Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Les Amazones du Pop à Nice

A l’occasion des trente ans du Mamac, c’est une exposition­événement, résolument joyeuse et déclinée au féminin pluriel(les), qui y est présentée jusqu’au 28 mars 2021, avec

- LAURENCE LUCCHESI llucchesi@nicematin.fr

De B.B., héroïne du Comic-strip gainsbouri­en et son refrain entêtant, Shebam pow pop wizz, aux corps flottants au milieu de paysages édéniques, c’est une déflagrati­on onirique qui ouvre cette exposition ! Se déroulant sur 1 200 mètres carré (totalement inédite en France comme en Europe à cette échelle), elle nous fait basculer de l’autre côté du miroir... Vers une histoire méconnue du mouvement le plus populaire de la seconde moitié du XX siècle : le Pop-Art. Et vers

e une odyssée sensuelle qui narre un récit, celui d’une émancipati­on des femmes par l’affirmatio­n de leur désir. C’est aussi l’histoire d’une décennie, avec, dès 1961, le premier tir de Nikki de Saint-Phalle. Derrière cette figure emblématiq­ue du Mamac, c’est tout un mouvement, incarné ici par quarante artistes internatio­nales, qui vachanger la donne. Car si dans l’iconograph­ie traditionn­elle du Pop-Art, les femmes sont omniprésen­tes, depuis les stars de Hollywood aux pin-up en passant par la pub, c’est toujours la même image qui domine les représenta­tions, y compris celles du cinéma et des tableaux des maîtres du genre (Andy Wharol, Roy Lichenstei­n, Tom Wesselman) : celle d’une créature éternellem­ent passive et disponible. Pour se libérer de cette conception, les autres artistes, (les « amazones ») vont devoir se libérer de cette conception de la femme par trop réductrice. Du très provocant canapépied en vinyle de Nicola L, une artiste française qui a passé l’essentiel de sa vie à New York où elle aimait à créer des objets fonctionne­ls, à Marie Menken, pionnière du cinéma expériment­al, qui a mis une caméra entre les mains d’Andy Wharol, en passant par des dessins érotiques inspirés de comics ou de la mythologie, autant de signes et d’expression­s d’un monde sur le point de changer. Tout comme la représenta­tion, en super-héroïne alias Barbarella, de Jane Fonda, grande prêtresse de la paix dans le monde, qui offre dans ce film-culte de Roger Vadim le premier strip-tease en apesanteur... Petit arrêt devant le patchwork d’écrans où l’on reconnaît des icônes des yé-yé, jeunesse en pleine éclosion qui réinvente ses codes. L’artiste belge Evelyne Axell, elle, fascinée comme toute une génération par la voiture dont l’acquisitio­n se démocratis­e, peint ses escarpins sur une pédale d’accélérate­ur. L’art-assemblage, qui révèle la filiation entre artistes européens et américain et se caractéris­e par la représenta­tion d’objets usuels, fait fureur. D’aucuns y voient une volonté de s’affranchir d’une domesticit­é étouffante. Mais l’espoir est là, comme le rappelle l’oeuvre Demain sera meilleur, dans l’esprit de laquelle s’inscrivent les oeuvres de designeuse­s présentées ensuite, de même que l’hommage aux célèbres Nanas de Nikki de Saint-Phalle, qui clôture cette exposition délicieuse­ment régressive et moderne à la fois !

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