Tillinac a rejoint Chirac

C’était un écrivain brillant et attachant. Anar de droite, réac assumé, Denis Tillinac est décédé dans la nuit de vendredi à samedi à l’âge de 73 ans. Auteur d’une cinquantaine d’ouvrages, ce Corrézien à la voix enrouée et aux vestes épaisses est décédé un an jour pour jour après Jacques Chirac dont il fut très proche, dans les bons comme dans les mauvais moments. Nous l’avions d’ailleurs croisé l’an dernier, quelques jours après la disparition de l’ancien président lors de l’hommage qui lui avait été rendu à Sarran, en Corrèze. L’oeil rieur et le timbre patiné par la nicotine, il nous avait raconté les virées au petit matin avec « Le Grand », de bistrots en salle des fêtes. Témoin des premiers pas corréziens du jeune loup Chirac dans les années soixante, Denis Tillinac avait évoqué cette période dans Spleen en Corrèze, récit de ses années de localier pour La Montagne et La Dépêche du midi.

Du bonheur d’être réac

Porte-drapeau de la « droite des mousquetaires », enfant de la Xaintrie, ce petit bout de Corrèze qui flirte avec le Cantal, amoureux de rugby et de camaraderie, le hussard Tillinac a porté dans ses livres, ses essais et ses éditos une certaine idée de la droite. Une droite aussi fière d’elle que dénuée de tentations extrêmistes. Celui qui avait « fui mai 68 en Solex » prenait d’ailleurs un malin plaisir à cultiver son côté gaulois, réfractaire aux bobos et aux bons sentiments. Nostalgique mais jamais pessimiste, l’auteur de l’essai « Du bonheur d’être réac » marchait avec délectation dans les pas d’Antoine Blondin et Roger Nimier. Patron des éditions de la Table Ronde pendant quinze ans, il avait refusé de publier les journaux intimes de Gabriel Matzneff, l’écrivain accusé de pédophilie par Vanessa Springora dans son livre Le consentement. Esprit libre, l’écrivain et polémiste venait souvent à Nice, ville qu’il appréciait et où il animait régulièrement des conférences au Centre universitaire méditerranéen. Il s’y était rendu pour la dernière fois en février dernier à l’occasion de la sortie de son Dictionnaire amoureux du Général.

(Photo AFP) Corrézien et chiraquien, Denis Tillinac est décédé un an jour pour jour après l’ancien président.