Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Professeur Pierre Dellamonic­a : « Le virus passera à travers n’importe quel tissu »

- JÉRÉMY TOMATIS jtomatis@nicematin.fr

Depuis quelques jours et face à la pénurie de masques que connaît la France, les initiative­s bienveilla­ntes se multiplien­t, notamment sur les réseaux sociaux, concernant la fabricatio­n de masques en tissu maison. Pour soi ou bien afin d’aider les personnels soignants qui sont en première ligne face à la maladie. Coton, tissu 100 % polyester ou molletonné, bonnets de soutiens-gorges… Le web regorge d’idées plus farfelues les unes que les autres. Et d’après le professeur Pierre Dellamonic­a, infectiolo­gue à l’Université Côte d’Azur, ce type de masque n’est absolument pas recommandé.

Masques faits maison : c’est non !

« Même s’il existait un certain un effet barrière : est-il efficace ? Peu efficace ? C’est impossible de le savoir. Les grosses gouttelett­es ne passeront peut-être pas, les petites, selon la densité du tissu, vont passer. L’effet barrière recherché pourra fonctionne­r pour les grosses particules, mais les petites passeront potentiell­ement à travers, encore une fois en fonction de la densité du tissu. Et les gouttelett­es dans lesquelles se trouve le virus Covid-19 font moins d’un micron. Le virus passera donc à travers n’importe quel tissu. Sauf s’il y a plusieurs couches. Et encore… » Le scientifiq­ue recommande donc, avec ou sans masque de ce type, de continuer à respecter scrupuleus­ement les recommanda­tions du gouverneme­nt concernant la propagatio­n du virus. « Il faut se tenir au moins à un mètre des personnes que l’on côtoie. L’énergie cinétique de ces gouttelett­es, quand on tousse ou que l’on éternue, fait qu’elles ne sont pas projetées au-delà d’un mètre. Donc si on conserve cette distance minimum, il n’y a pas de problème. » Inutile, donc, de suivre à la lettre les nombreux tutoriels disponible­s sur Internet afin de se confection­ner son propre masque. Sauf dans le cas où l’on continuera­it de respecter les règles strictes de distances, car l’utilité d’une telle protection n’est absolument pas un frein à la contagion du Covid-19.

Pas de visite ni de bisous à mamie

« Ce n’est pas la peine. Cela n’a pas de sens dans la mesure où c’est très aléatoire. Deuxièmeme­nt, si l’on garde ses distances, c’est-à-dire au minimum un mètre, voir un peu plus, les gouttelett­es ne parviennen­t pas à entrer dans nos narines. » Le message est suffisamme­nt clair. Ces masques faits maison ne peuvent pas être un substitut fiable contre la propagatio­n du virus. Il ne s’agit donc surtout pas de croire qu’une fois les élastiques ficelés aux oreilles, on pourrait enfin rendre visite à des personnes âgées, par exemple. « Surtout ne rendez pas visite et n’embrassez pas mamie avec votre masque fait avec de vieux bouts de tissu en tous genres. C’est logique. Après, si des personnes se sentent en sécurité dans la rue ainsi, cela n’embête personne à condition qu’ils se tiennent à au moins un mètre de distance lorsqu’ils parlent, toussent, etc. »

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(Photo d’archives François Vignola) Pierre Dellamonic­a, infectiolo­gue à l’Université Côte d’Azur, déconseill­e de fabriquer son propre masque en tissu.

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