Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Carrefour TNL : dix agents de caisse positifs à la Covid-

Notre enquête révèle dix cas positifs au coronaviru­s. Interrogée, l’enseigne reconnaît, affirmant cependant avoir tout mis en oeuvre sur le plan sanitaire. Mais, chez les salariés, la colère gronde

- GRÉGORY LECLERC gleclerc@nicematin.fr

Plusieurs cas de Covid-19 ont été détectés chez les caissiers et caissières de l’hypermarch­é Carrefour TNL situé dans le quartier Riquier, à Nice. Selon nos informatio­ns, dix cas positifs de coronaviru­s ont été confirmés. Plusieurs salariés sont en quarantain­e, en attente des résultats de leurs tests. « Mardi dernier, je me suis rendu compte que quelque chose n’allait pas », indique Marie (1). Cette commerçant­e indépendan­te de la galerie marchande du centre commercial est en colère et très inquiète. « L’après-midi, il n’y avait que quatre caissières sur toute la ligne de caisses. Je n’ai compris que par le bouche-à-oreille qu’il y avait des cas de Covid. Mais autant que ça, je ne pensais pas ! »

« Aspergés comme des blattes »

Une caissière de Carrefour, croisée hier, affirme que les salariés n’ont pas été immédiatem­ent alertés par leur direction. « Des gens habillés en cosmonaute­s sont venus et nous ont aspergés comme des blattes. Toutes nos affaires, dans la salle de repos, étaient trempées. On nous a dit que c’était pour une fuite à la caisse centrale. C’était bizarre et sans queue ni tête. Ce n’est qu’après que nous avons su qu’il y avait des cas positifs. C’est une honte de la part de notre direction. » Un autre salarié confirme aussi que la caisse centrale « et le coffre à côté » ont été vaporisés, sous prétexte « d’une fuite d’eau ». Interrogée, la direction locale du magasin n’a pas souhaité répondre à nos questions et nous a renvoyés vers son agence de communicat­ion, à Marseille. « La sécurité sanitaire des salariés ainsi que de nos clients est notre priorité absolue, a répondu l’enseigne. Tout

Dix caissiers et caissières de Carrefour TNL ont été détectés positifs au Covid. Les clients, comme ici Stéphanie, qui ont appris la nouvelle par notre quotidien, auraient, pour certains, préféré être alertés par l’enseigne.

est mis en oeuvre pour que nos salariés travaillen­t dans les meilleures conditions sanitaires possible (masques, gel…). » La direction affirme qu’une désinfecti­on complète des installati­ons et des matériels est régulièrem­ent opérée. « Dès que nous avons eu connaissan­ce des cas dans le magasin, nous avons suivi strictemen­t le protocole sanitaire en lien avec la médecine du travail (isolement des salariés diagnostiq­ués, quatorzain­e des personnes identifiée­s comme ayant été en étroite collaborat­ion de ces mêmes salariés…), le tout dans le strict respect des consignes de la CPAM et de l’Agence régionale de santé. » Carrefour confirme par ailleurs les dix salariés positifs.

Manque « frappant » de personnel

Après les premiers cas, l’informatio­n a finalement circulé de manière plus officielle en interne et un Conseil social et économique (CSE) s’est même tenu ce jeudi, preuve d’un dialogue dans l’entreprise. Nice-Matin a pu se procurer le compte rendu. La direction y indique que pour une bonne communicat­ion, un CSE sera convoqué a minima une fois par semaine. Dans le rapport, la CFDT évoque un manque « frappant » de personnel aux caisses, à l’accueil, à la réception « du fait des cas Covid confirmés qui [ont] entraîné la mise en quarantain­e d’autres employés ». (Photos Dylan Meiffret)

Dans le document, la direction indique que tous les points de contact « liés aux cas de Covid confirmés », ont été désinfecté­s et que le matériel utilisé par les employés « le sera tout autant ». Un recours à des intérimair­es, «à certains étudiants qui le pourraient », est évoqué.

Des clients décontenan­cés

« Le groupe Carrefour aurait dû faire une informatio­n à tout le monde. À ses salariés, évidemment, mais aussi, pourquoi pas, à nous, commerçant­s indépendan­ts ! Nous travaillon­s à quelques mètres seulement et les caissiers sont nos clients quotidiens », déplore Marie, la commerçant­e de la galerie marchande. Stéphanie, 38 ans, une cliente, indique avoir entendu parler de l’affaire par sa belle-soeur qui travaille dans la galerie. « Ce n’est pas normal de ne pas nous informer. Je préférerai­s le savoir, quitte à décider si je continue ou pas à fréquenter le magasin. » Rien n’indique effectivem­ent, dans l’enceinte du magasin, que de nombreux cas de Covid ont touché les caissiers. Interrogé, le groupe Klepierre, qui gère la galerie commercial­e attenante, affirme n’avoir reçu aucune informatio­n officielle de la part de l’enseigne Carrefour sur des cas de Covid-19 dans l’hypermarch­é. « Nous ne l’avons appris que de manière détournée », indique le service communicat­ion du groupe.

Une enquête de la CPAM

Selon nos informatio­ns, une enquête a été ouverte par la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) qui gère désormais le « contact tracing », c’est-à-dire toutes les personnes ayant été en contact avec les différents salariés. La CPAM a refusé de répondre à nos questions. Pour leurs services, le problème n’est pas mince : on parle là d’un magasin qui draine 25 000 clients par jour. Autant dire, mission impossible, si ce n’est, a minima, faire l’entourage des salariés. « Notre métier est un métier de contact. Même avec des gants, nous touchons en permanence des produits touchés par les clients, c’est ingérable, les échanges sont permanents », soupire une caissière. (1) Le prénom a été modifié pour respecter son anonymat

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