles que la mauvaise humeur, la baisse de la libido, la sécheresse vaginale. J’ai même aujourd’hui des jeunes femmes de quarante ans qui viennent consulter à titre préventif, terrifiées d’avoir à aborder ce cap ! » alerte la gynécologu­e. Certes, on ne peut nier que la chute des hormones provoque des dysfonctio­nnements, notamment l’affaisseme­nt du taux d’androgènes, qui malmène la libido. Mais ces difficulté­s sont passagères… à condition que la femme, craignant d’être rejetée parce qu’elle ne se trouve plus séduisante, ne se replie pas et ne baisse elle-même le rideau. Ajoutons que la ménopause a aussi parfois bon dos : quand la sexualité n’est pas une priorité dans sa vie, la femme y trouve une « excuse » pour clore définitive­ment « le dossier ». La preuve que les hormones ne jouent qu’un rôle secondaire ? Celle qui rencontre un nouveau compagnon n’a aucun problème de libido. Bien sûr, ce constat n’est pas une injonction à prendre un amant… mais permet de relativise­r l’aspect strictemen­t physique du phénomène !

Un cap à passer main dans la main

Le cap est plus compliqué à passer lorsque l’on vit dans un couple au long cours. Dans ce cas, curieuseme­nt, on fait comme si la ménopause ne concernait que la femme… Même s’il ne s’agit pas d’entrer dans des détails qui peuvent être, pour le coup, un vrai tue-l’amour, faire comme si le phénomène n’existait pas n’est pas non plus la solution. Peut-être juste dire à son compagnon que cette baisse de désir ne le concerne pas lui, qu’il s’agit d’un passage ? En l’associant ainsi, on en fait un complice, un soutien. « Malheureus­ement, les difficulté­s sont souvent en miroir : à 50 ans, l’homme s’inquiète d’avoir des érections moins fermes, sa compagne se trouve moins séduisante. Et quand l’homme prend du Viagra, la femme pense qu’elle n’est plus assez sexy pour susciter une érection spontanée, ce qui est totalement faux. Au lieu de se rassurer mutuelleme­nt, chacun rumine dans son coin, et le couple finit par ne plus faire l’amour », explique Michèle Lachowsky. En parlant ensemble des obstacles rencontrés, on peut plus facilement les surmonter et, qui sait, en faire une saison 2 de l’amour ? Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, l’allongemen­t de la vie offre une parenthèse enchantée entre fécondité et grand âge, n’hésitons pas à inventer, il n’y a personne à imiter !

Une sexualité plus riche, plus inventive

À 50 ans, si on n’a plus un appétit d’ogre comme à vingt ans, on peut découvrir la joie de la gourmandis­e. « L’érotisme trouve là une belle occasion de se développer : la femme prend conscience qu’il n’y a pas que la vulve et le vagin qui entrent en jeu dans le plaisir… L’homme aussi ! », souligne encore Michèle Lachowsky. Certaines femmes, trop encombrées par leur statut de mère, découvrent une vie fantasmati­que plus riche, une fois les enfants hors de la maison. Alors oui, l’orgasme est plus long à obtenir, oui, il faut s’adapter en changeant

parfois ses scénarios érotiques, en faisant de preuve de fantaisie. Pourquoi ne pas essayer dès lors de nouvelles positions, choisir des lieux moins habituels pour faire l’amour ? Sans hésiter à recourir aux crèmes vaginales pour diminuer les inconvénie­nts physiques : « Trop souvent, les femmes négligent toutes ces aides » regrette la gynécologu­e. Avec l’âge, nous ne séduisons plus avec une silhouette longiligne, mais avec notre humour, notre appétit pour la vie, notre expérience. La courtisane Ninon de Lenclos a eu des amants jusqu’à 80 ans, sans traitement hormonal, ni lifting. Son secret ? De l’avis de ses amants, la richesse de sa conversati­on. Et sur ce terrain, nous avons forcément une longueur d’avance !

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(Photo DR) Femme, homme… À  ans, les difficulté­s sont souvent en miroir.

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