Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Maisons emportées, toitures arrachées, voitures ensevelies… : scènes de chaos à Breil
Le réveil est difficile pour les habitants du village, qui sont restés coupés du monde une bonne partie de la matinée hier. Car avant 10 h 45 et le dégagement de la route du col de Brouis, tout contact avec Breil était rendu purement impossible : l’accès par la RD 6204, artère principale pour se rendre dans la vallée, est coupé depuis la veille, après plusieurs éboulements, et les téléphones ne captent plus aucun réseau. Silence total, si ce n’est le vrombissement des eaux encore très agitées de la Roya.
Un père de famille disparu
Regroupés à la caserne des pompiers, les secours poursuivent l’organisation de leurs opérations de reconnaissance. Plusieurs quartiers sont encore isolés et des familles restent sans nouvelles de leurs proches. C’est le cas d’Aurélie, son frère et ses deux soeurs. Tous les quatre sont venus de Menton dans l’espoir d’avoir des nouvelles de leur père. « La dernière fois que je l’ai eu au téléphone, c’était vendredi à 18 h 30,
souffle Aurélie. Il est livreur et se trouvait sur la route entre Sospel et Tende. Il disait qu’il était au milieu de
nulle part, qu’il faisait noir et que la route été inondée. Et la ligne a coupé. »
Sans moyen d’appeler qui que ce soit, les frères et soeurs sont venus voir sur place «oùçaenest» . «On demande une reconnaissance par hélicoptère, au moins pour voir si on localise sa voiture. » Mais hier, les hélicoptères ont tardé à venir dans la vallée [lire
page précédente].
Sur le reste de la commune, les habitants découvraient peu à peu les dégâts. Sur la place principale, où le fleuve s’est totalement levé de son lit, les flots ont atteint près de 2,20 mètres de haut. Les murs encore mouillés sont là pour en témoigner. Pelles et seaux en main, agents de la ville et habitants tentent d’évacuer la boue comme ils peuvent. Quelques mètres plus haut, rue Ciappéra, Jonathan et Patricia retrouvent à peine leur appartement respectif. Jonathan a passé la nuit dans le centre d’hébergement d’urgence ouvert par la mairie. « Nous avons d’abord été au gymnase, mais il a été inondé, alors nous avons dormi au collège », explique-t-il, au milieu de son appartement dévasté. Vendredi soir, les fortes rafales de vent ont fait voler les tuiles de la petite maison de village, laissant s’engouffrer la pluie sur le premier étage. Au rez-de-chaussée, le faux plafond n’a pas résisté bien longtemps. La chambre et le salon de Jonathan sont plongés dans le noir et inondés. À côté, Patricia n’a pas eu plus de chance. « J’étais en train de rentrer mon linge quand les tuiles [au-dessus
de son balcon, ndlr] se sont envolées. J’en ai reçu une sur la tête. J’ai à peine eu le temps de me retourner que le vasistas a cédé. Toute l’eau est rentrée. Je n’ai plus rien. Plus d’habits, plus de
nourriture », dit la retraitée, qui doit son salut à l’intervention de son voisin. Sur l’autre berge, dans le quartier de l’Isola, le paysage n’est que désolation. L’avenue Georges-Clemenceau, où se trouvaient encore, 48 heures avant, des places de stationnement, n’est plus. La boue stagne le long des façades des habitations évacuées en urgence. Martin et Margaux venaient d’emménager au rez-dechaussée de l’immeuble voisin de La Poste. « Nous ne sommes partis qu’hier mais l’immeuble donne l’impression d’avoir été abandonné depuis 100 ans. » Le couple a essayé de sauver quelques affaires, mais la boue a tout recouvert. «On est partis sans rien. On n’imaginait pas que les dégâts seraient aussi importants. »
Menton a ouvert, hier soir, le gymnase du Careï pour
accueillir des sinistrés de la Roya.