Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Un double tournant

- Par MICHÈLE COTTA

« Cette victoire montre que la poussée de Daesh n’est pas irrésistib­le, que l’État islamique peut être vaincu. »

Palmyre reconquise: après des combats d’une extrême violence, dimanche au petit matin, les forces syriennes appuyées par l’aviation russe ont repris la cité antique aux combattant­s de Daesh. Dans la noirceur des dernières semaines, c’est un symbole, et aussi un espoir. Le monde entier avait regardé, en mai dernier, le coeur serré, meurtri, les images diffusées en boucle sur tous les écrans, des djihadiste­s de l’État islamique vêtus de noir entrant dans la merveilleu­se ville gréco-romaine de Palmyre. Ils y avaient exécuté en moins de temps qu’il le faut pour le dire,  civils dont  enfants, puis commencé de détruire avec rage les arcs de triomphe, les gradins, les statues, tous ces chefs- d’oeuvre qui font de ce site un des plus beaux lieux archéologi­ques du Moyen-Orient. Pourquoi la rage de détruire? Tout simplement, parce qu’ils sont les restes d’une oasis prospère et tranquille, aux IIe et IIIe siècles après Jésus-Christ, les vestiges d’une autre civilisati­on, d’un autre empire, l’Empire romain de Tibère qui avait fait de la Syrie une de ses provinces et élevé Palmyre au statut de colonie romaine. Ainsi les islamistes radicaux

jugent-ilsque rien ne doit

tenir

debout de ce qui n’a pas été construit ni voulu par l’islam. Singulière façon de concevoir l’Histoire. Palmyre figure à nouveau, depuis hier matin, au patrimoine de l’humanité, elle a été arrachée à l’obscuranti­sme. Il faut s’en réjouir. Palmyre n’est cependant pas qu’un symbole historique. Les combats qui viennent de s’y dérouler marquent une défaite militaire de grande ampleur pour Daesh. La bataille a fait près de  morts parmi les djihadiste­s: pour les forces de l’État islamique, il s’agit du bilan de pertes le plus lourd depuis . Certes, les combats continuent autour de l’aéroport (situé au sud- est de la ville, Ndlr), la ville est truffée de mines, que les artificier­s s’efforcent de rendre inoffensiv­es depuis hier. Mais enfin, la reprise de Palmyre marque sans doute un tournant majeur dans la guerre contre Daesh. D’abord parce qu’elle accentue le recul des forces islamistes: celles-ci auraient ainsi perdu en quinze mois  % des territoire­s qu’elles contrôlaie­nt. Après celle de Kobané, au nord, reprise en janvier  par les Kurdes aidés par l’aviation américaine, la victoire de Palmyre montre que la poussée de Daesh n’est pas irrésistib­le, que l’État islamique peut être vaincu. Elle est importante aussi, cette victoire, parce qu’elle montre que les forces syriennes de Bachar al-Assad, aidées par les Russes, sont en mesure de reconquéri­r le terrain perdu, qu’elles sont même peut- être désormais – quitte à choquer tous ceux qui, en France et ailleurs voient dans le chef d’État syrien uniquement un dictateur –, le meilleur rempart contre l’islamisme. C’est en cela que l’entrée en action de la Russie, le soutien militaire qu’elle apporte aux forces officielle­s syriennes a fait entrer la guerre dans une nouvelle phase: celle, espéronsle, où la coalition anti-Daesh comprendra Russes et Américains, Européens et pays arabes du MoyenOrien­t, unis dans une même volonté: la reprise des territoire­s occupés par l’État islamique.

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