Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Fresque géante d’une star montante de l’art à Nice
Imaginez un immense dessin en noir et blanc d’une longueur de… 35 mètres. C’est la prouesse réalisée par Quentin Spohn à l’Espace « à Vendre ». Visite guidée avec l’artiste
C’est dans la fraîcheur de la salle appelée le Château – ancien transformateur électrique du quartier Lépante réhabilité il y a cinq ans, en « Espace à vendre », galerie d’art contemporain, par Bertrand Baraudou – qu’expose l’artiste. La résonance du lieu et la fresque saisissante qui recouvre ses murs plongent instantanément les amateurs d’art et de dessin contemporain dans un autre temps : celui des cathédrales. À l’instar des peintres de la renaissance, c’est un travail de Romain qui a été réalisé ici ! « J’ai mis plus d’un an pour réaliser cette fresque, à raison de presque 10 heures par jour. Elle a été faite sur-mesure pour le lieu, en cinq parties dont la plus grande fait environ 15 mètres. » Le décor est planté : voici un artiste qui n’a pas peur du labeur.
Virtuosité technique
Quentin Spohn est un dessinateur adepte de la pierre noire, outil très prisé des artistes de la Renaissance, qui permet des noirs mats et profonds. Pourtant, pour cette oeuvre, il a opté pour du graphite, soit le plus classique crayon à papier, décliné dans ses différentes versions : du très gras au très clair. L’effet en est moins tranché, plus délicat mais aussi plus abstrait. « J’ai travaillé sur du papier à dessin en rouleau de 2 mètres de hauteur. Je dessine au sol dans mon appartement, qui n’est pas très grand, raconte-t-il. Je commence par quadriller tout le papier à la main : rien que pour ça, j’en ai pour 2 semaines complètes. Ensuite, c’est une sorte de mise au carreau de mes différents dessins préparatoires, extraits de mes recherches en peinture, en littérature et de mes rêves aussi. » Quentin Spohn s’inspire aussi bien des scènes tourmentées d’un peintre médiéval comme Jérôme Bosch que de science-fiction ou d’auteurs de BD tel Robert Crumb.
Carambolage au marché d’Anvers
« Pour cette fresque, je me suis plongé dans l’univers de l’école d’Anvers », détaille l’artiste pour expliquer le titre de son expo Carambolage au marché d’Anvers .« Au début du XVIe, des peintres flamands comme Pieter Aertsen commencent à s’intéresser à la nature morte. C’est un genre qui n’existe pas encore à l’époque. En plus, ces peintres s’amusent à en renverser les codes, en les faisant apparaître au premier plan de leur tableau, pour reléguer dans le fond les scènes principales, religieuses. » À son tour, l’artiste a renversé, retourné, trituré ces tableaux, puis a entrechoqué tous les univers qui l’inspirent.
Niçois d’adoption
S’il est né en région parisienne, c’est à Nice qu’il s’est formé et qu’il s’épanouit. Diplômé de la Villa Arson en 2013, il est aujourd’hui prof à la Villa Thiole. Le lien avec « l’Espace à vendre » ? Il ne date pas d’hier : « Une de mes premières expositions, je l’ai faite avec Bertrand. Je sortais de l’école et il m’a invité à montrer mes dessins à Nice d’abord, dans son espace puis à la galerie Le 22 – qui m’a représentée plusieurs années – et dans sa galerie parisienne. »
ROMAIN MAKSYMOWYCZ
Savoir +
«Espace à vendre », 10 rue Assalit, 06000 Nice. 09.80.92.49.23. Espace-avendre.com et adresse mail contact@espace-avendre.com.