Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Les assauts nationalistes
Docteur en géographie à l’Institut français de géopolitique, Anaïs Voy-Gillis s’est penchée sur la montée des nationalismes en Europe. Elle l’adosse à trois crises majeures : financière en , migratoire en et représentative, le rejet des élites modifiant le rapport au progrès, vécu désormais comme une agression. Elle précise toutefois : « Le populisme n’est pas une idéologie mais un style politique. Il n’est pas l’apanage des partis nationalistes-identitaires. » Autre constat, le nationalisme prend des formes diverses selon les pays, ce qui explique sa difficulté à faire émerger un bloc cohérent au sein de l’Union européenne. S’il est un socle idéologique commun aux mouvements identitaires, c’est le rejet de l’immigration, le refus d’une société multiculturelle, qui s’est encore consolidé depuis les attentats. « L’immigration n’est plus vue seulement comme une cause de chômage. L’islamisme, avec des confusions savamment entretenues, est érigé en ennemi numéro un », circonscrit Anaïs Voy-Gillis. Sur le plan institutionnel, si persistent les critiques envers une Europe technocratique et incapable de répondre à l’unisson aux crises majeures – on le voit aujourd’hui –, les nationalistes ont cependant mis de l’eau dans leur vin : leur volonté de rupture s’efface à présent devant la promotion, de l’intérieur, d’une Europe des nations. En matière économique en revanche, l’auteure pointe de nettes divergences entre les partis néolibéraux, proches d’une doctrine de droite et ceux, comme le RN en France, qui se sont rapprochés d’une vision plus étatiste. C’est l’une des raisons pour lesquelles, malgré leur essor durable, elle ne voit pas se bâtir une coalition continentale des mouvements nationalistes. « L’agenda de ces partis est d’abord national, ils sont plus dans des stratégies individuelles que collectives. » Leurs idées n’en imprègnent pas moins la société. « Ils ont la volonté de vider progressivement l’Union de tout ou partie de sa substance. Le projet européen se trouve considérablement affaibli par leurs assauts réguliers. »