Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)
Une pionnière des potagers en ville et en entreprise
Alors que Les 48 Heures de l’agriculture urbaine auront lieu à Toulon les 10 et 11 octobre pour la première fois, Carine Chevrier vante la création de potagers en ville et en entreprise
Alors qu’aujourd'hui, les projets d'agriculture urbaine fleurissent un peu partout dans les villes et sont devenus tendance, Carine Chevrier a fait partie des pionniers dans ce domaine. Cet été – en même temps qu’à Nice d’ailleurs –, cette Varoise a participé à la création du Collectif varois pour l’agriculture urbaine qui regroupe des professionnels paysagistes, agriculteurs, associations environnementales et pour la défense de la biodiversité et du paysage agricole, et citadins engagés. Tous ensemble, ils ont décidé d'organiser, les 10 et 11 octobre, le premier Festival de l'agriculture urbaine à Toulon, « une sorte de Fête de la musique autour du jardinage et de l'agriculture ouverte à tous », selon Carine Chevrier. Ces « 48 heures de l'agriculture urbaine » n'avaient eu lieu l'an dernier que dans quinze villes françaises. Cette année, Toulon en fait partie. Une bonne nouvelle pour cette militante de la première heure.
L’agriculture du futur
Ingénieure agronome originaire de la capitale, Carine Chevrier est venue s'installer à Toulon, dans le Var, en 2008. Après avoir développé, comme chargée de mission, de nombreux projets pour le monde agricole, et favorisé son développement économique et celui du photovoltaïque, la jeune femme a créé, en 2017, sa microentreprise Sème et Récolte. Aux côtés de la Jeune Chambre Economique, elle avait mené, en 2014, une étude prospective sur l'agriculture du futur qui l’a conduit à découvrir la permaculture.
Le but de Sème et Récolte est de développer des jardins participatifs « pour ramener les gens à mettre les mains dans la terre et redécouvrir comment fonctionne le vivant, tout en partageant un moment de plaisir ».
Créer un jardin partagé pour des habitants résidant dans des tours d’immeubles en plein coeur de ville ou un potager d'entreprise pour « oxygéner » les salariés dans le cadre de la qualité de vie au travail, ce n'est pas seulement les aider tous à mettre les mains dans la terre. C'est aussi les amener à s'interroger : « L'idée, c'est d'apprendre à observer, à se poser des questions, quelles associations entre les plantes, pourquoi ça marche ou pas, et d'amener les gens à se réintéresser et à observer la nature, pour faire avec la nature, malgré les contraintes. » Dans le quartier de La Rode à Toulon
où Carine Chevrier gère notamment plusieurs jardinières mises à disposition par la ville, il est écrit sur le panneau « Agriculture urbaine. Un écosystème productif. » Car au fond, c'est quoi l’agriculture urbaine ? « D'après la définition, c'est tout ce qui regroupe la production agricole en ville et en périphérie, et qui alimente la ville, comme les AMAP(1), les jardins partagés, les fermes pédagogiques et certains jardins individuels, explique-t-elle. L'idée est qu'il faut revenir à une alimentation destinée à la ville, sans faire des kilomètres pour aller chercher des salades ou des fraises par exemple. » Du circuit court sans production de CO2 inutile en somme.
La force des réseaux
Le but de Sème et Récolte est donc de développer des jardins participatifs « pour ramener les gens à mettre les mains dans la terre et redécouvrir comment fonctionne le vivant, tout en partageant un moment de plaisir ». Si le recours aux circuits courts nous paraît aujourd'hui évident, il y a quelques années, Carine Chevrier a dû partir en croisade pour convaincre autour d'elle de multiplier ces potagers, notamment en entreprise. A travers les réseaux économiques de l'écosystème varois (l'espace de coworking L'Archipel à Toulon, la chambre de commerce, l'association de commerçants Afuzi à La Garde, la Région Sud...), Carine Chevrier a développé plusieurs projets de plantations et d'ateliers participatifs avec du public et dans les entreprises. « En 2017, il y avait des jardins partagés à Toulon mais sur les projets d'agriculture urbaine, nous n'étions pas nombreux, c'était laborieux. Il y avait une tendance de fond sur l'environnement mais très associative. Aujourd'hui, l'agriculture urbaine s'installe. Il y a d'autres entrepreneurs qui avancent sur le sujet », se réjouit l’ingénieure agronome. Ce festival de l’agriculture urbaine scelle ainsi un changement des mentalités. Une sensibilisation grandissante du public, des collectivités et des entreprises autour de ces questions. A travers des conférences, ateliers, ventes de plantes et semis, et portes ouvertes de ces jardins partagés, AMAP et fermes pédagogiques de toute l’aire toulonnaise et même au-delà, le rêve de Carine Chevrier se concrétise. Membre du réseau Noocity (une startup portugaise qui fournit des jardinières adaptées et intelligentes car légères et économes en eau), la quadragénaire espère voir fleurir à l’avenir à Toulon, comme dans d’autres grandes villes du réseau comme à Marseille et à Nice, des potagers sur les toits terrasses des immeubles. « Ce serait une première. » (1)