Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Abandon et morts d’animaux

Des dizaines d’animaux ont été retrouvés morts sur le terrain d’une associatio­n de protection animale. Ses consoeurs ont porté plainte. Le parquet a diligenté une enquête pour maltraitan­ce

- CÉLIA MALLECK cmalleck@nicematin.fr

Amandine n’a pas dormi de la nuit. Elle a les traits tirés et la voix triste. «Je n’en peux plus de faire ça », souffle la présidente d’Espoir pour petites pattes sur le parking central de Berre-les-Alpes. Depuis deux jours, elle est sur le qui-vive pour une opération de sauvetage. Hier matin, avec une dizaine d’autres responsabl­es et bénévoles d’associatio­ns de protection animale, elles ont saisi onze bêtes avec le concours de la gendarmeri­e. Des chevaux, des chats, des chèvres, des poules et un cochon vietnamien, abandonnés au milieu d’immondices, de puces et de cadavres putréfiés, dans une propriété privée, siège d’une associatio­n consoeur : le Domaine des mille papattes.

« On tombe de haut »

« On tombe de haut, confie Cléa, de Rien que pour eux. On a côtoyé la présidente. On lui a confié des lapins et des chats...» Même chose pour Davina, Berroise et bénévole de la Tribu du fourmilier. « J’avais fait une collecte alimentair­e avec elle une fois, liste-t-elle. Je lui avais confié un bouc et une chèvre pour leur offrir un environnem­ent naturel, une meilleure vie... Et elle s’en occupait bien jusqu’à ce qu’elle se sépare de son conjoint, il y a environ deux mois. Mais les animaux ont commencé à remonter sur la route. Ça nous a mis la puce à l’oreille. » La veille, c’est elle qui a donné l’alerte générale sur ce cas de maltraitan­ce. Deux bénévoles d’Instinct animal sont tout de suite allés constater les dégâts.

Opération de cinq heures

Face à l’horreur, elles ont contacté la gendarmeri­e qui leur a fait savoir qu’elles pouvaient être poursuivie­s pour violation de domicile et vol d’animaux. Le soir même, elles ont obtenu l’accord de la présidente du Domaine des mille papattes pour organiser la saisie, dès le lendemain. Contactée, l’intéressée n’a pas donné suite. Seul son exconjoint s’est déplacé pour faire la constatati­on avec les gendarmes. Il est passé devant la presse et les associatio­ns animales, sous escorte militaire. Sans un regard et dans un silence de plomb. L’opération a duré environ cinq heures et mobilisé une douzaine de gendarmes, la direction départemen­tale de la protection des population­s, le groupe sauvetage animalier des pompiers, une entreprise spécialisé­e dans le transport équin, Caval’ ambulance, et même une tractopell­e pour mettre en terre les animaux morts.

« La saisie la plus “hard” que j’ai faite »

La presse était tenue à l’écart et, depuis la route, on ne pouvait rien voir : la propriété en contrebas était cachée par les arbres. Mais le témoignage et les photos des associatio­ns suffisent à composer le tableau. « C’est la saisie la plus hard que j’ai faite », confie Laura.

La présidente de Bonheur éternel est venue récupérer le seul bovidé vivant : c’est la chèvre de Davina. « Elle était attachée à une chaîne dehors, poursuit-elle. C’était le cauchemar sur terre : on a retrouvé des os dehors, noyés à la chaux dans une baignoire. Dans la grange, on a retrouvé cinq cadavres de chèvres et de boucs en décomposit­ion... Il doit y avoir des dizaines d’animaux morts. » Les onze animaux sauvés – et les trois chiens pris en charge la veille – n’avaient pas bonne mine. Les deux chevaux rescapés étaient amaigris, le cochon était gras mais couinait de peur et les volatiles étaient dans les vapes. « Ils sont très anémiés, juge Cécilia Fruleux, d’Asa06. Le coq ne tient même pas sur ses pattes... Je vais les emmener chez le véto mais je ne sais pas s’ils vont tenir le coup. » Tous les autres rescapés ont été placés dans des familles d’accueil aux quatre coins du départemen­t.

Enquête ouverte

La présidente mise en cause et son conjoint ont, quant à eux, été entendus en garde à vue, selon le procureur de la République de Nice. Ils ont été libérés hier soir, mais l’enquête pour maltraitan­ce animale se poursuit. Les deux Berrois peuvent encourir une amende de 450 euros, s’ils ont blessé ou causé involontai­rement la mort d’un animal ; 1 500 euros si c’est volontaire. En cas de récidive, l’amende peut monter jusqu’à 3 000 euros. Mais s’ils sont condamnés pour mauvais traitement, l’amende sera de 750 euros. Les associatio­ns ont porté plainte et espèrent obtenir l’interdicti­on de détenir un animal à vie. Une peine qui peut être appliquée en cas d’abandon, de sévices graves ou d’actes de cruauté. Ce que l’enquête du parquet devra déterminer.

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 ?? (Photo Cyril Dodergny) ?? Deux chevaux et une chèvre ont été saisis, hier matin, et placés dans des familles d’accueil.
(Photo Cyril Dodergny) Deux chevaux et une chèvre ont été saisis, hier matin, et placés dans des familles d’accueil.
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(Photo C. D.) Les chevaux étaient très amaigris, les poules anémiées.
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(DR) Les rescapés vivaient au milieu des puces, des cadavres et des immondices.
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(DR) Cinq chèvres et boucs ont été retrouvés morts dans la grange.

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