Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Sclérose en plaques : quelques bonnes nouvelles
Pas de facteur aggravant par rapport au Covid-19 pour les patients. Certains traitements pourraient même être utiles dans les formes graves
Maladie inflammatoire auto-immune, la sclérose en plaques (SEP) s’attaque à la myéline, une substance qui s’enroule autour des nerfs et forme une gaine protectrice indispensable à la bonne conduction de l’influx nerveux. Ses troubles, très variables, ont une incidence forte sur la qualité de vie des patients et peuvent évoluer vers un handicap irréversible. En cette période de crise sanitaire, le point sur les risques liés au Covid-19 et sur les avancées dans les traitements et la recherche avec le professeur Jean Pelletier, neurologue au CHU la Timone à Marseille et président du comité scientifique de la Fondation ARSEP (1).
Vos patients courent-ils un risque particulier vis-à-vis du Covid- ?
C’est une question que se sont posés médecins et patients au début de la crise, d’autant que nous sommes dans le cadre d’une maladie auto immune avec des traitements de fond, pour supprimer les poussées, qui impactent l’immunité.
Des éléments de réponse ?
La communauté médicale et scientifique a mis en place une base de données : patients atteints de la SEP ont contracté le Covid, dont sont décédés. En l’état actuel des choses, on n’a pas noté de facteurs de risques autres que ceux recensés dans la population générale. Le seul facteur aggravant lié à la SEP, c’est le niveau de handicap. Globalement, c’est plutôt rassurant.
Y compris par rapport aux traitements ?
Aucun élément ne laisse penser que les traitements posent problème. Huit des patients décédés n’avaient pas de traitement. Au contraire, certains des traitements utilisés dans la SEP font l’objet d’études pour savoir s’ils pourraient permettre d’éviter des complications respiratoires du Covid-. Ils sont utilisés pour bloquer les poussées inflammatoires et on cherche à voir s’ils ont un effet sur le choc cytokinique observé dans les formes graves du Covid-. Cela peut paraître paradoxal car ce sont des médicaments immunosuppresseurs ou immunomodulateurs. Mais non ! En fait, ils ont une cible très précise et n’ont qu’un impact limité sur l’immunité générale.
Des nouveautés dans le traitement de la SEP ?
De nouveaux traitements devraient être disponibles dans les mois à venir. On dispose déjà d’une panoplie impressionnante quand on sait qu’on n’avait rien il y a vingt ans. On a désormais une quinzaine de molécules qui permettent d’adapter le traitement à la forme de la maladie, à son évolution et aux réactions du patient. Parmi les nouveaux médicaments, il y a les anticorps monoclonaux qui ciblent très précisément la réaction inflammatoire responsable des poussées (). Si on prévient les poussées, on évite les séquelles et, à terme, le handicap. En revanche, on reste démuni sur les formes progressives de la maladie, primaire ou secondaire, probablement parce que l’inflammation est différente. C’est un grand enjeu de la recherche, en particulier du programme européen MS Alliance, car ces formes évolutives conduisent très rapidement au handicap.
Un message particulier à vos patients ?
Côté Covid, le fait qu’on soit rassuré ne doit pas nous empêcher de rester très prudent, notamment vis-à-vis de la reprise du travail. Les conseils et décisions doivent être individualisés. Plus généralement, un message optimiste : en dix ou quinze ans, la photographie de la SEP a complètement changé. Le décalage en termes de fréquences des poussées et de handicap est bien réel. Si la prise en charge est précoce et individualisée, l’image de la SEP, ce n’est plus celle du fauteuil roulant. 1. Fondation pour l’aide à la recherche sur la sclérose en plaques. 2. Il existe deux grandes formes de SEP : les formes récurrentes rémittentes évoluent par poussées, entrecoupées de périodes de rémission. Les formes progressives, plus rares, se caractérisent par une progression régulière des symptômes.