Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Visitation: une aide pour les façades qui fait débat
Le vote d’une subvention à hauteur de 40 % du coût du ravalement de copropriétés situées en face du futur hôtel de luxe prévu dans le couvent du Vieux-Nice suscite la suspicion
Alors qu’un recours bloque le projet d’hôtel 5-étoiles prévu au sein du couvent de la Visitation, ce dernier a encore été au coeur d’un débat lors du dernier conseil municipal. Une délibération autorisant la Ville à accompagner le ravalement de plusieurs façades privées autour
(1) de l’édifice, par une subvention de 40 % du coût total des travaux, a irrité l’opposition. Jean-Luc Gag a rappelé que « l’ancien couvent de la Visitation, monument historique inscrit, est situé au coeur du site patrimonial remarquable du Vieux-Nice et est au centre d’un projet de requalification et de valorisation, en tant qu’élément exceptionnel du patrimoine niçois. » Le conseiller municipal délégué au Patrimoine historique a exposé « l’état de vétusté des façades aux abords de ce monument historique, qui n’ont pas fait l’objet de ravalement depuis de nombreuses années », d’où «la nécessité d’un accompagnement par une subvention » pour redonner leur éclat à ces bâtisses « formant un ensemble architecturalement cohérent. »
« Coïncidence bizarre »
Ce qui n’a pas tardé à faire réagir. Dominique Boy-Mottard, du groupe Radical et divers-gauche, s’est dite « surprise, car les aides ici prévues le sont en dehors du schéma traditionnel qui veut que la subvention réponde à une demande des copropriétaires. Ici, c’est la Ville qui décide d’accorder cette aide sans qu’une demande en ait été faite, du moins, par les copropriétaires qui ne sont pas prêts à payer le reste. » Et d’ajouter : « Comme par hasard, c’est au moment où vous avez accordé un bail à une société à des conditions très avantageuses pour y construire un hôtel, qu’il vous vient l’idée de subventionner la rénovation des façades riveraines à hauteur de 40 % ! À mon sens, vu que c’est la société Perseus qui est bénéficiaire du bail, ce serait à elle de prendre en charge la totalité d’une éventuelle rénovation des façades alentour, plutôt qu’à la collectivité. Bref, je trouve cette coïncidence bail-subvention bizar re… » Pour le socialiste Patrick Allemand, même topo : « Nous ne sommes pas dupes de votre intérêt soudain pour ce secteur. On voit clairement qu’on crée une sorte de décor de théâtre, pour que les richissimes clients du futur complexe hôtelier de luxe ne puissent voir de la fenêtre de leur chambre d’hôtel, ou des jardins, que du beau ! Par contre, si vous êtes en dehors du champ de vision, vous pouvez toujours attendre d’avoir une subvention… »
« Étendre à un périmètre plus large»
Jean-Luc Gag a défendu cette délibération : « C’est un dispositif que l’on souhaite étendre à un périmètre plus large… Il s’inscrit dans le prolongement de ce qui s’est déjà fait dans le Vieux-Nice… » La Ville évoque, depuis 2008, les façades de « la place Garibaldi, de la rue Saint-François-de-Paule, de la place Pierre-Gautier, de la rue de l’Hôtel-de-Ville, de l’espace Georges-Pompidou (parking Sulzer), et du quai des États-Unis et le projet Corvésy ». Elle indique que ces aides sont un moyen d’inciter les riverains à ravaler leurs façades, en les aidant à respecter les demandes des Bâtiments de France. Paul Cuturello, PS itou, tique: « Alors pourquoi ne vote-t-on pas juste un dispositif global ? Le dossier de cet ensemble sera ensuite étudié… » Jean-Luc Gag invoque « pour ces immeubles un caractère d’urgence, d’où cette délibération particulière. Avant, plus tard, d’établir un dispositif global pour les façades à caractère historique. Ce type d’opération nous permettra de peser dans la demande de label de Ville d’art et d’histoire que nous allons demander, pour un secteur qui pourrait aller jusqu’à l’avenue Thiers… » La délibération a été adoptée, malgré sept oppositions. Les riverains concernés n’ont pas souhaité commenter cette mesure. S’ils veulent en profiter, ils devront présenter à la mairie avant le 31 décembre 2021, les factures témoignant de l’achèvement et du paiement des travaux. Le versement de la subvention est conditionné au respect, notamment, des prescriptions que pourra édicter l’architecte des Bâtiments de France. (1) Celles des copropriétés situées aux 1, 3, 4, 9, 11, 12 et 14, rue Saint-Joseph, 1 et 4, rue de la Condamine, 1, 3 et 5, rue des Serruriers, les façades donnant sur la rue Sainte-Claire et le retour Est des immeubles dont les entrées sont situées entre K8 et J10, rue Guigonis.