Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Le vénérable Belem amarré pour l’hiver
Laissé à quai par la pandémie, ce trois-mâts historique est arrivé à Cannes, son seul voyage de l’année. Il va y hiberner six mois et y accueillir les visiteurs jusqu’à fin octobre. Embarquement
Nicolas Plantrou, président de la fondation Belem, savoure son plaisir de recevoir des visiteurs à bord, après de trop longs mois à quai. Le Belem a retrouvé la mer ! Voici une bonne nouvelle pour les amoureux de voile, d’histoire. Et, au-delà, tous ceux qui guettent des symboles positifs par gros temps sanitaire. Bientôt un an que ce majestueux trois-mâts, né en 1896, n’avait plus navigué. Covid oblige. Pour son unique escapade de l’année, le Belem s’est offert une virée Saint-Nazaire-Nice. Puis Cannes, où il a accosté. Il y prend ses quartiers d’hiver pour six mois. Comme il le fit à la Seyne-sur-Mer en 2013-2014. « On s’est rencontrés sur un projet commun avec la Ville de Cannes, qui a accepté gracieusement d’accueillir ce monument historique », explique Christelle Hug de Larauze, déléguée générale de la fondation Belem. David Lisnard, maire d’une « ville de nautisme et de culture » ,yavu « le havre idéal pour accueillir ce vaisseau », une «figure emblématique du patrimoine français ».
2020 , « année blanche »
En avant donc, larguez les amarres ! Après une escale au port Lympia à Nice, cap sur le port Canto. « Vous êtes chez vous », lance Nicolas Plantrou à sa trentaine d’invités. D’ordinaire, le Belem peut en embarquer 48. Les contraintes sanitaires l’ont obligé à réduire la voilure. 2020 ? « On l’appelle “l’année blanche” », soupire Christelle Hug de Larauze. En navigation, impossible de respecter gestes barrières et distanciation. « Le bateau devait partir le 1er avril avec 26 navigations. Tout est tombé à l’eau. On est responsables ; on n’a pas eu le choix ». Ouf : ce bateau-école a enfin repris la mer. Pas comme avant. Mais suffisamment pour faire admirer ses élégantes boiseries, son pont imposant, ses trois mâts de métal pouvant déployer 22 voiles. Et pour enseigner des techniques de navigation fidèles au XIXe siècle. « Ça fait chaud au coeur de voir qu’il est toujours en capacité de naviguer, d’accueillir les gens, confie Christelle Hug de Larauze. L’équipage
a retrouvé son sourire. »
« Un beau symbole »
Le commandant Aymeric Gibet en témoigne. Même s’il ne navigue « pas dans les conditions que l’on souhaiterait, c’est un beau symbole. Arriver à Cannes, c’est une fierté pour nous. On y était déjà venus pour les Régates Royales [reportées hier en raison de la météo] . En tant que marin, c’est une joie immense de voir ce bateau revivre. » Revivre. C’est le mot. Le Covid, finalement, n’est qu’« une épreuve de plus pour ce bateau », constate le commandant Gibet. « Il a sur- vécu aux éruptions, aux séismes, aux incendies, aux guerres mon- diales... et maintenant, à une pandémie ! Il résiste. Il résistera encore longtemps. » Cette résilience, les Cannois sont invités à y participer jusqu’au 25 octobre. Durant cette période, ils peuvent venir le visiter sur réservation (Rens. cannes.com). Le commandant Gibet l’annonce : « Pendant l’hivernage, Cannes va avoir un monument historique de plus ! » Pour son arrivée dans la baie cannoise, un cachalot (!) s’est invité dans son sillage, au large de l’île Saint-Honorat. Bernard Lemaignen, matelot instructeur, est heureux d’avoir pu hisser à nouveau grand foc et voile d’étai, à la force des bras et de l’enthousiasme des visiteurs. « Nous, marins, on est plus heureux sur l’eau qu’à quai. On espère que ça pourra tourner normalement l’an prochain. »