Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
La solidarité « artisanale » dans les communes rurales
Encore relativement épargné par le virus, l’arrière-pays s’organise face aux mesures de confinement. Comme à où le maire propose son aide pour livrer les médicaments
Si le milieu rural est encore bien préservé au niveau sanitaire, les mesures de confinement, elles, sont bien là. Et elles ne font qu’aggraver un mal déjà bien ancré : l’isolement des personnes fragiles ou/et âgées. Face à cette situation, les maires sont en première ligne. Comme à Belvédère, dans la vallée de la Vésubie, où Paul Burro, fraîchement réélu, propose depuis mardi de faire le lien avec la pharmacie la plus proche, située au village voisin de Roquebillière, à 5 kilomètres. « Je l’ai toujours un peu fait, ça marchait au boucheà-oreille, explique l’élu. Là, c’est plus organisé : les gens appellent le service mairie le matin et je passe récupérer les ordonnances, bénévolement bien sûr. » Le maire affirme avoir reçu quatre demandes par jour. «Jenefais pas ça seul, les infirmiers libéraux le font depuis longtemps. Mais si ça peut les soulager… D’autant qu’ils sont plus sollicités : les gens vont moins chez le médecin. Pour beaucoup, la visioconférence, c’est du chinois ».
« Je ne pouvais pas sortir »
Lorsqu’elle a vu sa proposition sur Facebook, Nadia Formeau, 72 ans, a interpellé « Paul ». D’habitude, elle se débrouille ou elle faisait appel à son fils, mais elle l’a perdu récemment. Et voilà la nouvelle donne : le confinement, la mairie fermée, la séparation du reste de la famille qui vit à Nice. Alors la proposition du maire était la bienvenue : « Je ne pouvais pas sortir, car je n’avais pas d’attestation. Et mon imprimante ne marche pas. Il m’a prêté attention. C’est très gentil de sa part, trop gentil. Je lui ai demandé pourquoi il ne se faisait pas seconder, mais il a répondu qu’il préférait le faire seul. » Paul Burro l’assure, le mouvement est en marche : «La (DR) connexion est bien entre les gens, on prend soin de son voisin. Il faut que tout le monde joue le jeu ». Il cite un autre habitant, Samuel Perrier, professeur de sport, qui s’est proposé pour faire les courses avec son van.
« Les personnes âgées sont en première ligne »
Confiné au télétravail, il propose d’aménager son emploi du temps. « Notre gros souci, ce sont les personnes âgées, qui doivent rester chez elles, qui se déplacent difficilement et qui se retrouvent en première ligne du coronavirus, explique ce villageois de 48 ans. Elles n’ont pas forcément une carte bancaire, ou n’ont pas l’habitude de commander à distance. » Sa proposition : descendre au supermarché, lui aussi à Roquebillière, voir au téléphone ce dont la personne aurait besoin et avancer les frais. « Pour les personnes âgées, il n’y a pas de problème d’argent. Mais elles n’ont pas de voiture, elles vont stresser parce qu’il manque des biens. Je pense à mes parents, qui sont agriculteurs. Je leur ai mis la pression pour qu’ils n’aillent pas dans les magasins. Je serais bien content que quelqu’un en fasse autant. Ne serait-ce que pour les rassurer, qu’ils sachent qu’il y a des solutions pour les aider. » De la solidarité, du coeur, parfois un peu à l’arrache. « J’ai dit à Paul que c’est dangereux, retrace Nadia Formeau. Il faut un masque, ne pas être au contact. Je lui ai dit de le mettre. Je lui ai dit ! » Un côté « artisanal » contre lequel Véronique Luddeni, une vétérinaire bien connue dans toute la vallée, a mis en garde. «On est encore au début, les gens continuent de faire comme si de rien n’était. Mais il faut faire hyper attention ».