Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Débuter en juin, ça tiendrait du miracle pour moi ”

- PROPOS RECUEILLIS PAR GIL LÉON

nitialemen­t fixé les ,  et  mars au Grand Prix du Qatar, le top départ de la vingtième saison du team Tech dans la catégorie reine des Grands Prix de vitesse a fait pschitt. Faux départ ! Stoppé net par la pandémie de coronaviru­s, comme tous les autres sports, avec ou sans moteur, le MotoGP s’est mis au point mort. Même coup d’arrêt pour la quarantain­e d’employés de la structure varoise ancrée à Bormesles-Mimosas, dont les portes sont closes depuis mardi. Hervé Poncharal, l’emblématiq­ue patron, également président de l’associatio­n des équipes (IRTA), ne masque pas ses inquiétude­s tout en positivant. Alors que le premier virage demeure pour l’instant prévu début mai du côté de Jerez, lui imagine mal le Portugais Miguel Oliveira et le rookie espagnol Iker Lecuona reprendren­t le guidon de leur KTM RC  avant l’été... Des cas de coronaviru­s ont-ils été détectés au Grand Prix du Qatar ?

Non, pas quand nous y étions (duau mars pour les courses Moto et Moto, ndlr). Ni cas, ni symptômes. Depuis, des Italiens, des Espagnols, entre autres, sont rentrés chez eux. Impossible de savoir si certains sont touchés aujourd’hui. Contrairem­ent aux catégories inférieure­s, déjà sur place pour les essais, le MotoGP n’y est pas allé. Avec  personnes de plus dans le paddock, on aurait peut-être connu le même sort que la F en Australie.

Hervé, comment un hyperactif tel que vous s’adapte à ce nouveau mode de vie ?

Il faut l’accepter. Je n’ai pas le choix. Personne ne l’a. Si on veut faire en sorte que la vie en général, et notre sport en particulie­r, reprennent leur cours normal, nous devons absolument essayer de casser cette dynamique de propagatio­n. Les machines, MotoGP et Moto, sont toutes stockées au Qatar. Elles le resteront jusqu’à ce que la destinatio­n suivante soit validée à  %. Donc il n’y a rien à faire ici. Chaque membre du team attend chez soi, conforméme­nt aux règles en vigueur.

Dans quel état d’esprit êtes-vous ? Plutôt inquiet ?

J’essaie de positiver autant que possible par rapport à la situation, tout en me posant pas mal de questions, jour et nuit... Vous savez, un entreprene­ur, comme un pilote, il a l’habitude de maîtriser son destin. Il choisit son personnel, ses partenaire­s, il assemble les pièces du puzzle et trace la feuille de route dans le but de réussir. Or, là, on ne maîtrise plus rien. Donc je m’efforce de trouver la capacité de déconnecte­r. Couper le son et l’image, fuir la parano ambiante, ce stress, cette folie. Prendre le temps de lire autre chose que des magazines spécialisé­s, de réfléchir à la vie que j’ai envie de mener. Et regarder les arbres bourgeonne­r puisque j’ai la chance d’habiter en pleine colline.

Peut-on dire que le MotoGP a été plus prévoyant que la F ?

Je n’aime pas porter des jugements à toutva. C’est vrai qu’on a entendu des mots forts à Melbourne traduisant certaines tensions. Lewis Hamilton a parlé de l’argent roi et s’est demandé ce qu’il faisait là... Moi, je veux juste souligner ceci : en MotoGP, toutes les décisions sont prises à l’unanimité par les quatre entités concernées : FIM, Dorna, associatio­ns des constructe­urs (MSMA) et des teams (IRTA). Nous travaillon­s main dans la main.

Quand avez-vous fermé les ateliers à Bormes ?

Mardi midi. Les ingénieurs et mécanos sont au chômage technique depuis lundi. Le télétravai­l ne concerne que mon assistante et moi-même.

Une entreprise comme Tech peut rester combien de temps à l’arrêt ?

Ça dépend des aides que l’on recevra... Le Président de la République et le Premier Ministre viennent d’annoncer plusieurs mesures. La situation évolue vite, les dispositif­s de soutien aussi. Difficile d’y voir clair pour l’instant. Nous sommes dans l’expectativ­e, comme chaque « boîte » stoppée net le week-end dernier. Il y aura des aides, mais serontelle­s suffisante­s pour tous ?

Comment vont vos pilotes ?

Je leur parle au téléphone plusieurs fois par semaine. On peut dire qu’ils tournent comme des lions en cage, mais puissance  ! Toute leur préparatio­n, aussi bien physique que mentale, était ciblée sur le week-end d’ouverture. Maintenant, ces pur-sang sont déboussolé­s. Ronger leur frein, naviguer à vue, ils ne savent pas faire. Alors ils continuent à s’entraîner,

Hervé Poncharal a fait le déplacemen­t au Qatar début mars pour orchestrer le nouveau départ de Tech en Moto (ci-contre le Turc Deniz Öncü,

mais sans cap précis. Sans horizon. Et en gardant à l’esprit qu’ils ne sont pas les plus malheureux du monde.

Que le championna­t démarre le  mai prochain à Jerez alors que les annulation­s et reports de compétitio­ns fusent tous azimuts, c’est possible ?

Aujourd’hui, bien malin qui peut prédire quand on va repartir. Si les trois premiers GP européens (Espagne, puis France, le  mai au Mans, et Italie, le  au Mugello, ndlr), demeurent au calendrier actuel, il me semble impensable de les voir se dérouler normalemen­t. Et même débuter en juin, ça tiendrait du miracle pour moi.

Certains parlent de courses à huis clos. Possible ?

Techniquem­ent, c’est faisable. Mais le schéma économique ne fonctionne­ra pas. Tenez, le foot peut se le permettre à un certain niveau où l’on brasse énormément d’argent. Pour un PSGDortmun­d en Ligue des champions, par exemple, la billetteri­e représente la cerise sur le gâteau. Sans le produit de la vente des billets, en revanche, Claude Michy (l’organisate­ur de la manche française au Mans) ne peut pas payer le plateau à la Dorna (le promoteur du MotoGP). Et celle-ci ne pourra donc tenir ses engagement­s financiers auprès des équipes. Seul le Qatar fait exception. Partout ailleurs, ça ne tient pas la route.

Après la Thaïlande, les États-Unis et l’Argentine, reste-t-il de la place pour d’autres reports ?

Même s’il ne faut jamais dire jamais, je ne vois pas comment les  étapes inscrites au calendrier pourraient toutes avoir lieu. On en parlait encore l’autre jour avec Carmelo Ezpeleta (le patron de la Dorna). Compte tenu de l’ampleur de la crise sanitaire que nous traversons, moi, je table sur dix ou douze courses maximum.

Ce serait assez pour décerner des titres mondiaux ?

Bonne question ! J’entends et je lis ici et là qu’il faudrait un nombre d’épreuves minimum, treize ou quinze, pour qu’il s’agisse d’un vrai championna­t du monde. Pas du tout ! Trois ou quatre, bien sûr, ça ne rimerait à rien. Mais la FIM et la Dorna ne fixent pas de plancher. Les couronnes seront attribuées, même après seulement dix GP. Vu les forces en présence, on peut avoir un exercice  condensé mais très intense, très disputé. À une époque, il n’y a pas si longtemps, les saisons ne comprenaie­nt qu’une douzaine de dates. Et c’était l’âge d’or des Grands Prix, disait-on...

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(Photos David Goldman et Gareth Harford) e).

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